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C’est sur la base de ce constat que les Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) et le Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV), à Lausanne, ont décidé de lancer un programme pilote de méditation de pleine conscience destiné, dans un premier temps, aux patientes atteintes de cancers gynécologiques.
On travaille sur les émotions difficiles, en apprenant non pas à les éviter mais à les accepter dans un esprit d’auto-compassion
Linda Carlson, professeure en oncologie psychosociale à l’Université de Calgary, au Canada
Afin d’évaluer au mieux les effets de la méditation, cette étude se réalisera sous une forme randomisée, à savoir qu’un groupe de femmes bénéficiera d’une formation de dix sessions, et pas l’autre. Des prélèvements sanguins permettront aussi d’effectuer des mesures biologiques en lien, notamment, avec les processus immunitaires et le vieillissement cellulaire, tandis que des questionnaires se pencheront sur les aspects psychologiques.
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Sans jugement
«La méditation de pleine conscience est l’approche qui a été la plus étudiée jusqu’à présent, explique Marie-Estelle Gaignard, médecin au service d’oncologie des HUG et principale instigatrice de l’étude. Ses effets sur l’anxiété, la dépression ou encore les fonctions immunitaires, ainsi que sur le niveau de cortisol – à savoir l’hormone du stress –, ont tous été mis en évidence par le biais de méta-analyses.» En juin 2018, l’Association américaine d’oncologie clinique (ASCO), recommandait même son usage pour les femmes atteintes d’un cancer du sein, comme un moyen fiable d’améliorer la qualité de vie ou les troubles de l’humeur.
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Pionniers en Suisse, les HUG ont instauré la méditation de pleine conscience depuis plus de quinze ans dans leur département de santé mentale et psychiatrie, sous l’impulsion du professeur Guido Bondolfi, dont le service collabore également à l’étude qui démarrera à la fin de l’année. Laïque, cette méthode créée en 1979 par le biologiste moléculaire Jon Kabat-Zinn consiste à porter son attention sur le moment présent, sans porter de jugement. Son but initial était de prendre en charge les patients souffrant de douleurs chroniques ou de troubles engendrés par le stress, d’où son nom de Mindfulness-Based Stress Reduction (MBSR).
Méthode spécifique au cancer
Face au succès rapidement rencontré par cette technique, les indications ne tardent pas à s’étendre. C’est ainsi qu’à la fin des années 1990 Linda Carlson, professeure en oncologie psychosociale à l’Université de Calgary au Canada – qui sera présente le 17 octobre prochain à Genève dans le cadre d’un symposium sur l’oncologie intégrative –, élabore, pour les patients atteints de cancer, le programme MBCR pour Mindfulness-Based Cancer Recovery.
«Durant la formation, des sessions sont basées sur la gestion des effets secondaires, tandis que d’autres se penchent sur des techniques de respiration permettant de mieux vivre les traitements difficiles ou de mieux dormir, détaille au Temps Linda Carlson. On travaille également sur les émotions difficiles, en apprenant non pas à les éviter mais à les accepter dans un esprit d’auto-compassion.»
Reste la question de l’implantation de tels programmes au sein d’hôpitaux universitaires, aspect qui sera également étudié par le projet pilote. «Il y a clairement une ouverture de plus en plus grande des institutions à ce type d’approches, observe la professeure Manuela Eicher, infirmière consultante en recherche au département d’oncologie Unil-CHUV et responsable du volet lausannois de l’étude. Il est néanmoins important que l’ensemble du personnel soit engagé et impliqué si l’on souhaite que ces méthodes trouvent leur place à long terme.»
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Premier symposium d’oncologie intégrative, le 17 octobre 2019 à l’auditoire Marcel Jenny, HUG. Entrée libre sur inscription.