Comme «Le Temps», elles sont nées le 18 mars 1998
«Le Temps», 25 ans
«LE TEMPS», 25 ANS. Fanny Lambiel et Sara Radman ont la même date de naissance que «Le Temps». Pour l'occasion, elles racontent leur parcours et leur rapport à l'information et aux médias

Fanny travaille à Londres, Sara à Zurich. Elles ne se connaissent pas, n’ont ni étudié, ni «gardé les vaches» ensemble – selon l’expression consacrée de leur Valais natal. Pourtant, les deux jeunes femmes sont unies par une date: le 18 mars 1998. Ce mercredi-là, pendant qu’elles étaient occupées à pousser leur premier cri, la Suisse assistait à une autre naissance. Celle de ce «quotidien suisse édité à Genève» au logo lie-de-vin et au nom court qui en dit long, Le Temps. Comme lui, les deux jeunes femmes soufflent 25 bougies ce samedi. Elles se racontent pour l’occasion.
Ce 18 mars 1998, Fanny Lambiel a vu le jour à Sion. Fille du soleil et d’un papa vigneron, elle grandit parmi les grappes du Domaine du Mont d'Or, coin de pays féerique surplombant les deux châteaux de la capitale. «Réaliste», la jeune femme qui rêvait d’une carrière dans le cinéma l’est devenue pour «se protéger de l’échec», dit-elle. Elle troque alors les tournages fantasmés pour le tourisme bien réel, boucle un bachelor en la matière à la HES-SO de Sierre en 2022, gagne les «Hunger Games du processus de sélection» de Suisse Tourisme et prend son envol professionnel à Londres. Une ville dans laquelle «quand tu sors, tu peux juste être toi-même». Depuis janvier, Fanny promeut la Suisse comme étant la destination à choisir pour le tourisme d’affaires aux entreprises du Royaume-Uni et d’Irlande. «C’est un super job, j’œuvre à représenter le pays du matin au soir, dans une sorte de bulle de suissitude à l’étranger», se réjouit-elle.
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S’informer, oui, mais sur les réseaux
Retour en 1998. A une cinquantaine de kilomètres de Fanny, Sara Radman ouvre les yeux à Naters, dans le Haut-Valais. Biberonnée au français par sa maman vaudoise et au croate par son père bosniaque, elle jongle entre les langues et les cours à l’Ecole de commerce de Brigue, quand elle ne lance pas son bâton de majorette au ciel, hobby roi de sa jeunesse. A 18 ans, elle trompe les montagnes avec le lac, le temps d’engloutir les polycopiés d’un bachelor HEC et d’un master en management à l’Université de Lausanne. Puis, depuis février, les portes du monde du travail lui sont ouvertes à Migros Industrie, à Zurich, où Sara effectue un stage dans les ressources humaines en parallèle de la fin de ses études. Si vous la cherchez, vous la trouverez probablement dans un train, voie de tous les possibles entre la Suisse alémanique, les bords du Léman et la plaine haut-valaisanne. «Je n’ai pas besoin d’être ancrée dans un seul lieu, partout où je vais, je suis chez moi.»
Fanny et Sara le disent, un peu gênées: elles ne lisent pas vraiment Le Temps… Voire pas du tout. Sara raconte avoir plutôt été proche des journaux régionaux valaisans dans son adolescence, et ne pas s’informer via les médias traditionnels. «Je vois les news importantes passer sur les réseaux et si l’une d’entre elles m’intéresse, je creuse en faisant des recherches d’articles.» De son côté, Fanny passe aussi par Instagram, TikTok et consorts pour se tenir au courant – où elle suit plusieurs comptes de médias, parfois présents uniquement en ligne. «Je passe beaucoup de temps à m’informer, sur la politique, le tourisme.» Elle lit donc quand même un peu du Temps via ses posts Instagram ou ses stories et considère le quotidien comme un titre «sérieux, avisé et de confiance». Reste qu’elle le dit sans détour: «Parmi mes amis, personne ne paie pour s’abonner à de la presse. Je ne feuillette jamais un journal.»
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25 ans, le temps de la liberté
Les deux jeunes femmes se montrent aussi critiques envers un titre de la presse gratuite suisse, dont elles jugent le contenu tantôt «banal», tantôt trop «négatif», quand Fanny n’y voit pas carrément «une poisse pour les jeunes, car les titres sont à tomber par terre, alors que le texte de l’article n’y correspond pas ou est creux». Alors, nous osons la question: que doit faire un média traditionnel âgé de 25 ans pour captiver les Suisses du même âge que lui? «Il faut du contenu catchy, court, et que ça ne coûte pas cher», pose Fanny, citant en exemple les vidéos d’un pure player suisse destiné aux jeunes. Et Sara d’assurer: «L’intérêt pour l’actualité est là, mais la façon de faire est importante.» Ce n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd.
Les deux Valaisannes fêtent donc leur 25e anniversaire ce samedi. Deux chiffres qui suscitent un petit «wow» chez Sara, consciente tout à coup qu’elle a vécu «un quart de siècle» et qu’une partie de la vingtaine est déjà derrière… mais qui «ne changent pas grand-chose» puisqu’elle est encore aux études et que ce sont plutôt elles qui guident son mode de vie. Pour Fanny, une sorte de tension est collée à cet âge qu’elle voit comme un tournant. Ou plutôt, que d’autres voient comme tel: «La société attend que nos vies suivent une timeline – couple, mariage, enfants, maison. A 25 ans, il ne faudrait pas se tromper dans ses choix. Cette idée d’ordre à suivre me fait paniquer, j’essaie de m’en détacher.» La liberté et l’autonomie seront ses combats. Tandis que Sara assure ne pas sentir de pression: «Les jeunes aujourd’hui sont libres de choisir ce qui est le mieux pour eux.» Fanny Lambiel et Sara Radman ont la vie – et le temps – devant elles. Comme ce quotidien au logo lie-de-vin et au nom court qui en dit long.