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Bâle fait défiler l'antichambre de la mode suisse. Belles promesses

Les étudiants stylistes de la principale école suisse se sont envolés samedi soir

«C'est devenu tellement plus grand. On sent qu'il y a une volonté politique, et de l'argent. A mon époque, nous cousions encore nos vêtements dans un tout petit atelier.» Samedi soir sur les bords du Rhin, le défilé de mode de la Haute Ecole des arts appliqués de Bâle vient de s'achever. Entre jupes sanglées et ombres japonisantes, une quinzaine de frais diplômés (un record) ont fait défiler leurs vêtements. Immense halle pleine à craquer, mise en scène parfaite. Grâce à son dynamisme et au jeu des concentrations des hautes écoles helvétiques, Bâle est devenu l'épicentre de l'enseignement de la mode en Suisse (LT du 20.02.04).

Mercenaires de la mode

La jeune femme qui s'étonne de l'ampleur prise par la manifestation s'appelle Suzanne Schweizer. Attablée devant un plat de hachis qu'elle arrose de compote de pommes «comme à la maison», elle raconte qu'elle travaille à Paris, chez Cacharel. A sa table, on trouve le Vaudois Laurent Mercier, Christoph Hefti et Adrian Reber. Les quatre sont suisses. Et mercenaires de la mode. Mercier a été le médiatisé directeur artistique de la maison parisienne Balmain. Hefti, a travaillé pour Jean Paul Gaultier avant de se fixer à Anvers où il dessine des imprimés pour Dries van Noten. Quant à Reber, après une collection en son nom remarquée, il roule désormais pour Hugo Boss. Et pourquoi sont-ils venus à Bâle? Pour donner leurs conseils de pro aux jeunes diplômés. «Et pour embaucher d'éventuels stagiaires, qui sait?» Jeter des ponts entre l'école et le monde du travail n'est pas le moindre mérite de la Haute Ecole de Bâle.

Et sur le podium, qu'est-ce que ça donne? Un très bon niveau d'ensemble, même si le coup de génie est encore rare. On retiendra la collection de Suzanne Berchtold, toute en sangles et asymétries, pour son idée de départ, entre journal intime et concept affûté: «Tout est parti de la bretelle de mon soutien-gorge que je passe mon temps à remonter et que je n'arrive pourtant pas à changer.» Les longues lianes d'Anita Michaluszko: ses imprimés à pois sont pile poil dans la tendance mais déjouent l'ennui du bon goût – nos quatre Suisses ont adoré. Les tenues d'enfants-géants de Valérie Jantz, mailles immenses, boutons suragrandis, Alice au pays du XXL. Sinon, beaucoup de découpes arrondies, de tailles basculées. Emmitouflures, plis et recoins. Peu d'angles, pas mal de vêtements-refuges. A Bâle, on est plus proche de la mode belge, du surhabillé ou des recherches d'As Four que de l'excès, ou de la provoc d'un Galliano. Réflexion plus que passion. Presque de quoi parler d'un style suisse, presque.