Voilà une nouvelle peu réjouissante sur le front de la vaccination. Selon une étude, dont les résultats ont été publiés ce 3 juin dans la revue The Lancet, le vaccin à ARN messager mis au point par Pfizer/BioNTech contre le Covid-19 verrait son efficacité significativement diminuée contre le variant Delta ou B.1.617.2, identifié en Inde pour la première fois et dont on estime qu’il possède une contagiosité 60% supérieure au variant anglais, lui-même déjà plus transmissible que la lignée l’ayant précédé.

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Conduit par l’University College London Hospital et l’Institut Francis Crick à Londres, ce travail avait pour objectif de mesurer chez 250 participants volontaires (âge médian: 42 ans) les titres d’anticorps présents après la première dose et la seconde dose de vaccination face à différentes souches du virus: la souche dite sauvage du SARS-CoV-2, la souche D614G détectée durant la première vague d’infection en 2020, le variant Alpha ou B.1.1.7 identifié pour la première fois au Royaume-Uni, le variant Bêta ou B.1.351 dit sud-africain, et enfin le variant Delta ou B.1.617.2, dit indien.

«Deux doses de vaccination ont déclenché des anticorps neutralisants contre toutes les souches testées, signalent les auteurs. Les titres d’anticorps étaient cependant réduits de 5 à 8 fois contre le variant B.1.617.2 comparé à la souche sauvage, de 2 à 6 fois contre le variant B.1.1.7 et de 4 à 9 fois contre le variant B.1.351.» Une seule dose de vaccin ne semble en outre pas suffire à neutraliser les variants apparus récemment, pointent les scientifiques.

Diminution des anticorps avec l’âge

Par ailleurs, selon les auteurs, les participants ayant un faible taux d’anticorps neutralisants ont tendance à être plus âgés que ceux ayant produit des réponses moyennes ou élevées. L’âge serait donc un facteur significatif dans la réduction des anticorps neutralisants, indépendamment de la souche étudiée.

«L’augmentation de l’âge, mais aussi du temps écoulé depuis la deuxième dose est corrélée à une neutralisation virale réduite dans toutes les souches testées. Ce n’est pas une surprise, mais étant donné les faibles titres de départ par rapport à B.1.617.2, il est plus préoccupant de voir la neutralisation chuter de manière significative», écrit sur Twitter David LV Bauer, responsable du RNA virus Replication Laboratory à l’Institut Francis Crick et l’un des auteurs de l’étude parue dans The Lancet.

Face à ces résultats, le scientifique pointe la possibilité de devoir faire appel à des boosters vaccinaux: «Des vaccinations de rappel pour les groupes âgés ou vulnérables seront probablement nécessaires pour maintenir des niveaux plus élevés de titres d’anticorps neutralisants dans les régions où le variant B.1.617.2 ou d’autres souches également résistantes deviennent prévalantes.»

Double défi

A noter que l’étude anglaise n’est pas la première à démontrer une moindre sensibilité du variant B.1.167.2 aux anticorps neutralisants développés par les personnes ayant été préalablement infectées par le Covid-19 ou vaccinées. C’était également le cas d’un travail réalisé par une équipe française et paru à la fin du mois de mai sur le site de prépublication bioRxiv, comme le signale le médecin Marc Gozlan sur son blog Réalités Biomédicales.

Selon les chercheurs, les mutations présentes dans la protéine spike du variant B.1.167.2 seraient capables de modifier la liaison du virus au récepteur cellulaire ACE2 (la porte d’entrée de SARS-CoV-2 dans l’organisme), ce qui permettrait à ce dernier d’échapper en partie à la réponse immunitaire humorale, celle des anticorps.

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Le variant Delta présente donc un double défi: d’un côté une transmission accrue et de l’autre une efficacité vaccinale sensiblement réduite. «Il reste néanmoins difficile d’évaluer précisément dans quelle mesure la réduction des titres d’anticorps neutralisants observée aura un impact sur l’efficacité du vaccin et augmentera la sévérité de la maladie au sein d’une population vaccinée, tempère David LV Bauer. En particulier lorsque l’on considère les multiples facteurs qui peuvent contribuer à conférer une protection, comme l’immunité cellulaire qui persiste bien plus longtemps.»