Yonathan Parienti est le fondateuret directeur d’Horyou, un réseau social orienté vers l’action solidaire

Rencontre avec un ex-gestionnaire de fortune profondément humaniste

Rencontrer Yonathan Parienti, c’est balayer nombre de clichés sur l’entrepreneuriat, le monde de la finance et le monde associatif. Ce lundi matin, il nous accueille au cœur de Genève dans les bureaux d’Horyou, décontracté, souriant. Un personnage «christique», hors du commun dès le premier regard, entre directeur d’entreprise et baba cool: il porte une chemise blanche entrouverte, un pantalon gris et des baskets noir et orange. Sa barbe non taillée, ses longs cheveux roux bouclés et ses lunettes rondes à écailles lui donnent un petit air de John Lennon.

L’air oui, mais l’esprit? «Faisons un test: si on regarde les actualités du jour, presque tout est négatif.» Yonathan fait défiler les dernières news sur Google. «Terrorisme, violences… difficile de commencer sa journée avec le sourire quand on lit ça. Sur la plateforme Horyou, au contraire, les internautes partagent du positif, mettent en lumière les bonnes initiatives et les projets enthousiasmants du quotidien.»

Redonner confiance, c’est un des buts, car les horreurs, selon Yonathan, provoquent une peur générale. Yonathan Parienti semble faire partie de cette catégorie d’hommes rares qui ont une foi inébranlable en l’être humain. Il croit dur comme fer au vivre-ensemble et aux bonnes actions universelles. Depuis tout petit, il se sent «citoyen du monde»: de père tunisien et de mère corse, il voit la diversité comme une richesse à partager. Les étés passés dans l’île de Beauté, dans la bergerie de son grand-père, développent son amour de la nature et son envie de larges horizons. Né à Nice, il passe la suite de son enfance et son adolescence à Palaiseau, «petite ville sympathique en banlieue parisienne». Mais Yonathan trace sa route là où on ne l’attend pas: il entrera en école de commerce à Reims, pour s’ouvrir un maximum de portes et pour mieux comprendre comment fonctionne la société. Il sera gestionnaire de finance chez JP Morgan à Paris puis à Genève, avant de travailler pour Bank of China et enfin chez Julius Baer.

On pourrait s’attendre à voir Yonathan jeter aujourd’hui un regard amer sur ces années vécues au sein du monde de la finance, il n’en est rien. «J’ai rencontré en travaillant dans ces banques des gens exceptionnels qui ont été mes mentors. J’ai eu la chance de conseiller une myriade de clients qui m’ont montré que dans tous les milieux on trouve du respect et des valeurs, contrairement à ce que l’on entend parfois.»

Alors, pourquoi tout quitter en 2013? «Avec la crise de 2008, j’ai réalisé la fragilité du système. On avait d’un côté des milliards générés par des spéculations et de l’autre des milliards de personnes qui n’avaient pas accès aux besoins primaires, dans cette équation, quelque chose devait évoluer.» Pour Yonathan, l’évolution doit pourtant se faire à partir du système capitaliste: «Jusqu’à preuve du contraire, c’est encore le meilleur qu’on ait trouvé.»

Commence alors l’aventure Horyou. En 2011 déjà, le nom: «H» pour humanité, «or» pour le libre arbitre et «you» pour le tout un chacun. Yonathan semble avoir pensé chaque point de détail de son projet. Le réseau social, en ligne depuis 2013, compte trois types d’intervenants: de simples citoyens, mais aussi des ONG comme Terre des hommes Suisse ou des personnalités qui ont des compétences spécifiques à partager.

Sur Horyou, on ne «like» pas une publication comme on le ferait sur Facebook, on la light(e). «Mettre en lumière, plutôt que de rester tourné vers soi», explique Yonathan. «Lorsqu’il y a échange de «light», la connexion est établie: la réciprocité est indispensable.» Le site est alors pour les associations une vitrine qui permet de transformer les échanges en ligne en actions concrètes entre les différents acteurs sociaux.

Y a-t-il un risque de voir certains profils, comme sur Facebook, mal tourner? «Les ONG et les personnalités reçoivent ou non une validation d’Horyou lors de l’inscription. Et sur le site, tout prosélytisme religieux et toute propagande politique sont interdits.» En plus du réseau social, Horyou met en ligne des reportages tournés par son équipe pour faire connaître des associations du monde entier.

Pour promouvoir Horyou, Yonathan est partout. A Cannes, en mai 2015, il fait construire un «village Horyou» pour donner la parole aux représentants du monde associatif. Il organise aussi avec son équipe en octobre dernier le 1er Forum de l’innovation sociale et de l’éthique globale (Sigef 2014), qui rassemble des organisations internationales et des porteurs de projets innovants qui soutiennent l’action solidaire et les technologies constructives.

Sur YouTube, on trouve une vidéo du CEO sur scène, expliquant aux invités du Sigef son concept Social Networking for Social Good (réseau social pour bien social). Sur scène comme en face-à-face, il offre une vision éminemment «cool» de l’utilisation des technologies et utilise une rhétorique très imagée, où les histoires et les métaphores sont récurrentes. Un peu à la Steve Jobs. La touche du cofondateur d’Apple, après celle de l’ancien Beatle, dans le style de Yonathan Parienti? Etonnant et détonnant mélange.

Et la suite? «On vient de mettre en place l’application mobile Horyou: si les gens prennent une fraction du temps qu’ils passent sur leur téléphone pour nous faire une petite place, on est déjà gagnant. Internet sert souvent de défouloir, je veux retrouver le rêve qu’était Internet à ses débuts: connecter les gens entre eux, d’un bout du monde à l’autre.» Dans la bouche de cet homme, décidément, chaque phrase devient une maxime.

Sur Horyou, on ne «like» pas une publication comme sur Facebook, on «lighte». «Mettre en lumière, plutôt que de rester tourné vers soi»