La Corée du Sud primée à Venise
Architecture
Le pavillon coréen tente de réunifier la péninsule. Le Canada, la France et la Russie se voient attribuer les mentions spéciales

La Corée du Sud primée à Venise
Architecture Le pavillon tente de réunifier la péninsule
Le jury de la 14e Biennale d’architecture a décerné son Lion d’or à la Corée du Sud, pour une exposition intitulée Crow’s Eye View: The Korean Peninsula («la péninsule coréenne, dans l’œil d’un corbeau»). Un projet né d’une frustration, un plan B, pour pallier une conversation qui n’a jamais eu lieu.
Pour cette biennale dirigée par Rem Koolhaas, les pavillons nationaux avaient pour mandat de réfléchir à l’évolution de leur architecture entre 1914 et 2014. Or, la péninsule coréenne présente, au cours de ce siècle, une histoire tout à fait singulière. Son annexion par le Japon, entre 1910 et 1945, la laisse exsangue. La guerre de Corée, de 1950 à 1953, la ravage entièrement et la divise jusqu’à ce jour. Un peuple dont la culture est cinq fois millénaire se trouve séparé, du jour au lendemain, de la manière la plus hermétique qui soit.
Pour Minsuk Cho, commissaire du pavillon coréen, une réflexion architecturale sur les 100 dernières années devait, nécessairement, porter sur la péninsule dans son entier. Aussi a-t-il déployé des efforts considérables et persistants, deux ans durant, pour entrer en contact avec des architectes nord-coréens. La situation politique particulièrement tendue a eu raison de son projet.
Alors, pour gagner un semblant de vision architecturale à l’échelle de la péninsule (le point de vue impossible du corbeau), Minsuk Cho a dû multiplier les collaborations avec des étrangers, seuls à avoir l’accès physique à Pyongyang. Le résultat donne la vision étonnante d’une péninsule qui semble unie dans son architecture moderne, au-delà de l’absurdité du fossé politique qui la divise.
Le Lion d’argent pour le Chili
Le Lion d’argent, politique lui aussi, récompense le Chili pour Monolith Controversies, qui présentait un pan de mur préfabriqué, tel qu’il s’en produisait en série, en 1972. Ces morceaux de béton devaient servir à la construction de logements sociaux. L’un d’eux fut signé par Salvador Allende, puis exposé à l’entrée de l’usine, jusqu’au coup d’Etat de 1973. Sous la dictature d’Augusto Pinochet, la signature fut découpée, puis remplacée par une peinture de Vierge à l’enfant. Le mur présenté à Venise est quant à lui entièrement vierge de ces controverses anciennes.
Trois mentions spéciales ont récompensé les excellents pavillons du Canada, pour Arctic Adaptations: Nunavut at 15, de la France, pour La modernité, promesse ou menace? et de la Russie, pour Fair Enough.
«Fundamentals», Biennale d’architecture, Venise. Jusqu’au 23 novembre 2014.