Imaginez une île peuplée de pélicans, offrant des kilomètres de plages blanches frangées d’eaux transparentes, où la nourriture se compose de fruits exotiques, de poissons, de poulpes, de calamars et de langoustes, où les chaussures sont accessoires puisque les ruelles sont en sable et sans voitures… Ce paradis, on l’a trouvé à Holbox (dites «Holbosh», le x en langue maya se prononçant ainsi), une île entre le golfe du Mexique et la mer des Caraïbes, d’une surface d’à peine plus de 56 km2, à une vingtaine de minutes en bateau des côtes.

On a hésité à parler de cet éden tant l’endroit a éveillé en nous un instinct protectionniste. Une bien vaine tentative de tenir secret un lieu voué à être découvert par le plus grand nombre, au risque d’y perdre son attrait particulier. Car la région du Yucatán fait partie des plus visitées du Mexique et prête depuis longtemps ses décors de carte postale aux catalogues des agences de voyages, offrant aux professionnels de quoi satisfaire une clientèle aux désirs variés.

Pour les amateurs de plages fermées par des barres d’hôtels et bondées de touristes munis de leur bracelet «all inclusive», Cancún et Playa del Carmen font partie des canons du genre. Deux destinations prisées par les étudiants américains durant Spring Break, cette semaine de congé entre l’hiver et le printemps durant laquelle les jeunes se lâchent, perdant au passage quelques neurones et, bien souvent aussi, leur virginité…

Voir Holbox et mourir

Fort heureusement, la péninsule a bien plus à offrir que des migraines carabinées. Pour ceux qui se piquent d’histoire et de civilisations, la jungle regorge de ruines précolombiennes. Aux hipsters de tout poil qui apprécient une cabane les pieds dans l’eau – à condition que se trouvent à proximité des concepts stores façon Colette et des restaurants à la déco ultracontemporaine – direction Tulum, cette station trendy où tout le monde est beau, parle anglais avec l’accent américain et où les prix affichés (en dollars) égalent quasiment ceux pratiqués en Suisse… Pour ceux qui privilégient une halte urbaine, Mérida – la capitale du Yucatán – offre une escale de choix. Il fait bon vivre à l’ombre des nombreux palmiers de cette ville au style colonial. Et enfin, pour tous ceux qui rêvent d’un petit coin de paradis où lire un livre, faire la sieste et plonger dans les eaux turquoise, direction Holbox.

 

Pour rejoindre ce petit paradis depuis Cancún, il suffit de prendre un taxi jusqu’à Chiquila (entre deux heures et demie et trois heures de trajet), le port d’où partent les bateaux pour gagner en une vingtaine de minutes la Isla Holbox. Comme il est interdit d’entrer en voiture sur l’île, la location d’un véhicule se révèle inutile. Accueillante et décontractée, Holbox l’est à plus d’un titre. L’île, de 30 kilomètres de long pour maximum 2 de large, se situe au cœur des 1541 km2 de la réserve protégée de Yum Balam et abrite plus de 150 espèces d’oiseaux (pélicans, hérons, ibis, flamants…). Même le requin-baleine, qui peuple les eaux alentour et attire de nombreux amateurs de plongée, est du genre père tranquille.

Mérida, en capitale

Retour sur terre. Après Holbox, la prochaine halte choisie est Merida capitale culturelle de la péninsule. L’ancienne cité maya est, depuis la conquête espagnole, profondément ancrée dans l’histoire – et l’architecture – coloniale avec ses rues étroites, ses vastes places et ses façades élégantes et colorées. Depuis le port de Chiquila, on atteint la ville par la route en un peu plus de trois heures. C’est en fin d’après-midi que les rues et terrasses s’animent jusque très tard dans la nuit. 
Ne pas oublier la visite de la cathédrale de San Ildefonso qui ferme ses portes quotidiennement à 19h. Edifiée entre 1561 et 1598 sur un ancien site maya, l’église a été bâtie avec une partie des pierres du temple qui recevait autrefois les fidèles d’une tout autre obédience…

Moins touristique que le reste de la région, Mérida attire les visiteurs en quête d’endroits typiques et les Mexicains qui fuient l’insécurité grandissante de Mexico City. Revers de la médaille: les prix grimpent (dixit notre logeuse), mais restent abordables pour les budgets helvétiques.

Le Yucatán regorge de ruines… Les amateurs n’ont que l’embarras du choix. Mais attention, il peut faire très chaud sur les sites, 45 degrés lors de notre visite à Chichén Itzá, donc il faut prévoir des litres d’eau pour s’hydrater et de quoi se protéger du soleil.

S’il ne fallait en visiter qu’un, ce serait celui de Chichén Itzá, situé à proximité de la ville de Pisté, sur la route reliant Mérida à Tulum. Une halte indispensable, classée au patrimoine mondial de l’Unesco et qui fait partie des sept nouvelles merveilles du monde choisies par la New seven wonders foundation en juillet 2007.

