Quelle créativité en ce dimanche de votations! Et excusez du peu lorsque ce génie de l'invention, drôle, porteur d’espoir, positif, est remarqué au passage par un célèbre informaticien et lanceur d’alerte américain… Celui-ci dit sur Twitter sa «fierté de la #Suisse, là où la démocratie a infligé une défaite à la xénophobie», tout en comparant l’usage du mouton dans les deux campagnes sur l’initiative dite «de mise en œuvre»:
Proud of #Switzerland, whose direct democracy defeated xenophobia. Left: Campaign from my time there. Right: Today. pic.twitter.com/uR1HdEjQu3
— Edward Snowden (@Snowden) 28 février 2016
Pulsation humoristique
On le dit et on le répète depuis plus de vingt-quatre heures: avec un cinglant «non» à l’UDC, le rationnel l’a cette fois-ci emporté, politiquement parlant, sur l’émotionnel. Mais dans le cœur de cette «société civile» dont on avait presque oublié l’existence et dont tous les éditorialistes saluent le «réveil», il y a aussi cette formidable pulsation humoristique, légère, qui s’est manifestée contre le mouton blanc «scrogneugneu» qu’on avait l’habitude de voir taclant son collègue de couleur.
La Suisse dit non au référendum xénophobe : les moutons sont heureux #happysheeps https://t.co/YPQ7uNr52d pic.twitter.com/SdVyg8ND5o
— pierre haski (@pierrehaski) 28 février 2016
#happysheeps La Suisse dit non au référendum sur l'expulsion des criminels étrangers... et fête ça avec des moutons https://t.co/1DynNzaTLZ
— francetv info (@francetvinfo) 28 février 2016
Du coup, l’ovidé a changé de camp, à la faveur notamment du hashtag #happysheeps, parti avec tellement d’enthousiasme du Temps que lesdites bestioles ont hérité d’un «s» de trop. @CTaramarcaz le fait d’ailleurs aimablement remarquer en twittant «Grammaire: après l’échec de l’initiative UDC, le hashtag #HappySheeps apparaît. N’oubliez pas que «sheep» est invariable!» Mais peu importe, puisque la sauce a pris et que même le cofondateur de Rue89 a été séduit, tout comme France Télévisions (ci-dessus) et bien d’autres acteurs connus et reconnus de la twittosphère romande:
Ma fille (6 ans) m’amène à l’instant son #HappySheeps à réparer :) #Momentum (et pourtant épargnée par la campagne) pic.twitter.com/LcF604qBEo
— Marc M (@Munsterma) 28 février 2016
#chvote #happysheeps pic.twitter.com/qwSpvkvBNq
— raph (@bonpourtonpoil) 28 février 2016
«Dessine-moi un mouton»
Bref, sur Twitter, on a bêlé de bonheur «dès les premières tendances qui annonçaient perdant le projet» de l’UDC, avec quelques exquises railleries sur le thème saint-exupéryen du «Dessine-moi un mouton». Le Matin en propose une jolie sélection, en 17 images, sur son site internet. Où l’on voit que tout cela est fait avec tellement de conviction et de jouissance partagée que même Le Huffington Post en a parlé. De même que L’Alsace, laquelle écrit que «de Genève à Zurich, des photos de moutons blancs KO ont fleuri hier […]. Pas «d’ovinophobie» là-dedans pourtant», avant que le quotidien de Mulhouse n’explique le détournement du symbole.
Un internaute de L’Obs juge qu’on a là «un résultat qui évitera» à d’autres comédiens – suivez son regard: Cohn-Bendit – «d’appeler à l’exclusion de la Suisse du concert des nations» et que «la démocratie réelle par consultation référendaire peut trouver grâce aux yeux des contempteurs habituels du pays de Guillaume Tell». Ce dont ne se sont pas privés plusieurs citoyens avant même l'échéance du 28 février:
Lire aussi: La vidéo de Camille contre la testostérone de l’UDC (LT.ch du 22.02.2016)
Mais maintenant, poursuit ce lecteur, «aussi sûrement que d’autres votations […] enverront des messages moins accueillants envers l’immigration de masse, les condamnations et les anathèmes proférés par ces spécialistes de l’accueil par et chez les autres reviendront, en masse eux aussi…» Commentaire qui résonne avec cet autre constat: «L’UDC a perdu son pari, eh oui, mais au moins les Suisses peuvent s’exprimer. Et de toute façon l’avenir va aller dans le sens de l’UDC, pas dans celui des bonnes âmes gauchistes au romantisme migratoire bien connu. […] On va laisser la situation migratoire ainsi, et on en reparle dans quelques mois, ok? La Suisse n’a pas besoin de ce référendum pour se protéger, elle le fait déjà suffisamment. Et l’avenir va lui donner raison.»
Quant au toujours comique Pascal Bernheim, il a tenté, lui, le croisement – acrobatique mais très réussi – avec la votation sur le deuxième tube au Gothard (et peut-être même avec la fiscalité des époux), en proposant ce somptueux Guillaume Tell qui se prend pour Astérix avec son troupeau de moutons guidés dans le nouveau tunnel:
#ZeNiouzes • #ÉDITIONSPÉCIALE • 28 février 2016 • #Suisse #votation #CHvote #happysheeps #TaGueule pic.twitter.com/0cnIcHXF6B
— Pascal Bernheim (@pascalbernheim) 28 février 2016
A partir de quoi, écrit un troisième internaute français, «il y a juste à dire que les Suisses ont fait le bon choix. Point barre.» Parce que personne n’a oublié qu’ils s’étaient déjà exprimés sur la question il y a quelques années et avaient alors dit oui. Et que la votation de ce week-end, c’était juste «pour étendre» les expulsions d’étrangers «à des délits mineurs (délits routiers etc...) C’est sans importance et c’est pour ça que les Suisses ont voté non… Sinon, dans le principe ils sont pour et l’appliquent. Rien de plus normal…»