Le designer suisse qui réinvente le design
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Moritz Schmid réactive d’anciens principes et ne produit jamais deux fois la même chose. Il était l’invité de la Head de Genève

Le designer suisse qui réinvente le design
Objet Invité par la HEAD de Genève, Moritz Schmid présentait hier son travail
Il travaille à la Langstrasse à Zurich, «derrière la seule fenêtre de l’immeuble où se trouve encore un arbre», détaille Moritz Schmid en vous montrant la photo d’un petit bâtiment moderne. Un minuscule morceau de nature paumé au milieu du béton.
La nature, justement. Le designer en parle beaucoup. Pas seulement celle qui se trouve dehors, mais celles du matériau et de l’espace environnant, auxquelles il porte une attention particulière.
Créateur attachant et sensationnel, le Zurichois présentait hier à la Haute Ecole d’art et de design de Genève quelques-uns de ses travaux. Des objets bien sûr, mais aussi des projets d’architecture d’intérieur. Comme cette installation musicale en verre montée au dernier Designers’Saturday de Langenthal. Moritz Schmid y présentait son étagère conçue en collaboration avec Glass Trösch, le géant bernois de la fenêtre. Une bibliothèque tout en verre dont le style fou joue sur les couleurs et la transparence et tient debout grâce à une astucieuse pièce de bois. «Je reprenais une histoire interrompue il y a 20 ans lorsque l’entreprise travaillait avec des designers comme Willy Guhl. On m’a alors proposé de dessiner un buffet. Sauf que c’est un meuble que je n’aime pas vraiment. C’est massif et ça prend de la place. Et puis il s’accommode mal avec le verre qui est un matériau lourd, technique et très compliqué à monter.» Du coup, Moritz est allé voir ailleurs pour se donner des idées. «J’ai pensé à la cuisine. Vous voyez les bocaux qui se ferment avec un couvercle en bois et qui s’emboîtent les uns dans les autres? Ma bibliothèque fonctionne sur le même principe: chaque plaque est une brique qui s’empile grâce à son petit élément de chêne.»
Trouver l’inspiration dans d’autres domaines, réactiver des savoir-faire oubliés: c’est la marque de fabrique du designer zurichois. Comme lorsqu’il reprend un ancien point de couture industriel qu’il transforme en élément décoratif pour le showroom du fabricant danois de tissu Kvadrat à Zurich. «Je réfléchis beaucoup. Pour moi, ne jamais produire deux fois la même chose est très important.» Oui mais voilà, dans le design, tout, ou presque, a déjà été inventé. «Si je dois concevoir une chaise, je vais d’abord me poser la question de savoir comment les gens vont s’asseoir dessus et ce qu’il faut changer.»
Le banc, objet communicant
En 2013, la Confédération lui commandait la fabrication d’une série de bancs à l’occasion de la Foire du livre de Leipzig. Moritz Schmid a carte blanche. Il doit juste respecter une seule condition: que ce mobilier respecte la couleur helvétique, rouge pétard donc. «Un banc, c’est un objet communicant. Il doit aider au dialogue. J’ai pensé à réduire l’assise. Lorsqu’on est posé normalement dessus, ce banc n’est pas très confortable. La seule manière de s’y sentir à l’aise, c’est de se placer légèrement de biais. La position vous pousse naturellement à entrer en contact avec la personne qui se trouve à côté de vous», explique le designer, qui a grandi dans une famille où l’on est architecte depuis au moins trois générations. «Je n’ai pas forcément de référence, de designers qui me servent de modèle. Alors oui, je vois beaucoup de choses qui m’intéressent. Mais ce qui me préoccupe avant tout, c’est le respect du matériau et comment les objets que je fabrique vont s’intégrer dans leur environnement.»