EDITORIAL
EDITORIAL. Sans paniquer, il s’agit de prendre soin les uns des autres… en restant à distance. Alors que plusieurs voisins européens décrètent l’état d’urgence, les autorités suisses doivent prendre leurs responsabilités et agir non pas en ordre dispersé, canton par canton, mais de façon coordonnée

En Suisse, les élèves de l’enseignement obligatoire et post-obligatoire, les étudiants, les apprentis et les enseignants resteront à la maison dès lundi et jusqu’à mi- (voire fin) avril. C’est une mesure radicale qu’a prise le Conseil fédéral vendredi, une mesure inédite depuis la pandémie de grippe espagnole en 1918. Et ce n’est pourtant pas assez.
Une semaine après la Lombardie, des dispositions plus drastiques encore ont été prises chez plusieurs de nos voisins européens. La France ferme boutique. L’Espagne se barricade. Dans le souci de contenir la propagation du Covid-19, les gouvernements imposent la fermeture des bars, des restaurants et autres établissements dits «non essentiels». C’est le «social distancing» poussé à l’extrême, le début des villes mortes, des scènes de rue fantomatiques. Juste à côté de chez nous. Certains cantons suisses ont commencé à prendre des mesures similaires, comme le Tessin, Bâle-Campagne, le Jura et et les Grisons, qui imposent la fermeture des magasins non-alimentaires, à l'exception des pharmacies et stations-service.
La vitesse de propagation magistrale du coronavirus dans le monde entier exige de réévaluer la situation chaque jour. Pas chaque quinzaine ni chaque semaine, mais bien chaque jour. Si cette pandémie doit, déjà, nous avoir enseigné quelque chose, c’est que l’unique façon de la contenir est l’anticipation.
Ce n’est pas une intuition parfaitement arbitraire, c’est mathématique, comme nous le rappellent de nombreux scientifiques de haut vol, qui mettent aujourd’hui la pression sur les autorités, partout sur la planète, pour en faire plus. Comme l’épidémiologiste Marcel Salathé ou l’infectiologue Jacques Fellay, en Suisse, qui militent pour le dépistage systématique et des mesures de quarantaine strictes. Mais aussi le Dr Michael J. Ryan, directeur du programme d’urgence sanitaire de l’Organisation mondiale de la santé, dont le message est limpide: «Dans le domaine de la gestion de crise, la perfection est l’ennemie du bien. Soyez rapide. N’ayez aucun regret.»
"Be fast, have no regrets."
— Sky News (@SkyNews) March 13, 2020
Dr Michael J Ryan says "the greatest error is not to move" and "speed trumps perfection" when it comes to dealing with an outbreak such as #coronavirus.
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Alors que certains groupes, en particulier les adolescents et les jeunes adultes, mais aussi certains aînés téméraires, semblent ne pas encore avoir pris la mesure du problème, peuplent les terrasses en Suisse romande et poursuivent les interactions sociales jusqu’aux embrassades, les autorités suisses doivent aujourd’hui prendre leurs responsabilités et agir, non pas en ordre dispersé, canton par canton, mais de façon coordonnée, tel que le permet la loi sur les épidémies, et décréter une quarantaine quasi totale.
Il y eut le temps de l’insouciance, voire de l’indifférence, lorsque le virus était, croyait-on, contenu dans des contrées lointaines. Il y eut ensuite quelques frissons sur nos échines, à mesure que l’épidémie flirtait avec nos frontières. C’est aujourd’hui le temps de l’extrême prudence. Restez chez vous autant que possible. Privilégiez le télétravail! Evitez les dîners entre amis et les rassemblements durant quelques semaines. Sans panique, mais surtout sans déni, il s’agit de prendre soin les uns des autres… en restant à distance.