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Jean-Claude Marchand, portrait du futur directeur général d'Edipresse

Premier non-anglo-saxon à être entré au conseil d'administration du groupe Reuters britannique, il l'a quitté en juin pour divergences de vue, après 31 ans de carrière.

Ils portent le même patronyme: Marchand. L'un est depuis mars le grand patron de la Télévision suisse romande. L'autre sera dès le 1er octobre celui d'Edipresse, premier groupe de presse romand, présent à l'international. Simple hasard. Gilles et Jean-Claude n'ont aucun lien de famille. Et si le premier est connu du grand public, l'autre va le devenir. Un peu? Beaucoup? Tout dépendra de la manière dont il envisage son poste de directeur général d'Edipresse. Pour l'instant, l'homme préfère garder le silence. «Il ne souhaite pas répondre aux questions des journalistes. Il le fera lorsqu'il aura pris ses fonctions», explique-t-on chez Edipresse. Même silence chez Reuters, où le standard renvoie les curieux à sa secrétaire. Celle-ci ne répond pas. Retour donc au standard, aux archives et aux collègues.

Né en 1946, marié, trois enfants, Jean-Claude Marchand est enfant de La Chaux-de-Fonds. En 1971, après des études d'ingénieur, il entre chez Reuters, agence de presse britannique et fournisseur d'informations financières. Il y effectue toute sa carrière, occupant divers postes commerciaux en Asie et en Europe. Il vit notamment en Australie, à Singapour, Francfort et à Rome. En 1989, il est nommé directeur général pour l'Europe continentale, zone à laquelle s'ajoutent bientôt le Moyen-Orient, l'Afrique et, en 1996, les Iles Britanniques.

La même année, il entre au conseil d'administration du groupe. «La réalisation dont je suis le plus fier, avouait-il en mai à l'hebdomadaire Bilan. Je suis le premier non-anglo-saxon à y siéger.» Récompense pour un excellent vendeur, analysaient les spécialistes. «Sa division contribue à 40% du chiffre d'affaire du groupe, avec les Iles elle va passer à 55%», soulignait alors le porte-parole du groupe. Son dernier titre: «Chairman Reuters Information & Group Marketing», ou autrement dit: «responsable des activités opérationnelles et du développement liés à l'information, ainsi qu'au marketing et la vente au niveau mondial».

Pour le public suisse, Jean-Claude Marchand est surtout l'homme qui, en 1994, a embrasé Genève. Désireux d'agrandir le siège régional de Reuters, il avait choisi un terrain – proposé par le Département de l'économie publique – mais situé en pleine zone agricole. A l'issu d'un débat serré et d'empoignades dans la presse, le Grand Conseil avait accepté de déclasser l'endroit. De son côté, Jean-Claude Marchand,avait laissé planer la possibilité d'un transfert de sa division en Asie du Sud-Est. «Il sait ce qu'il veut et il se donne les moyens d'atteindre ses objectifs», raconte un de ses anciens collègues. Un «tough guy», comme le disent certains? «Non, et sûrement pas dans le sens anglais du mot, répond un de ses très proches collaborateurs. Il est «demanding» (exigeant). Quand ça ne marche pas, il parle avec les gens, il ne sanctionne pas.»

Spontanément, tous deux disent aussi de l'homme qu'il est «chaleureux, droit, à l'écoute et à la défense de ses employés (malgré son rang élevé, insiste l'un), mais aussi visionnaire et excellent dans la vente (il sait satisfaire à la fois les clients et les actionnaires, précise le deuxième).»

Lorsqu'il était candidat à la tête du groupe Reuters, le conseil d'administration lui a préféré l'Américain Tom Gloccer, qui dès sa nomination a engagé une large restructuration interne, avec de nombreux licenciements à la clef. Plusieurs cadres, dont Jean-Claude Marchand, ont préféré démissionner. «Tom Gloccer a ses propres idées concernant la manière de diriger l'entreprise, qui ne coïncident pas forcément avec les miennes, expliquait-il au Temps début juin. Après tant d'années au sein de la même société, j'ai trouvé le moment opportun pour changer de structure et affronter un nouveau challenge…»