Une relation très particulière, intime, lie les Américains au baseball. Ils se passionnent davantage pour le football, sont beaucoup plus nombreux à jouer au basketball, mais le baseball demeure leur passe-temps favori. Cette curiosité est partiellement due aux nombreuses statistiques qui entourent le baseball et qui en ont fait un sport historique. Aux Etats-Unis, chacun se souvient des héros sportifs de son enfance, et très souvent il s’agit de joueurs de baseball comme le légendaire Babe Ruth des New York Yankees ou de Hank Aaron des Atlanta Braves.

Durant toute sa vie, le baseball est là comme une présence. On se remémore les radiodiffusions des grands classiques marqués par les voix de commentateurs légendaires comme Vin Scully à Los Angeles, Joe Garagiola à New York et Harry Caray à Chicago. Un match peut durer jusqu’à trois heures, une éternité à regarder à la télévision, qui pousse aujourd’hui les dirigeants de la ligue à trouver les moyens de réduire la longueur des parties. Mais en «live» dans ces stades mythiques, c’est un produit qui se consomme superbement entre amis, en famille, et sans trop de stress.

L’expérience du stade

Le match au stade est une véritable forme de détente et un divertissement unique pour les fans. On suit la partie, on discute, on se balade partout dans le stade, on s’arrête pour manger, et on revient au jeu. C’est une expérience très particulière à la culture américaine, un rite initiatique peuplé d’incontournables: les célèbres hot-dogs, la bière froide, les bretzels (comme dans cet épisode des Simpsons) et les pizzas chaudes. Les supporters sont aussi excessivement fidèles à leur sport et inscrivent chaque statistique suivant chaque lancer sur une feuille de pointage. On entend, telle une musique, le craquement des battes en bois des frappeurs lorsqu’ils font contact avec les balles lancées à 150 km/h, toutes ces choses qui font que, printemps ou été, assister à un match de baseball est une expérience magnifique.

Parmi tous les sports d’équipes populaires aux Etats-Unis, le baseball est le moins familier pour les Européens. Contrairement au basketball qui possède de profondes racines en Europe, au football américain qui organise plusieurs matchs chaque année à Londres, ou au hockey qui bénéficie d’une grande popularité dans les pays scandinaves, dans les pays de l’est et bien entendu en Suisse, le baseball reste méconnu du Vieux Continent. Ce qui est à la fois étonnant et non. Le jeu n’est pas particulièrement difficile à comprendre. Une équipe prend possession du terrain et défend, alors que l’autre équipe tente de frapper les balles lancées, de courir autour des bornes et de marquer des points. Par contre le baseball nécessite un stade avec une configuration unique contrairement à un stade de football ou à un stade de football américain, qui sont tous les deux sensiblement aux mêmes dimensions. Et ces stades de baseball n’existent tout simplement pas en Europe.

Des matchs tous les jours

Sport datant des années 1850 et immensément populaire en Asie, particulièrement au Japon, aux Philippines, à Taiwan, en Chine, le baseball est également omniprésent en Amérique Latine dans des pays plus petits comme la République dominicaine, Cuba, Porto Rico où les jeunes enfants pratiquent le «béisbol» en rêvant tous d’atteindre un jour la Major League Baseball (MLB). Près de 25% des joueurs évoluant en MLB sont originaires de l’Amérique Latine. Ils peuvent gagner de hauts salaires et améliorer la vie de leur famille. Les meilleurs empochent entre 25 et 30 millions de dollars par saison.

Ce printemps, les dirigeants de la MLB ont organisé la World Baseball Classic, une espèce de championnat du monde de baseball qui démontre parfaitement le rayonnement géographique de ce sport typiquement américain. Mais les «World Series» désignent la série finale de la MLB. Elle intervient en octobre au terme d’une très longue saison: 162 matchs, sans compter les play-off. Ce nombre très élevé s’explique par le fait que les rencontres se disputent quotidiennement et que le jeu est bien moins physique que les autres sports d’équipes américains.

Cette omniprésence du baseball durant six mois contribue à la popularité de clubs devenus légendaires. Les Boston Red Sox, les Chicago Cubs, vainqueurs des World Series cet automne après une disette record de 108 ans, ou les Los Angeles Dodgers sont des noms connus dans le monde entier. Quant aux fameux New York Yankees, 27 fois titrés des World Series, leur logo «NY» avec le «N» et le «Y» superposés, est tellement reconnu qu’il symbolise la ville et même les Etats-Unis à travers le monde. Bien peu de gens savent qu’il représente un club de baseball.


* Ancien directeur du bureau NBA Europe à Genève (basket), vice-président des Canadiens de Montréal (hockey), président des Alouettes de Montréal (football américain) et membre du Comité olympique canadien, Ray Lalonde est consultant indépendant en management du sport.