Chaque année, c’est la même rengaine: avec l’automne vient aussi le temps de se vacciner contre la grippe saisonnière. Mais en période de covid, le message des médecins se fera probablement plus insistant: grâce à la petite piqûre, les personnes à risque peuvent échapper à l’influenza, ou voir leurs symptômes clairement atténués.

Le but: laisser plus de lits disponibles pour les cas de covid, même si les grippés finissent rarement à l’hôpital – un ou deux par an en soins intensifs* au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV), tout au plus.

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«Le risque de concomitance de deux épidémies existe, affirme Yann Hulmann, porte-parole de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP). La sensibilisation des personnes à risques accrus de complication est donc essentielle, de même que pour les personnes qui sont en contact régulier avec elles, dans le cadre privé ou professionnel (proches, professionnels de santé, personnel de crèches…). Pour elles, la vaccination est clairement recommandée.»

Les personnes à risque sont les plus de 65 ans, les femmes enceintes, les prématurés jusqu’à deux ans. Certains individus souffrant de maladies chroniques sont aussi plus fragilisés face au virus.

La grippe saisonnière et le covid, même s’ils sont très différents, peuvent se manifester de la même manière: fièvre, toux, fatigue, douleurs musculaires. Le diagnostic sera donc facilité si une personne infectée présente ce tableau clinique, mais est vaccinée contre l’influenza: les soignants pourront plus rapidement identifier un éventuel covid, proposer un traitement adapté, que ce soit à la maison ou à l’hôpital. En 2019, la grippe était à l’origine de 112 000 à 275 000 consultations médicales – si une partie peut être évitée, ce n’est pas rien.

En plus de désengorger les établissements de santé, la vaccination peut aussi réduire le nombre de tests PCR réalisés pour savoir si une personne est atteinte du coronavirus, alors qu’elle est en fait contaminée par la grippe. Là aussi, l’effet positif pourra être ressenti par les laboratoires, qui doivent analyser des milliers d’échantillons par jour.

Plus de doses commandées

Les vaccins peuvent être administrés d’ici à un mois, autour de la mi-octobre, jusqu’au début de la vague de la grippe, qui commence le plus souvent en janvier ou février. L’OFSP prévoit-il plus de doses que d’habitude? «Le marché suisse est d’ores et déjà assuré de disposer de 1,2 million de doses, comme les années précédentes, répond Yann Hulmann. La Confédération continue de travailler à accroître les disponibilités pour le marché suisse.» Si davantage de citoyens souhaitent se vacciner, il faut en effet que les quantités soient suffisantes. La Suisse n’est pas seule à adopter cette stratégie, mais Berne devrait pouvoir se procurer 400 000 doses supplémentaires au moins, disponibles en novembre.

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«A Genève, l’Etat prévoit une campagne de vaccination plus offensive que les années précédentes, relève Laurent Paoliello, chargé de communication au Département de la santé. La marge de progression est importante car dans le canton, précise-t-il, selon les années, entre 5 et 8% des gens se font vacciner». Au niveau national, l’espoir est aussi d’augmenter la vaccination chez les personnes à risque, qui ne sont que 30% à sauter le pas d’habitude, en moyenne.

Au CHUV, la vaccination du personnel sera aussi vivement encouragée. «Nous avons pour cela commandé plus de doses que les années précédentes», précise son service de communication.

Mesures barrières

On ne sait pas comment évoluera la grippe cet hiver. Les gestes barrières semblent limiter sa transmission, comme on l’a vu dans divers pays durant l’hiver austral, où elle a en outre semblé moins virulente cette année, remarque Oriol Manuel, responsable de l’Unité des maladies infectieuses en transplantation du CHUV.

Pour l’épidémiologiste Marcel Tanner, «le port du masque, la distanciation et le lavage des mains ne remplaceront pas la vaccination contre l’influenza, et vice-versa. C’est en faisant les deux à la fois que nous pourrons mieux lutter contre la grippe, et le covid.»

*modification du 23 septembre 2020. Une version précédente de ce texte indiquait que seul un ou deux cas de grippe étaient traités au CHUV chaque hiver. En fait, il s'agit du nombre de personnes accueillies aux soins intensifs du CHUV pour une grippe chaque hiver.