Chaque jour de l’été, sans prétention, «Le Temps» déguste un mot de la langue française.
Sélénites, troglodytes lunaires
L’homme retournera donc sur la Lune. En 2020, selon l’échéancier de la NASA, soit 38 ans après le dernier alunissage, celui d’Apollo 17, en 1972. Les stratèges ont désormais en tête de s’implanter durablement sur notre unique satellite, qui deviendrait rampe de lancement pour des voyages plus lointains.
Y séjourner davantage que les quelques heures de chaque mission Apollo permettra peut-être aux futurs astronautes de rencontrer, enfin, ces diables de Sélénites. Les habitants supposés de la Lune. Ce mot souriant remonte au grec «selênê», lequel désigne l’astre nocturne. On peut parler du sol sélène, ou de la géologie sélénite. Les deux formulations sont attestées. Et l’imagination débridée des écrivains, depuis Lucien de Samosate au IIe siècle, n’aura eu besoin que d’ajouter une majuscule pour faire de «Sélénite», ou «Sélénien», le substantif décrivant un Lunien moyen. Dont on ne sait encore rien; au mieux, on présume. Selon H.G. Wells, avec son roman Les Premiers Hommes dans la Lune (1901), les Sélénites ont un air de troglodytes fort éloignés de l’Empire britannique, vivant dans leurs cavernes souterraines. Hypothèse astucieuse, puisqu’elle explique pourquoi on n’a jamais vu les traces des indigènes en observant la Lune. Dans les films de Méliès, les résidents ressemblent plutôt à une troupe du Moulin Rouge en colonie de vacances. Vivement 2020, que soit percé le mystère des Sélénites… Nicolas Dufour