Le climat d'agitation permanente et de contestation qui entoure le personnage implique que chacun de ses nouveaux ouvrages est un événement. Dans le Parker illustré , richement doté en photographies et fort de plus de 800 pages, le critique américain présente les domaines et commente les vins qui sont, à ses yeux, les meilleurs au monde. On le suit en Allemagne, en Argentine, en Australie, en Autriche, en Espagne, aux Etats-Unis, en France, en Italie et au Portugal, mais le critique n'a pas retenu les vins suisses. On voyage dans l'histoire de 155 prestigieux domaines, on découvre l'analyse des millésimes récents et moins récents, on lit des informations sur la vinification et l'élevage des grands vins de ce monde. Bref, on apprend beaucoup de choses.
L'un des intérêts de cet ouvrage réside dans son introduction, dans laquelle Parker se risque à une «définition argumentée» de ce qui fait un grand vin. Comme c'est le cas pour une grande œuvre d'art, un grand vin «tend à faire l'unanimité», dit-il. «La dégustation est subjective, certes. Mais si personne ne peut vous pousser à adorer Picasso, Beethoven ou un Château Latour 1961, force est cependant de reconnaître qu'ils ont atteint un très haut degré de qualité.» Les grands vins sont issus de «vignobles situés dans des zones microclimatiques favorables à certains types de cépages», et «ils affichent une intensité et une profondeur liées à des pratiques culturales et viticoles qui privilégient les rendements faibles et les fruits bien mûrs». Ils ont à la fois la faculté de séduire les sens et de stimuler l'intellect. Ils se reconnaissent à leur bouquet complexe. Ils expriment des arômes et des saveurs sans lourdeur. Ils paraissent meilleurs à chaque gorgée. Ils se bonifient avec l'âge. Ils manifestent une personnalité spécifique.
Et le terroir? Il est important, mais il ne faut pas le surévaluer. Pour Parker, les choix de l'œnologue «forgent la personnalité d'un vin beaucoup plus sûrement que le terroir». Et de démonter un mythe, arguments à l'appui. Le critique s'en prend aussi au discours – très convenu depuis le caricatural documentaire Mondovino – de la globalisation et de l'uniformisation du vin. Et rappelle qu'il n'y a jamais eu autant de bons vins aux styles si diversifiés qu'aujourd'hui.
La moitié de ce livre est consacrée à la France. Et le tiers du chapitre sur l'Hexagone est occupé par la description des grands domaines et crus de Bordeaux, que le critique affectionne tout particulièrement. Dans son introduction à cette région, Parker justifie la place de Bordeaux par «le talent incommensurable des œnologues et des producteurs de cette région, et l'attachement sans faille des meilleurs châteaux à caracoler en tête du marché mondial». Il livre également dans ce chapitre ses commentaires de dégustation pour le millésime 2005, salué unanimement comme l'un des plus grands de l'histoire de Bordeaux.
On reprochera toutefois à cet ou-vrage certaines erreurs et des informations périmées. Deux exemples, glanés au hasard dans le chapitre sur l'Italie: Roccamonfina n'est pas une «région», mais une commune de Campanie, et la Tenuta dell'Ornellaia n'est plus la propriété de Constellation Brands (elle ne l'a d'ailleurs jamais été en totalité), mais de la famille Marchesi de'Frescobaldi.
Parker illustré des plus beaux vignobles de France et du monde, Editions Solar.