Les salons de l’auto? Un concept en voie de fossilisation. Les acteurs du monde automobile préfèrent désormais se donner rendez-vous dans des événements high-tech. Le bal d’ouverture qui se tient chaque année aux Etats-Unis en est la preuve: alors que le Salon de Detroit se meurt et va abandonner son rôle de premier salon de l’année pour se reprogrammer en été, le Consumer Electronics Show (CES) de Las Vegas prend, de plus en plus, une allure de Mecque incontournable. C’est là, désormais, que les constructeurs viennent présenter leurs nouveautés.

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Maintenir le cap

Et ces nouveautés ressemblent souvent plus à des boîtiers électroniques, caméras et autres gadgets super-technologiques qu’à des carrosseries rutilantes. Au grand show 2019 qui vient de fermer ses portes, ce sont ainsi les concepteurs de puces et de capteurs rendant la voiture du futur autonome qui ont fait le buzz. Non pas en promettant des prouesses encore plus folles, mais bien en déclarant que l’attentisme, ça suffit! Plus question de patienter pour montrer au public ce qu’ils sont capables de faire. Il est vrai que s’il faut attendre que tous les juristes et assureurs du monde se mettent d’accord, l’auto qui se pilote toute seule n’arrivera pas sur les routes avant plusieurs décennies.

Forts de ce constat, Intel et sa filiale Mobileye, spécialisée dans le domaine de la mobilité autonome, ont annoncé deux partenariats de choc. Le premier, avec Volkswagen, consistera à équiper les voitures de Wolfsburg avec le dernier cri de la cartographie intelligente que Mobileye a développée. Couplées au système d’assistance à la conduite déjà existant, ces cartes interactives permettront d’améliorer de façon significative la surveillance du cap. Du coup, même si le marquage au sol est manquant, ou recouvert par une couche de neige par exemple, la voiture saura toujours exactement où elle se trouve sur la chaussée et sera capable de maintenir sa trajectoire même si le conducteur est distrait.

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Garder ses distances

Le second, avec l’équipementier Valeo, l’un des principaux fournisseurs de la branche automobile, permettra de mettre en commun le savoir-faire des deux entreprises en matière d’algorithmes d’assistance à la conduite. Le «protocole de sécurité sensorio-responsable» de la filiale d’Intel sert à traduire en formules mathématiques les théories des ingénieurs en sécurité routière. Conçu pour être intégré au programme de conduite autonome à l’étude chez Mobileye, ledit protocole se concentre sur la notion de distance de sécurité en fonction de la vitesse. L’idée d’Intel est de dire que, bien que prévu pour être intégré à un concept de véhicule 100% autonome, ce produit permettrait déjà à l’heure actuelle d’éviter un grand nombre d’accidents s’il était installé dans des voitures pilotées par des humains.

«Allons-y! Déployons quelques-uns de ces systèmes dans le cadre des assistances à la conduite actuelles! C’est une sorte d’impératif moral: si nous pouvons sauver des vies dès aujourd’hui, il serait stupide d’attendre», a déclaré Jack Weast, vice-président de la division des standards de conduite autonome chez Mobileye et ingénieur en chef chez Intel. Concrètement, embarqué à bord d’une voiture, ce système permettrait, par exemple, de prévenir le conducteur qu’il arrive à trop grande vitesse derrière le véhicule qui le précède, ou dans une courbe. Une autre des technologies d’Intel, appelée REM (Road Experience Management), pourrait servir à suppléer les traditionnels capteurs, senseurs et caméras pour assurer le maintien de la bonne trajectoire.

Vision intrusive

Quoi qu’il en soit, chaque firme travaille pour l’instant avec ses propres outils. Cette association de Mobileye avec Valeo est aussi la preuve que l’industrie est réceptive à l’idée d’une standardisation. Un argument qui contribuerait grandement à accélérer le processus législatif nécessaire pour établir des conditions-cadres ouvrant la voie à une conduite réellement autonome.

Si Toyota pense que la voiture la plus sûre n’est ni une voiture 100% autonome ni une voiture conduite par un humain mais bien un mélange des deux et que le groupe développe des véhicules qui «laissent» l’homme conduire tout en veillant en sous-main et en l’avertissant des dangers voire en intervenant en cas de non-réaction, la vision de Mobileye est plus intrusive. Elle prendrait carrément en charge les bases de la conduite, laissant le pilote se contenter des tâches secondaires. «Si vous regardez les dispositifs de freinage automatique, par exemple, ils attendent une réaction du conducteur et, donc, ne s’activent qu’au tout dernier moment, souligne Jack Weast. C’est peut-être efficace pour éviter une collision, mais un coup de frein aussi brutal n’est pas une expérience agréable. Un véhicule automatisé ne ferait jamais ça. Il maintiendrait une distance de sécurité qui assurerait une distance de freinage suffisante. Notre système garantit la même sécurité à un engin conduite par un homme.»