Mobilité
Plébiscitée pendant l’été et récemment adoubée lors des votations zurichoises et genevoises, la bicyclette aura bientôt son observatoire dédié à l’Université de Lausanne

«Ce n’est pas un objet si banal», nous dit d’une voix souriante Patrick Rérat, professeur de géographie et d’urbanisme à l’Université de Lausanne (Unil). Dans un mois sera lancé l’Observatoire du vélo et des mobilités actives, qu’il codirigera avec son collègue Bengt Kayser, également porteur du projet, médecin et directeur de l’Institut des sciences du sport.
La petite reine a le vent en poupe
Inscrit dans la Constitution en septembre 2018, le vélo n’en finit pas de tracer sa route. En démontre l’adoption de 50 km de voies cyclables à Zurich, approuvée par 70% de la population, ou l’accord donné à la suppression de 4000 places de stationnement en faveur de la mobilité douce au centre-ville genevois, signe que les cantons redéfinissent leurs «stratégies vélo». On en trouve désormais de toutes sortes: électrique, cargo ou en libre-service. Les bécanes qu’on utilise à la force des mollets ont chacune leur public. «La Suisse est un pays qui a du retard sur le nord de l’Europe mais on sent qu’il se passe des choses.» Un ajustement perceptible du côté de la Confédération, selon Patrick Rérat: «Les standards en termes d’infrastructures et d’aménagements sont revus à la hausse, ce qui va permettre un développement de la pratique.»
Un enjeu qui touche autant la santé que l’urbanisme
Deux roues, un cadre, un guidon et un pédalier, et pourtant. «Il questionne notre rapport au déplacement, notre façon d’imaginer notre environnement, c’est une porte d’entrée extraordinaire», décrit Patrick Rérat. L’Ouvema, acronyme de l'observatoire, aura pour but de rassembler les chercheurs de l’Université de Lausanne autour d’une structure commune favorisant les rencontres et les collaborations entre différents domaines de recherche.
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Des exemples d’institutions existent en Europe, comme l’Active Travel Academy de Londres ou l’Urban Cycling Institute d’Amsterdam, dont les moyens sont cependant «supérieurs», en raison de leur ancienneté, au projet lausannois. «On espère susciter l’intérêt de nos collègues travaillant par exemple sur la psychologie sociale, le tourisme ou les politiques publiques», évoque le futur codirecteur. Un organisme qui ne sera pas en concurrence avec les bureaux d’études: «On reste dans de la recherche fondamentale et de la recherche-action, en plus de l’enseignement universitaire.» Ce rassemblement en un observatoire permettra aussi une plus grande visibilité de l’institution.
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«Parfois un peu à leur insu»
Quatre axes constitueront le futur observatoire. Outre l’analyse de la pratique du vélo ou du profil des usagers, il visera également l’étude des politiques publiques de promotion et d’urbanisation. «L’originalité de notre projet est que nous incluons le domaine de la santé. Les médecins s’intéressent beaucoup aux mobilités actives car c’est un moyen d’introduire ou de réintroduire l’activité physique dans le quotidien des gens, parfois un peu à leur insu», précise Patrick Rérat. Une manière de questionner la sédentarité.
Le vélo ne sera pas le seul à occuper les chercheurs de l’observatoire. Parmi les autres mobilités actives étudiées, la marche et la trottinette auront leur place. «Ces modes de déplacement ont des enjeux communs. On peut penser à la transition énergétique, à la lutte contre la congestion ou encore à la sécurité.» Et la trottinette électrique? «Il y a un grand débat autour de cette question. On peut considérer ce moyen de transport comme passif, mais il permet apparemment de favoriser le gainage», sourit Patrick Rérat.
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