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«Les jeunes pyromanes australiens, il faut les enfermer comme des terroristes»

La météo annonce un temps sec sur Sydney. Voilà qui ne devrait pas freiner les flammes. Ni l'ardeur des Australiens qui débattent du sort à réserver aux incendiaires parfois âgés de moins de dix ans.

La traque aux bouteurs de feu bat son plein. Douze jours après le début des incendies qui ont déjà détruit plus de 500 000 hectares dans l'Etat de Nouvelle-Galles du Sud, les Australiens veulent que les incendiaires, qui sont responsables de plus de 50% des départs de feux, soient condamnés à de très lourdes peines. Jusqu'ici, vingt-cinq personnes au moins ont été arrêtées par la police qui les soupçonne d'avoir allumé des foyers. Plus frappant: dix-sept d'entre elles ne sont pas majeures. Jeudi, deux enfants de 7 et 8 ans ont par exemple été pris en flagrant délit tout près de Wollongong, au sud de Sydney.

Cette chasse aux pyromanes et l'opprobre public sont relayés par tous les journaux locaux. «Les incendies du Noël noir, 21 Lucifers»: au-dessous de ce titre publié jeudi matin en première page du quotidien populaire, The Daily Telegraph, une photo montrait la silhouette d'hommes et d'enfants arrêtés par la police pour avoir allumé des feux. Le courrier des lecteurs dans la presse australienne est encore moins tendre. «Les pyromanes sont les véritables terroristes australiens, et il est temps maintenant que leurs activités soient réprimées impitoyablement. Les ressources nécessaires doivent être confiées aux services de police pour qu'ils poursuivent cette guerre à la pyromanie», estime Malcolm Bunston dans les colonnes du Canberra Times. Certains «Aussies» en colère ne manquent pas d'idées farfelues pour punir les incendiaires. «Je suggère qu'on les mette pour toujours dans des cages spéciales au zoo de Taronga, à Sydney», propose Len Berlin dans le journal The Sydney Morning Herald. Qui ajoute: «Le panonceau sur la cage devrait préciser: «Traître australien, ne pas nourrir.»

Le premier ministre de Nouvelle-Galles du Sud, Bob Carr, tente depuis quelques jours d'assouvir la soif de vengeance de ses concitoyens – et électeurs – en promettant de nouvelles lois pour toutes les personnes coupables d'avoir volontairement provoqué un incendie. Le droit dans cet Etat prévoit une peine maximale de 14 ans d'emprisonnement pour les pyromanes, mais les textes concernant les mineurs sont très laxistes.

Pour tenter de punir les criminels en culotte courte, Bob Carr a annoncé vendredi plusieurs mesures. Les coupables âgés de moins de 18 ans seront désormais contraints de rencontrer des victimes d'incendies, ils devront visiter des services de soins aux grands brûlés dans les hôpitaux. Ils seront aussi obligés de nettoyer des zones dévastées par les flammes. Il faut «mettre le nez des incendiaires dans les cendres», a résumé le premier ministre travailliste.

Cette réforme législative ne fait pas que des heureux. La volonté de Bob Carr d'imposer de nouvelles lois contre les mineurs est une «tentative de prendre le train émotionnel en marche», s'enflamme Nick Cowdery. Le directeur du ministère public estime que les mesures existantes sont suffisantes. «Il serait salutaire que nos dirigeants n'augmentent pas le degré d'émotion de la population», a renchéri le procureur.

La sensibilité des Australiens vis-à-vis des incendies ne devrait pas s'atténuer à l'écoute des dernières nouvelles annoncées à la veille du week-end. Un pompier, grièvement brûlé, a été évacué par hélicoptère vendredi. Plusieurs de ses collègues auraient probablement trouvé la mort la veille si l'hélicoptère affectueusement baptisé «Elvis» n'était pas venu à leur secours. Cet engin géant capable de déverser 9000 litres d'eau avec une précision quasi chirurgicale, le S-64 Erickson Air-Crane, a repoussé jeudi dans le parc national des Blues Mountains un mur de feu qui menaçait 14 pompiers. «Les flammes faisaient une boule de feu. Nous étions encerclés», a expliqué Chris Tierney au Daily Telegraph. «Elvis nous a sauvés», renchérit son collègue Darrell Pascoe. «Nous aimons Elvis», ajoute un autre rescapé, Michael Laverton.

Conscient de l'efficacité de cet hélicoptère, le gouvernement de Nouvelle-Galles du Sud vient de louer pour dix semaines deux exemplaires qui devront arriver lundi en Australie. Le premier ministre fédéral, John Howard, a en outre promis d'acheter plusieurs Erickson Air-Crane, qui coûtent la bagatelle de 8,7 millions d'euros pièce. L'heure de vol de ce réservoir volant approche quant à elle les 7000 euros. Cette note salée n'est toutefois qu'une goutte dans l'océan des dégâts provoqués par les incendies cette année. Les assureurs estiment que le coût des dommages dépasse déjà les 40 millions d'euros, soit bien plus que les 32 millions d'euros de pertes qui ont suivi les feux de 1994. Cette addition promet encore de s'allonger. Les météorologistes prévoient pour ce week-end des températures approchant les 40 degrés avec un vent assez fort.