cyclisme
«Je suis devenu champion parce que j’étais pauvre», disait le cycliste suisse, qui s’efface à 97 ans. Le «fou pédalant» avait gagné la Grande Boucle en 1950

Le cycliste Ferdy Kübler, premier Suisse à avoir remporté le Tour de France en 1950 et doyen des vainqueurs de la Grande Boucle, est décédé jeudi à l’âge de 97 ans. Légende du cyclisme helvétique, le Zurichois s’est éteint jeudi après-midi a précisé sa femme Christina Kübler au magazine «Schweizer Illustrierte». «Ferdy s’est endormi paisiblement, avec un sourire sur son visage», a-t-elle expliqué.
Après avoir passé Noël à la maison en famille, «le fou pédalant», qui avait souffert de nombreux problèmes de santé ces derniers temps, a été admis dans un hôpital zurichois à la suite d’un sévère refroidissement, a précisé sa femme.
Un coureur tempétueux
Coureur tempétueux et fier, l’aigle d’Adliswil avait enrichi par sa victoire spectaculaire au Tour de France (9’ 30’’ d’avance sur le Belge Stan Ockers) un palmarès impressionnant à une époque passant pour être l’âge d’or du cyclisme.
Ses adversaires s’appelaient Fausto Coppi et Gino Bartali, les «campionissimi» italiens, Louison Bobet, le fier champion breton, Hugo Koblet, l’autre «K» du cyclisme suisse, avec qui il noua l’une des rivalités nationales qui enflamment ce sport.
Tout séparait Koblet, le dieu blond magnifique vainqueur du Tour 1951, de Kübler, le diable noir. L’un était l’élégance incarnée, l’autre l’énergie et la générosité auxquelles il ajoutait panache et ambition. «Notre rivalité nous incita à nous surpasser. Sans lui, je n’aurais jamais atteint certains sommets. Peu importe qui de nous fut le plus grand», disait Kübler, dont le tempérament le portait aux actions les plus folles.
Archive: La Gazette de Lausanne lors de la victoire (voir la page ici).
A Raphaël Géminiani lui conseillant la prudence dans le Tour 1955 avant d’attaquer le Ventoux, «un col pas comme les autres» selon la formule de l’Auvergnat, Kübler répondit en appuyant plus fort encore sur les pédales: «Ferdy, non plus, pas coureur comme les autres.» La défaillance n’en fut que plus spectaculaire.
«Je savais tout faire»
«Le contre-la-montre, le sprint, la montagne… je savais tout faire», disait Ferdy Kübler, qui regrettait d’avoir vu le début de sa carrière – il était né le 24 juillet 1919 – entravé par les années de guerre. Champion du monde en 1951 sur le circuit de Varèse en Italie, le Zurichois gagna cette année-là la Flèche wallonne et Liège-Bastogne-Liège, deux classiques qui se disputaient à l’époque sur deux journées consécutives. Douze mois plus tard, il récidivait dans un «doublé» demeuré fameux.
«Je suis devenu champion parce que j’étais pauvre», avait-il expliqué à l’«Equipe Magazine» à l’occasion du centenaire du Tour (2003). «Je luttais pour manger, pour avoir une vie meilleure. J’ai gagné le Tour de France parce que j’en ai rêvé, parce que je savais qu’après je ne serais plus jamais pauvre.» Ferdy Kübler, qui avait arrêté sa carrière en 1957, était resté très populaire dans le pays. Au point de faire figure, bien avant que ce terme soit à la mode, d’icône publicitaire dans son pays.