Coups de cœur et coups de poker. Depuis l’ouverture de sa galerie d’art contemporain, au printemps dernier à Genève, Mighela Lorenceau se laisse guider par son instinct, privilégiant spontanément des artistes émergents, voire hors système. Après le Vaudois Dorian Büchi ou l’Américain Nick McPhail, son espace baptisé Un[titled]1983 accueille dès jeudi les toiles du peintre américain Warner Williams. Ce jour-là, à partir de 18h, un vernissage numérique aura lieu sur le compte Instagram de la galerie, @untitled1983, avec des vidéos de l’exposition et de l’artiste.

Depuis ses débuts dans les années 1970, Warner Williams signe des paysages kaléidoscopiques d’une Californie idéalisée. Toits-terrasses avec piscine, maisons à l’aura moderniste, autoroutes interminables: autant d’artefacts de l’architecture d’après-guerre que le peintre californien recompose à coups de couleurs vives et de formes géométriques ramenées à leur plus simple expression.

Tendres, nostalgiques, ces œuvres sont aussi les témoins d’une existence passée aux marges de la société. Individu fragile et torturé, artiste craignant les foules et les lieux publics, Warner Williams a toujours rejeté le milieu de l’art contemporain. Son salut viendra de Theo Cedar Jones, un musicien américain tombé amoureux de ses toiles et bien décidé à faire connaître le peintre. «En plus de cinquante ans de carrière, Warner a accumulé des centaines de tableaux invendus. J’en ai choisi une dizaine pour l’exposition, ceux qui me touchaient le plus», confie Mighela Lorenceau.

Non loin d’Un[titled]1983, cette galeriste autodidacte a également ouvert une résidence d’artistes du même nom. Situé face au parc des Eaux-Vives, le lieu est une fabuleuse maison moderniste construite en 1998 par l’architecte franco-suisse Bénédicte Montant. «J’y ai vécu plusieurs années avec mon mari avant d’avoir des enfants, nous y avons des souvenirs très heureux. J’ai pensé que ce serait un lieu idéal pour accueillir des artistes du monde entier. Nous l’avons donc transformée.»

Le jour de notre visite, le soleil traverse les immenses baies vitrées pour éclairer quelques toiles léguées par Nick McPhail, le tout premier résident. La prochaine locataire? Sophie Treppendahl, une artiste originaire de Chicago. Une exposition suivra.


Galerie Un[titled]1983, rue du Nant 19, Genève. «Lost Coast», par Warner Williams, vernissage numérique ce jeudi 5 mars, jusqu’au 19 avril inclus, je-sa 14-18h30 et sur rendez-vous. Tous les articles de la rubrique «Un jour, une idée».