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Comment, en 2014, on a raté l’occasion de sauver le monde

Et si la course à la croissance économique allait détruire notre civilisation? Dans le livre «Sacrée croissance!», réédité en mai, la journaliste française Marie-Monique Robin imagine un futur respectueux de notre planète.

L’uchronie de Marie-Monique Robin montre parfaitement comment le rapport du GIEC de 2014 a été ignoré. — © 123RF
L’uchronie de Marie-Monique Robin montre parfaitement comment le rapport du GIEC de 2014 a été ignoré. — © 123RF

Nous sommes en 2034. Les bus roulent au biodiesel de noisette, des trains solaires traversent les champs de carottes bios et chaque citoyen possède un «quota de kilomètres aériens». Dans toute la France, des campagnes nationales sont lancées pour «désintoxiquer» les citoyens de «la grande idéologie», celle de la croissance et de la consommation. «L’addiction» au PIB est révolue.

Une belle utopie? Dans Sacrée croissance!, réédité le mois dernier avec une préface inédite de Gaël Giraud chef économiste de l'Agence française de développement, Marie-Monique Robin y propose un scénario plausible. Ce qui aurait pu se produire si, le 14 avril 2014, François Hollande, Barack Obama et l’ONU avaient pris au sérieux le rapport du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC). Dans ce récit fictif, la journaliste interroge réellement les plus grands théoriciens de l’économie écologique et sociale pour proposer aux lecteurs des solutions constructives.

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Comment la théorie néoclassique, celle qui prône la croissance et la consommation, s’est-elle imposée dans le monde? Qu’est-ce que la croissance? Est-elle compatible avec notre bien-être et celle de la planète? Parfaitement documenté, Sacrée croissance! fournit études et rapports pour mener à bien une remise en question de notre modèle économique. Cette «uchronie prospective», mêlant fiction et interviews réelles, nous plonge dans un futur proche, et pourtant diablement loin de nos modes de fonctionnement actuels.

La fin d’un système

Le 14 avril 2014, point de bascule du livre. Le GIEC publie un rapport alarmant de plus de 20 000 études. Les 80 scientifiques et contributeurs de ce rapport prévoyaient un réchauffement de la planète de 4,8° d’ici à 2100. A cette température, «la survie de l’espèce humaine est en jeu», avertit Gaël Giraud de l'AFD. Les conséquences sont effrayantes: «Multiplication des réfugiés climatiques, pandémies favorisées par le réchauffement, destruction des littoraux à cause de la montée du niveau des mers, disparition des poissons de nos océans acidifiés», ajoute Gaël Giraud dans sa préface renversante.

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«Mais est-il trop tard?» A l’époque du GIEC, Marie-Monique Robin ose poser cette question terrifiante. Entre pessimisme et espoir, les experts assurent qu’il est encore temps d’agir. Dans le futur imaginé par l’auteure, politiques, scientifiques et citoyens se seraient emparés du rapport du GIEC pour stopper l’effondrement de notre civilisation. Dans la réalité, ce rapport est resté lettre morte.

«Développement durable», «krach boursier», «spéculation financière»: que signifient vraiment ces mots? Dans le livre, les historiens de 2034 surnomment notre période celle du «Grand Déni», car nous nous entêtons à ignorer la catastrophe prédite par le rapport du GIEC. Ce livre donne des réponses aux questions que l’on ne se pose plus. Il presse les politiques et les citoyens d'agir, maintenant. En espérant que l’on puisse encore changer le cours des choses.

Marie-Monique Robin, Sacrée croissance!, éditions La Découverte, 343 p.