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Faites le test pour savoir si vous êtes sujet à l’apnée du sommeil

Un test appelé «NoSAS», mis au point au CHUV, est à faire chez soi, afin de déterminer une probabilité d’atteinte de syndrome d’apnées du sommeil

Dans le canton de Vaud, 8 000 personnes sont soignées pour le syndrome d'apnées du sommeil — © stocking/123RF
Dans le canton de Vaud, 8 000 personnes sont soignées pour le syndrome d'apnées du sommeil — © stocking/123RF

Se réveiller fatigué, avoir de la peine à se concentrer et piquer du nez en pleine journée ne sont pas forcément les conséquences d’un mode de vie surchargé. Un syndrome appelé «apnées du sommeil» peut provoquer ce genre maux; il touche en Suisse, en moyenne, un homme de plus de 40 ans sur deux. Le problème est double: la plupart des personnes atteintes ignorent qu’elles en souffrent, et des apnées nocturnes non soignées doublent le risque d’accident vasculaire cérébral (AVC). Pour y remédier, des scientifiques du CHUV ont inventé un test à faire chez soi, afin de déterminer pour chacun le risque d’être concerné. Leurs travaux sont décrits ce vendredi dans la revue «The Lancet Respiratory Medecine».

Le syndrome d’apnées du sommeil (SAS) est causé par la fermeture répétée de la gorge durant la nuit, ce qui occasionne une mauvaise oxygénation ainsi qu’un stress pour l’organisme augmentant entre autres, les risques d’AVC et d’hypertension. L’obstruction des voies respiratoires est due à un dysfonctionnement des muscles du pharynx. Cependant, ce phénomène n’est pas forcément pathologique. Un nombre de cinq apnées par heure est courant. Par contre, s’il est supérieur à 20 par heure, c’est que l’organisme ne fonctionne plus de manière normale. Une atteinte du SAS est alors probable.

Un test pour les non-spécialistes

Le test, appelé «NoSAS», questionne cinq critères en attribuant un nombre de points aux réponses émises. En fonction du score obtenu, le sujet est jugé à risque ou non. Raphaël Heinzer, coinventeur du test et chercheur au CHUV explique: «Le NoSAS est un outil de diagnostic qui s’adresse à des non-spécialistes du sommeil, tels les médecins généralistes et anesthésistes ou les particuliers qui doivent décider de la nécessité d’un examen spécialisé.»

Les paramètres ont été déterminés sur la base d’une étude menée sur plus de 3000 personnes vivant en Suisse et au Brésil et suivies depuis 2013. Pour cette étude dite de «cohorte», les sujets ont été choisis au hasard dans la population, dans le but d’obtenir une représentation la plus proche de la réalité. Un traitement statistique a permis d’établir un lien plus ou moins fort entre certains critères et le SAS.

Ainsi, l’indice de masse corporelle (IMC) peut-il comptabiliser un grand nombre de points car, dans la majeure partie des cas d’IMC élevés, les apnées y sont très liées. Raphaël Heinzer: «Nous avons aussi choisi les critères pour qu’ils soient le moins subjectifs possible afin de minimiser les erreurs de jugement. Le seul critère un peu subjectif est le ronflement tant son appréciation dépend de la personne dormant à côté du sujet…»

Faites le test!

En cinq points, déterminez votre risque d’être concerné par le syndrome d’apnées du sommeil.

Les hommes récoltent d’emblée deux points, les femmes zéro.

Résultat: si votre score total est supérieur à huit points, vous êtes une personne à risque.

Que pensent de cette invention les autres spécialistes du domaine? Selon Dan Alder, «somnologue» à l’hôpital universitaire de Genève (HUG), qui n’a pas participé à l’étude, «le travail méthodologique «caché» dernière le simple score [fourni par le test] est très robuste». En témoignent les chiffres qui dénotent d’une fiabilité de 90%.

Si le résultat du test est positif, et que des fatigues sont observées, un examen appelé «polysomnographie respiratoire» peut être recommandé. Sur décision médicale, il peut être fait chez soi à l’aide d’un appareil mesurant le flux d’air nasal, le taux d’oxygène sanguin et les mouvements respiratoires.

1500 francs suisses

Et lorsqu’il est fait en milieu hospitalier, cet examen est encore plus précis. Il permet alors de mesurer aussi la qualité du sommeil. Or cet examen coûte jusqu’à 1500 francs. Pour Jean-Yves Sovilla, neurologue à Yverdon-les-Bains, «du point de vue «économique» de la prestation des soins, le NoSAS est donc utile» étant donné les coûts importants générés par les polysomnographies. «Toutefois je considère que la discussion avec le patient ne doit pas en être minimisée.»

Au-delà de cet aspect pécuniaire, l’anesthésiste Eric Albrecht du CHUV, voit dans le test la possibilité d’augmenter la sécurité des patients anesthésiés et explique: «Un patient souffrant d’un fort syndrome apnéique peut développer des complications jusqu’à trois jours après le réveil. Ce test nous permettra de mieux cibler les patients ayant besoin d’un suivi postopératoire plus poussé.»

Actuellement, un test appelé «Stop Bang» est effectué mais ses critères ont été déterminés sur l’étude de 200 personnes au Canada. Si bien que cette démarche est peu représentative de la population suisse. «Nous allons mettre en place le protocole du NoSAS le plus vite possible», dit Eric Albrecht.

Anitha Lüthi, neurologue à l’Université de Lausanne, qui n’a pas pris part aux recherches sur le NoSAS, voit dans cette recherche d’autres débouchés encore: «Cette étude postule même qu’il est possible de développer des Apps (applications numériques, ndlr) pour que les médecins généralistes puissent évaluer la constellation de facteurs liés aux apnées nocturnes chez leurs patients!» Et d’ajouter, plus généralement, que «cette étude encourage la poursuite de recherches fondamentales visant à mieux connaître les relations entre le sommeil et l’état de santé en général».

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