Le principal centre religieux du Yucatán

Ancienne ville maya, Chichén Itzá fut très certainement le principal centre religieux du Yucatán au Xe siècle. Présents sur le site, deux puits naturels (appelés aussi cénotes) apportaient aux Mayas une source d’eau dans cette région qui en manque cruellement. On estime qu’à son apogée, la cité couvrait une superficie de 30 km2 et abritait une population de 90 000 âmes. Aujourd’hui, elle n’est plus aussi vaste mais comprend de nombreux édifices dont la fameuse pyramide de Kukulcán (El Castillo) aux abords de laquelle adviennent certaines étranges mutations. Ainsi, les applaudissements se muent en un son similaire au battement des ailes du quetzal et des jeux d’ombres lors des équinoxes et du solstice d’été reproduisent sur l’édifice l’ondulation d’un serpent descendant les marches de l’escalier nord…

Une autre attraction de la péninsule du Yucatán: les nombreuses cénotes, ces piscines naturelles situées dans les terres. Elles représentent aujourd’hui un business touristique comme un autre, ce qui tend à en abîmer les charmes… En effet, les abords de la Gran Cenote, qui selon de nombreux guides fait partie des plus belles, tiennent plus du chantier inachevé que du sentier humide sous la canopée…

Tulum, glocal taste

De façon totalement subjective, on peut dire que Tulum n’est ni l’enfer sur terre comme Cancún ni tout à fait un paradis comme Holbox… La station se compose d’un pueblo qui n’a rien de charmant, d’un site maya qui vaut le détour malgré son entrée façon parc d’attractions et d’une rue d’une vingtaine de kilomètres entre mer et jungle – la zone hotelera – qui mène jusqu’à la réserve grouillante de Sian Ka’an, où vivent notamment des crabes géants, des guépards, des reptiles et des (gros) insectes en tout genre. C’est les pieds dans l’eau qu’il faut se loger, là où, c’est indéniable, tout est sublime: les plages blanches et turquoise, les restaurants et les boutiques à la décoration faite pour les pages en papier glacé des magazines.

Mais pour être tout à fait honnête, malgré la beauté des adresses et la qualité des produits à consommer, on a plus l’impression de se trouver dans un quartier branché de New York ou Los Angeles (les dollars sont acceptés partout et on peut même en retirer dans les différents bancomat). Ce qui n’est pas déplaisant dans l’absolu mais pas non plus totalement dépaysant. Et puis les prix pratiqués sont particulièrement élevés pour le Mexique. Le concept de «glocal» – cette contraction de local et global – sied parfaitement à Tulum.

Le visiteur n’a que l’embarras du choix pour s’adonner au shopping, boire un verre, se sustenter ou se loger. A condition qu’il mette le prix (attention: dans la plupart des boutiques les prix sont affichés en dollars américains, ce qui réserve parfois une surprise en deux temps…). Pour manger, plusieurs adresses: la Posada Margherita, un restaurant italien dont les mets et l’ambiance, entre la cabane de plage et la maison familiale sur la côte Amalfitaine, sont excellents. Ne pas manquer les pâtes à l’encre de seiche et aux scampi.

Côté jungle, s’il ne faut en garder qu’un ce serait l’Acra. Ici, la cuisine fait usage des produits locaux et mêle les saveurs mexicaines et californiennes, le chef ayant fait ses écoles à San Francisco. Aperçu de la carte: salade de chayote, concombre, jicama (entre la patate et la pomme), quinoa et sa vinaigrette à la coriandre et au sésame; bébé poulpe, bacon, pois du Yucatán, kalé et piments jalapeños. Enfin, pour boire un verre et écouter de l’electro, la Casa Jaguar joue les clubs à ciel ouvert au milieu de la jungle. Dans une structure architecturale moderniste envahie de végétation luxuriante, on y croise les beautiful people de Tulum. Ambiance caliente-hot garantie.


Y aller

Vols de Genève à Cancún avec une escale, à partir de 800 francs environ (plusieurs compagnies possibles: Air France, Air Canada, United Airlines, KLM)

Y dormir

A Holbox: Xaloc resort, sur la plage, à 5 minutes à pied du centre, excellente adresse. Deux piscines, cuisine fraîche toute la journée (il faut absolument goûter à leurs ceviche de poulpe) et des massages mayas en supplément.

A Mérida: L’hôtel Mérida Santiago. Cette hacienda décorée avec goût possède un patio et une piscine profonde qui permet de se rafraîchir. Dotée de seulement 4 chambres, la maison est tenue par un couple néerlando-mexicain d’excellent conseil.

Y manger

A Holbox: On mange divinement bien partout sur l’île. Mais s’il faut choisir, on recommande la buvette de plage Raices dont la spécialité, le poisson à la noix de coco, a un sacré goût de reviens-y… Plus chic, le restaurant Las Palapas propose une carte de mets italiens à tester sans hésitation. La rucola mexicaine est particulièrement parfumée et le vin mexicain à la carte plutôt bon. Si, si.

A Mérida: L’Apoala, sur la plaza Santa Lucia, dont la carte latino-mexicaine est particulièrement savoureuse. Pour prendre le petit-déjeuner ou boire une Sol, il faut se rendre dans l’arrière-cour du Café Montejo sur la Calle 59. Clientèle jeune, musique electro et ambiance festive jusque tard dans la nuit, peu importe le jour de la semaine.

A Tulum: L’Acra, pour la splendeur de sa déco boisée au milieu de la végétation, ses lumières tamisées qui rendent tout le monde beau, son meuble de bar vintage – une splendeur – et ses bons petits plats.