La PNL excelle (toujours) dans l’art de se réinventer
Psychologie
AbonnéLancée en 1970, la programmation neurolinguistique permet d’inscrire en soi de nouvelles manières de penser, de sentir et d’agir. Un ouvrage récent fait le point sur cette thérapie

«Il n’est jamais trop tard pour avoir une enfance heureuse.» Avec cette phrase du psychiatre Ben Furman, Nicolas Beffort résume parfaitement la philosophie de la Programmation neurolinguistique (PNL): on ne peut pas changer son passé, mais on peut changer sa manière de le considérer. Et surtout, on peut agir efficacement pour s’aménager un présent équilibré, débarrassé des ombres anciennes.
C’est que, poursuit l’auteur de Tout sur la PNL, un ouvrage qui vient de sortir aux Editions de L’homme, «il n’y a pas de réalité, il n’y a que des perceptions de la réalité.» On s’en rend compte, notamment, lorsqu’on vit un épisode marquant avec des amis et que chacun le restitue à sa manière.
Des savants dans le vent
Partant de ce constat d’«expérience subjective», le psychothérapeute Richard Bandler, le linguiste John Grinder et Frank Pucelik, un spécialiste de la Gestalt-thérapie (une approche axée sur les interactions avec l’environnement) imaginent au début des années 1970 une «modélisation de comportements et de stratégies d’excellence» pour que chaque personne puisse «aller vers le meilleur».
En mobilisant conscient et inconscient et en inscrivant profondément dans son corps et son mental des schémas vertueux, le sujet améliore ses comportements quotidiens (bien manger, bien dormir, gérer le stress, etc.), la gestion de ses émotions ou encore sa manière d’interagir avec autrui, assurent les savants dans le vent, tous jeunes et reliés à l’université américaine de Santa Cruz. La PNL était née.
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Axée sur les solutions
Comment ça marche? C’est assez simple et ludique, car les fondateurs de cette thérapie brève ont toujours veillé à élaborer des protocoles «créatifs et interactifs» pour que chacun puisse s’approprier ces méthodes sans être intimidé.
«Alors que la psychologie occidentale s’est construite sur les dysfonctionnements humains, donc sur des problèmes souvent complexes, la PNL observe comment fonctionne un individu heureux puis modélise ces comportements optimaux. Elle s’intéresse donc aux solutions», s’enthousiasme Nicolas Beffort, lui-même enseignant de PNL.
Objectif S.M.A.R.T
Première étape du protocole: la personne formule un objectif. Lequel doit être S.M.A.R.T pour spécifique, mesurable, atteignable, réaliste et fixé dans le temps. C’est bien de vouloir «être heureux», c’est mieux de «souhaiter réussir un examen le lendemain». «Il est également important que la réussite ne dépende que de soi et non des circonstances ou des personnes extérieures», prévient l’auteur, qui ajoute: «Comme les représentations mentales sont déterminantes en PNL, on préfère la formulation positive (j’aimerais être plus légère) à la formulation négative (j’aimerais me sentir moins lourde).»
Une fois l’objectif fixé, il s’agit d’ancrer en soi les conditions de sa réussite. Et ce protocole passe par tous les sens, d’où un nouvel acronyme à consonance suédoise, cette fois: V.A.K.O.G pour visuel, auditif, kinesthésique, olfactif et gustatif. Car, même si le langage est important comme on vient de le voir plus haut, seuls 7% de notre communication passent par le verbal alors que 93% relèvent du non-verbal. La même étude précise que, sur ces 93% de non-verbal, 38% sont constitués par des données autour de la voix, son ton, son timbre, sa vitesse et son volume, tandis que 55% reposent sur des données physiques du sujet, ses mouvements, tensions, respirations, les couleurs et l’humidité de sa peau, etc.
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Le geste du bonheur
En matière de communication, le corps parle donc beaucoup plus que les mots. Voilà pourquoi la PNL mobilise tous les sens lorsqu’il s’agit de se créer des ancrages positifs. Avec quelles techniques? Il y en a beaucoup et leurs appellations (Tote, swish, double dissociation, etc.) font parfois penser à des jeux vidéo.
Le jeu est d’ailleurs au cœur de ces transformations. C’est le cas, par exemple, du «Cercle de ressources», une des techniques présentées en détail. Pour ce protocole, le sujet imagine une situation où il s’est senti parfaitement bien. Il se place debout, se remémore la scène en en ravivant les sons, couleurs et odeurs qui s’y rapportent. Lorsqu’il atteint le plein souvenir de ce moment privilégié, il choisit un geste qui fixe cet état de bien-être dans son corps. Ça peut être presser le pouce contre l’index, mettre la main sur le ventre, se croiser les mains, peu importe. En répétant la manœuvre plusieurs fois, le geste encode le bonheur ressenti et le délivrera sur commande en cas de besoin.
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Le cercle de ressources
Mais ce n’est pas tout. Dans ce protocole, le sujet imagine ensuite un cercle au sol. Dans lequel il entre habité par l’état de bien-être énoncé plus haut et en y ajoutant le geste de réconfort. Là aussi, la manœuvre est répétée plusieurs fois en maximalisant les ressentis. L’idée? Faire de ce cercle un tremplin ou un bouclier.
Soit le sujet vise un objectif et, se plaçant dans le cercle de ressources, il rend cet objectif plus facile d’accès. Soit le sujet est parasité par une situation toxique qu’il va relativiser en entrant dans ce lieu chargé de bonnes ondes. Bien sûr, de physique, la manœuvre devient mentale au fil du temps et, à force d’exercice, le sujet n’a plus besoin de se déplacer vraiment.
Le protocole des tableaux
La méthode vous paraît un peu perchée? Pourtant le principe de la visualisation et des ancrages fonctionne. Parmi tous les protocoles proposés dans cet ouvrage, j’ai testé celui des tableaux et j’ai été assez bluffée.
L’idée? Visualiser une action que l’on aime – la danse, pour moi –, et réaliser un tableau mental de cette activité avec, là encore, les couleurs, les sons et les sensations y relatives. Ensuite, visualiser une tâche ingrate – faire les courses, par exemple – et réaliser là aussi un tableau sensoriel de la corvée. Pour modifier sa perception du moment ingrat, la PNL préconise de placer mentalement le tableau de la danse derrière le tableau des courses, de faire un trou dans le premier et de le laisser s’imprégner des bonnes vibrations du second, donc de la danse. Contre toute attente, la contamination positive a fonctionné et, au bout d’un moment, la corvée des courses s’est parée d’une ambiance festive…
Attention à la manipulation!
Le phénomène fonctionne sans doute parce que le cerveau est un organe souple et bien disposé à tous les jeux, toutes les suggestions. D’ailleurs, reconnaît Nicolas Beffort, la PNL est parfois utilisée par des gourous qui associent des messages spirituels à ces protocoles. «C’est un abus condamnable, car la PNL est un instrument de libération et de réinvention, certainement pas d’aliénation.»
En revanche, le spécialiste voit beaucoup de connexions possibles entre cette thérapie brève âgée de 50 ans, «mais qui n’a jamais cessé d’évoluer», et des découvertes contemporaines. «De tout temps, la PNL a été ouverte à d’autres disciplines comme la philosophie, l’anthropologie, la cybernétique, informe le formateur. Aujourd’hui, elle continue à s’enrichir des découvertes venant de la médecine, de la biologie, de la physique ou des neurosciences. Encore une fois, la PNL est une approche inventive et ludique, qui exige du sujet beaucoup de créativité et d’engagement. C’est tout sauf un endoctrinement.»