Harry, le cadet, Harry le noceur, Harry le gaffeur. Tout le monde a encore à l'esprit les images volées du prince ivre ou paradant en uniforme de l'Afrika Korps, croix gammée au bras, lors d'un bal costumé. Mais Harry a mûri. Dans le sillage de son aîné, William, il a pris de la consistance au cours de ces dernières années. Au point que les deux frères apparaissent désormais à leurs compatriotes comme des héritiers à la fois crédibles et sympathiques de la tradition royale.
Il y a dix ans, William et Harry avaient bouleversé les Britanniques lorsque leurs frêles silhouettes d'enfant avaient accompagné le catafalque de leur mère. Personne, alors, ne savait comment ils se sortiraient de la tourmente médiatique qui soufflait sur la famille Windsor. Allaient-ils perdre toute crédibilité à force d'être «déshabillés» par la presse à scandale? Ou allaient-ils parvenir à conserver, contre vents et marées, leur intégrité? La partie n'était pas jouée. Mais les pièces ont très vite été mises en place. Leur père, le prince Charles, a montré tout de suite une volonté très ferme de les protéger. Et, plus déterminant encore, les patrons des journaux à scandale ont décidé de respecter son vœu. Bien conscients que leurs lecteurs, proches de la nausée, le voulaient ainsi.
Dans ces conditions, les deux garçons ont bien grandi. Au-delà de leurs erreurs (l'aîné en a commis une cette année encore en se séparant un peu brusquement de sa petite amie), ils ont affiché peu à peu de belles qualités. «Ils ont pris du bon de leurs deux parents, analyse la journaliste française Anne-Elisabeth Moutet, auteur d'un livre* (paru cette semaine) sur le sujet. De leur père, ils ont reçu la rigueur, le côté «noblesse oblige». De leur mère, la simplicité et l'ouverture aux autres.»
Des mots. Il ne s'agit là que de mots, ont longtemps réagi les sceptiques. Mais les deux hommes ont aujourd'hui passé aux actes et montré qu'il fallait les prendre au sérieux. «A l'armée, Harry a prouvé qu'il était un meneur d'hommes, s'enthousiasme Anne-Elisabeth Moutet. Et puis son frère et lui ont bluffé tout le monde cet été lors du grand concert qu'ils ont organisé le 1er juillet, date anniversaire de leur mère. Alors que beaucoup les disaient ringards et un peu légers, ils ont obtenu un immense succès populaire.»
Surtout, William et Harry se sont imposés comme des réconciliateurs. Fidèles à la mémoire de leur mère tout en adorant leur père. Et désireux de tendre la main à chacun. Ils l'ont prouvé une nouvelle fois à l'occasion de la cérémonie de vendredi, en y invitant les deux Camilla, l'ancienne rivale de Lady Di et la fille de Mohamed al-Fayed, l'homme qui accuse leur famille d'assassinat.
«Tony Blair a profondément transformé le Royaume-Uni, plus encore que Margaret Thatcher, assure Anne-Elisabeth Moutet. Au sortir de cette tourmente, les Britanniques sont ravis de voir ces jeunes gens défendre la continuité. Et ils leur en sont reconnaissants.» William et Harry sont sur orbite. Et ce au bénéfice de la famille royale tout entière.
* William & Harry: Dernière chance pour la couronne, Anne-Elisabeth Moutet, Edit. Télémaque, Paris, 2007.