Le pape François a rendu public vendredi un texte très attendu sur la famille dans lequel il tend la main aux personnes «en situation irrégulière» dans l'Eglise catholique, dont les nombreux divorcés remariés, mais qui décevra les homosexuels. La conférence de presse était retransmise à la mi-journée en direct sur Radio Vatican

Le pape répond ainsi en partie aux attentes de ces divorcés remariés civilement, en appelant à leur intégration dans l'Eglise, sans toutefois toucher à la doctrine. Dans le même esprit, il reconnaît une valeur à certaines unions libres, mais uniquement celles entre un homme et une femme, et fondées sur la stabilité.

Cette «Exhortation apostolique post-synodale Amoris laetitia du Saint-père François aux évèques, aux prêtres et aux diacres, aux personnes consacrées, aux époux chrétiens et à tous les fidèles laïcs sur l'amour dans la famille sur la famille et le mariage», son nom complet, était très attendue, après deux synodes (assemblées d'évêques) qui avaient en 2014 et 2015 illustré les profondes divisions de l'Eglise sur sa réponse aux évolutions sociétales.

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Document. Le texte en français

La miséricorde au cas par cas

L'esprit de «miséricorde» prôné par Jorge Bergoglio est bien résumé par une phrase clé de ce texte de quelque 260 pages: «Je comprends ceux qui préfèrent une pastorale plus rigide qui ne prête à aucune confusion», mais, ajoute-t-il, l'église «doit être une mère (...) qui ne renonce pas au bien possible même si elle court le risque de se salir avec la boue de la route».

L'exhortation insiste beaucoup sur le fait que les personnes en situation irrégulière «ne sont pas excommuniées» ni «exclues de la grâce divine». 

Sur la communion, un texte ambigu 

Le pape n'annonce pas pour autant un changement de doctrine qui impliquerait que certains divorcés remariés pourraient dès demain prendre pleinement part aux sacrements (confession et communion). Mais ils sont encouragés à participer activement à la vie de la communauté (liturgies, etc) et à trouver l'aide d'un prêtre pour se réintégrer. 

Les conservateurs dans l'Eglise se réjouiront que le pape argentin ne se prononce pas dans ce texte pour l'accès à la communion. Mais François reste ambigu et semble laisser ouverte la porte à des évolutions, avec le temps.

«C’est vraiment une ouverture, il s’agit vraiment d’une possible réintégration même s’il ne parle pas ouvertement de réintégration aux sacrements"» a réagi l'association française «Chrétiens Divorcés Chemins d'Espérance».

Les homosexuels toujours à la porte de l'Eglise

La question de la place des homosexuels au sein de l'Eglise, qui avait été soulevée énergiquement par quelques évêques occidentaux, s'est en revanche heurtée à un tir de barrage des prélats du Sud. 

L'exhortation apostolique reste timorée à cet égard: l'exigence du «respect» à l'égard des gays est rappelé mais les parents sont pris en pitié, et un accent très fort est mis sur la conviction qu'une union gay ne peut absolument pas être considérée comme un mariage.

A contrario, le pape valorise dans «Amoris Laetitia» les mariages civils, mais aussi les unions libres que vivent de nombreux jeunes, «signes d'amour», «quand l'union atteint une stabilité consistante». Il veut accompagner ces couples vers le sacrement du mariage. 

Le festin de Babette

Le texte porte le style du pape François: un hymne à la famille traditionnelle dans un langage simple, concret, parfois poétique, citant des poètes et même son film culte, le Festin de Babette de Gabriel Axel. 

Il contient un appel constant à accueillir dans l'Eglise toutes les personnes --parents, enfants, grands-parents, et familles, blessées par la vie ou par une relation difficile. Le texte est aussi un manuel de vie pour les couples, les fiancés, la préparation au mariage, les familles au quotidien, le rythme travail-repos, évoquant longuement par exemple et pour la première fois la nécessité d'une éducation sexuelle.

L'accent est aussi mis sur les «imperfections» de la famille, et le pape a voulu un texte qui ait «les pieds sur terre», refusant une vision «tout blanc tout noir».

Le texte, envoyé à chacun des 4.700 évêques, aborde aussi beaucoup de thèmes qui touchent les familles du Sud, comme les mariages arrangés et la polygamie. Ou encore les familles divisées par les migrations, les mariages interreligieux, les abus sexuels dans les familles, les mutilations sexuelles, la violence contre les femmes.alogies, même lointaines, entre les unions homosexuelles et le dessein de Dieu sur le mariage et la famille».