Les voici, hommes et femmes, tous réunis sous les flocons de neige à scruter une face de montagne enneigée des Pyrénées. Après avoir été reportée le 28  février pour manque de neige, l’étape andorrane du Freeride World Tour se tiendra dès 8h15 mardi, à Ordino Arcalis.

Après Hakuba au Japon et Kicking Horse au Canada, les concurrent·es devront de nouveau faire leurs preuves entre neige poudreuse et falaise rocheuse, à ski ou en snowboard. Lundi, jumelles calées sur le nez, i·els repéraient la ligne qu’i·els souhaitaient emprunter le lendemain dans la poudreuse qui s’accumulait.

Sur 400 mètres de dénivelé, ces athlètes devront dessiner une ligne technique, originale et fluide agrémentée dans l’idéal de figures. Au même titre que la chute, la perte de contrôle prive le ou la concurrent·e de tout score. Sur cette compétition, autant les hommes que les femmes sont soumis aux mêmes règles. Depuis le début de cette épreuve internationale, déclinée telle qu’elle l’est aujourd’hui depuis 2008, ils concourent tous sur la même montagne, le même jour, dans les mêmes conditions. Mais alors que tous semblaient s’affronter à armes égales sur ces faces enneigées, un seul élément variait d’un sexe à l’autre: leur rémunération. 

Principales lésées, les femmes percevaient parfois des prize money deux fois moins élevés que ceux des hommes. Cette inégalité a été pointée du doigt par Anne-flore Marxer, snowboardeuse franco-suisse, qui a remporté le titre de championne du monde en 2011. Depuis, elle n’en a jamais démordu. D’année en année, elle a fait part de son désaccord dans la presse: «La gent féminine a toujours été mise de côté dans le freeride», dénonçait-elle dans les colonnes du Temps.

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Mais pour les organisateurs du Freeride World Tour, ce manque de parité était justifié. Jusqu’à présent, un calcul arithmétique basé sur le nombre de participant·es de chaque catégorie expliquait la différence de salaire. Toutefois, cette année, les choses ont changé. En janvier, quelques jours avant la première étape au Japon, la parité des primes a été annoncée sur l’ensemble du tour. «Le système était équitable, soutient Nicolas Hale-Woods, le patron de l’événement. Mais 80% de la population ne le comprenait, ou ne l’approuvait pas.» Les revendications de la snowboardeuse ont-elles enfin été écoutées? Le Tempsa demandé des explications au directeur du Freeride World Tour.

Le Temps: Quel a été l’élément qui a motivé votre décision d’établir la parité des primes?

Nicolas Hale-Woods: Nous avons désiré mettre fin à la discussion. Depuis vingt-cinq ans, avec l’accord d’une quasi-unanimité des athlètes, y compris féminines, nous privilégiions un prize money équitable, à savoir une récompense moyenne égale sur l’ensemble de la saison. Nous nous basions donc sur une logique arithmétique. Mais elle n’était apparemment pas comprise par le public.

L’actualité féministe de cette année a-t-elle joué un rôle dans ce choix? 

Nous avons avant tout voulu donner un signal fort sur l’égalité des genres. Ce salaire égal permet aussi de motiver les participants des «petites» catégories, tels que les skieuses, snowboarders et snowboardeuses, à s’investir dans leur discipline. 

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Comment les concurrents étaient-ils rémunérés jusqu’à présent? 

Les catégories comptant le même nombre d’athlètes, à savoir les skieuses et les snowboarders, tous deux au nombre de dix, recevaient un prize money identique, à savoir 4000 dollars pour une première place. En revanche, les skieurs masculins, qui étaient 21 au sein de leur catégorie, recevaient un montant plus élevé pour une première place, soit 6000 dollars, car ils avaient statistiquement moins de chance d’y arriver. Les snowboardeuses, qui n’étaient que sept, recevaient un prize money de 3500 dollars pour une première place. Désormais, les gagnants de toutes les catégories reçoivent 5000 dollars de prize money pour chaque étape du Tour.

Les sommes en jeu sont plus élevées lors de la finale à Verbier. 

Oui. Mais la clé de répartition était similaire. Alors que le premier skieur de la finale gagnait une somme de 8000 dollars, la gagnante en ski et le meilleur snowboarder remportaient 6000 dollars. Les snowboardeuses recevaient, elles, 4000 dollars. A partir de 2020, les vainqueurs de toutes les catégories recevront 6000 dollars lors de la finale de l’Xtreme.

Les skieurs hommes reçoivent donc un prix moins important qu’auparavant… 

Oui, mais nous avons toutefois légèrement augmenté le prize money total dans la mesure de nos moyens, à 385 000 dollars, afin de limiter cette baisse.