Un jour, une idée

Une croisière lunch Belle Epoque pour dandy du XXIe siècle

Le mercure tutoie les 35 degrés, vous avez une folle envie d’air frais et de vous changer les idées, vous êtes sur la côte lémanique? Il y a une solution à cela: elle embarque à 11h40 d’Ouchy, vous ramène à quai 3h40 plus tard. Elle s’appelle «Lavaux et château de Chillon», la croisière lunch d’un duo de choc: la flotte Belle Epoque de la CGN et la valeureuse brigade de LakeGourmet.

Vendredi 5 juin, au matin, on avise donc le mercure: il va faire chaud. On prend ses précautions, car l’on ne voudrait pas mourir de faim: un coup de fil à la CGN (0848 811 848) pour réserver sa place dans les salons lambrissés du navire amiral de la flotte, La Suisse. Et en bateau Simone, c’est le capitaine Philippe Robert-Charrue (un Neuchâtelois) qui tient le gouvernail, c’est nous qui klaxonnons l’article. Une croisière, fût-elle de quatre heures à peine, est toujours l’expérience unique d’une fascinante petite communauté humaine. Philippe Robert-Charrue: «Ce parcours fait chaud au cœur. Regardez, il y a les petits des courses d’école qui découvrent le bouillonnement des flots – «la limonade, la limonade!» –, le vent, le lac, la vue; et puis les familles, les couples, tous les touristes venus s’extasier devant les paysages...» De fait, sur le pont inférieur rissolent au soleil, sous l’œil attentif des maîtres et maîtresses d’école, des dizaines de petits lardons surexcités. Que l’on entend néanmoins à peine, pour peu que l’on s’alanguisse sur les transats du pont supérieur, dont le sésame est un billet de première classe.

Le navire appareille, l’aplomb du soleil nous caresse, mais on sent à peine la chaleur tant «l’air du large» la disperse instantanément. Les haltes se succèdent, la tonalité des paysages aussi, d’abord les parcs lausannois, puis petit à petit les vignes de Lavaux, le château de Montagny-sur-Lutry, Saint-Saphorin et bientôt les molles étendues de Vevey. On songe à toutes ces célébrités, Coco Chanel, Paul Morand, Raymond Abellio, Jean Jardin, qui bercèrent leur exil d’un tel paysage… Le château de Chillon venu, direction les salons.

En cuisine, le chef Nicolas Demarest; à l’accueil, le maître d’hôtel Damien Allain, attentif, discret, efficace. On avise le menu «Dame du Lac», panna cotta de tomates, dos de cabillaud royal cuit à basse température, petite minestrone aux haricots de Soissons, dôme de fromage blanc aux fruits rouges. On loue l’équilibre tonique de la proposition. Et comme c’est la saison des asperges, on se permet d’intercaler entre panna cotta et cabillaud une belle assiette d’asperges blanches ponctuées de croustillants de viande séchée.

Pour la boisson, on laissera la main à Jeremy Le Menn, un solide Breton à peine débarqué sous les cieux sereins du Léman, et à son large sourire: «Oui, la navigation est ici plus calme qu’en Bretagne.» La main, certes, mais avec cette consigne dialectique: décliner des La Côte, puisque Lavaux vient de recueillir déjà toutes nos louanges paysagères. L’avisé chef de rang attaquera donc avec un rafraîchissant chardonnay, inclinera à poursuivre avec un damnant cabernet garanoir des caves Cidis (qui escortera aussi le choix de fromages auxquels nous n’avons bien sûr pas su résister), pour couronner le dôme avec un pinot gris vendange tardive du domaine de la Capitaine: au top, notre échanson breton!

Nous finissons la croisière en taillant une petite bavette avec un matelot au look de hipster; tout frais recruté, il étrennait ce jour-là son costume: Georges-Alexandre Metaxas, d’origine grecque et que la passion de la navigation vient de conduire à la compagnie. Quinze heures vingt: nous voici à nouveau à quai, toutes nos énergies rechargées à bloc et la conviction que sous ces cieux, tout rime avec luxe, calme et volupté.

www.cgn.ch

Tous les jours, jusqu’au 20 juin, au départ d’Ouchy, à 11h40, croisière «Lavaux et château de Chillon». Dès le 21 juin, Ouchy, départ 12h30, jusqu’à Saint-Gingolph, Le Bouveret, et retour.