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Michael, adieux christiques

La cérémonie d’adieux à Michael Jackson au Staples Center de Los Angeles aura servi de tribune politique et religieuse, émaillée par des hommages musicaux.

«Parle plus fort, chérie», souffle Janet Jackson. Dans sa sage robe noire, la fillette blonde s’agrippe au micro. «Mon papa était le meilleur papa du monde. Et je voulais juste dire que je l’aime tant.» Puis Paris, 11 ans, la seule fille de Michael Jackson, éclate en sanglots devant la salle pétrifiée. La nuée de ses oncles et tantes l’emmène prestement. Le visage nu de l’enfant contraste avec ceux de sa parenté, tous cachés derrière des lunettes noires. Le cercueil doré à l’or dans lequel repose la dépouille de son père quitte le Staples Center. Clap de fin sur une cérémonie qui aura mêlé tous les genres pendant plus de deux heures.

Combien de gens ont-ils vu l’image de cet l’enfant en pleurs? Un milliard? Une chose est sûre, c’est que cette scène, furtive mais tout de suite rediffusée et commentée sur les médias électroniques aura encore fait croître, chez les téléspectateurs et les internautes, le sentiment d’empathie collective qui a pris la planète depuis la mort de Michael. D’autant que Paris n’était jamais apparue vraiment en public et qu’on a beaucoup glosé sur la paternité de l’enfant, sur les qualités paternelles de son père.

La cérémonie funèbre, appelée «A Celebration of Life», a commencé avec du retard et des envoyés spéciaux perdus en conjectures sur son déroulement. Absente, Elizabeth Taylor. L’amie, la grande amie du défunt avait communiqué via le site Twitter qu’elle ne participerait pas à ce «cirque». Sur le plateau de France2, Christian Audigier, styliste français installé à Los Angeles, et ami, comme il l’a beaucoup dit, de Jackson comme de Johnny Hallyday, a perdu de sa faconde. A l’écran, les limousines défilent. On aperçoit à l’avant d’une voiture le patriarche, Joe Jackson. «Il veut être sûr d’être sur les photos», siffle Christian Audigier. «Le tapis rouge s’est transformé en tapis noir», glisse un commentateur devant les invités en deuil qui arrivent.

Il est 10h10 heure locale quand Smokey Robinson, artiste-phare du label Motown, monte enfin sur scène pour lire des messages de Diana Ross et de Nelson Mandela. Dans la salle comble, un silence lourd se fait pendant près de vingt minutes. Les commentateurs meublent en débattant de Neverland, de l’héritage financier – «le côté morbide de l’après-mort», entend-on sur la TSR – comme musical laissé par le King of Pop. Enfin, le cercueil, couvert de roses rouges, arrive. Mariah Carey, «la marraine de la Star Academy», précise Nikos Aliagas sur TF1, lance la soirée avec I’ll be there.

Berry Gordy, fondateur du label Motown, obtient une standing ovation en évoquant les débuts des Jackson Five. «Michael était le plus grand entertainer qui ait jamais vécu». Mais qu’est-ce qu’on est loin, très loin des shows du King of Pop, sauf quand l’écran géant projette des images de concerts. Alors, cris et applaudissements fusent. Mais les prestations, sobres, sont réussies, à l’image de celle de Jennifer Hudson avec Will You Be There, de Jermaine Jackson avec Smile ou du petit Shaheen Jafargholi, demi-finaliste de l’édition britannique de «La Nouvelle Star» avec Who’s Lovin’You. Seul le chanteur Usher en fait trop en touchant le cercueil.

Le basketteur Magic Johnson détend la salle en racontant comment il avait partagé du poulet frit avec le défunt, avant de tomber dans les bras des frères Jackson réunis au premier rang. «Qui sont ces gens?» s’interroge le présentateur du journal de France 2, David Pujadas. L’actrice Brooke Shields, tremblante, revient sur les fous rires partagés avec le disparu. Les caméras passent furtivement sur le petit Prince Michael, qui mâchonne un chewing-gum.

Reste que les interludes musicaux sont éclipsés par des discours oscillant entre exaltation de la foi et fierté afro-américaine, faisant de la soirée un mélange de funérailles et de tribune typiquement américain. Amour, Dieu, création, don, miracle, bonté… Autant de mots qui ne cessent de revenir tout au long de la soirée. Lionel Ritchie conclut son Jesus is Love par «Dieu avait plus besoin de lui que nous». «Nous Te remercions de nous avoir donné quelqu’un qui nous a appris l’Amour et la Joie! Qui a défait les barrières de nos divisions, qui nous a ouvert le monde! Merci Michael! Merci, merci!», hurle le révérend Al Sharpton, célèbre défenseur des droits des Noirs, à la salle debout avant de lancer aux enfants: «Y avait rien de bizarre chez votre papa! C’est ce qu’il a dû endurer qui était bizarre!» La mère du disparu essuie ses larmes.

L’hommage christique est appuyé par les enfants de Michael Luther King: Bernice King et Martin Luther King III dénoncent les «persécutions» dont a été victime la star. «Il était une lumière comme l’a été notre père. Repose en paix, Michael, notre frère». La démocrate texane Sheilah Jackson Leigh, elle, évoque la parabole du Bon Samaritain et le «miracle» qu’a été Michael Jackson pour l’Amérique et les Noirs américains. Seule star blanche à venir sur scène, le musicien John Meyer.

Le tube We Are the World réunit sur scène tous les invités, les danseurs et la famille, avant que la fratrie en larmes ne s’enlace. Sur France2, Christian Audigier confie que les frères Jackson pourraient remplacer leur frère sur scène à Londres. The show must go on.