Elle a un bon potentiel dans tous les sports. Dixit Corinne, sa maman, son entraîneur aussi. Mais c’est à l’athlétisme qu’Elodie Jakob, 15 ans et demi, a dédié son talent inné. Avec déjà 14 titres de championne suisse et des records de saut à la perche, cette jeune fille du Gros-de-Vaud (Pomy, près d’Yverdon) admire Carolina Klüft et Lolo Jones et rêve de Jeux olympiques. En attendant, elle devrait disputer cet été le Festival olympique de la jeunesse européenne en Finlande et les Championnats du monde des moins de 18 ans en Italie. Elle avait déjà atteint les minima exigés l’an dernier, mais n’avait pas l’âge.

La jeune championne avait commencé par la gymnastique. A 8 ans. Avant de lui préférer l’athlé, sport plus cartésien. «Je n’aimais pas l’idée, en gym, d’être jugée par rapport à un style. En athlétisme, c’est un chrono ou une distance qui parle. Le résultat est concret.» Elodie concède un penchant tout particulier pour la perche, les haies et l’heptathlon.

Chez cette jeune fille qui sait garder les baskets sur terre, la modestie rivalise avec la timidité. Les confidences viennent au compte-gouttes. «A partir d’un certain niveau, on peut devenir «world class potentiel».» Traduction: elle fait partie du cadre national. Ce qui lui permet d’être prise en charge pour des stages à Macolin et à Aigle et lors des déplacements sur les compétitions internationales. Elle avoue toutefois ne pas avoir beaucoup de contacts avec la Fédération nationale. «C’est vrai qu’en Suisse, on doit un peu se débrouiller tout seul. En dehors de la famille, il n’y a pas grand monde qui aide.» La maman l’avoue sans rougir: «Sans moi, elle ne serait pas là.» Corinne, qui entraîne bénévolement les enfants de son village à l’athlétisme à ses heures perdues, a pris en main la formation de sa fille prodige. «Cela me demande pas mal d’heures d’investissement (12 heures par semaine). Je n’ai gardé plus que 4 ou 5 athlètes en dehors d’Elodie car je n’y arrivais plus.» On sent la connivence mère-fille. «C’est un avantage, glisse Elodie. Elle me connaît, sait comment je fonctionne et voit quand je suis fatiguée.» Pour la perche et les haies, elle fait toutefois faux bond à sa génitrice. C’est à Lausanne qu’elle s’entraîne à la perche avec un coach spécialisé. Et pour les haies, elle se rend à Berne une fois par semaine retrouver un coach national.»

Tout cela, il faut le caler après l’école. Car dans le canton de Vaud, le système sport-études n’existe pas. Et Elodie ne se voit pas quitter le giron familial pour partir à Tenero, au Tessin. «En France, dans les centres de sport de haut niveau, les horaires sont aménagés et tu peux consacrer tes après-midi à t’entraîner», précise-t-elle. Tout au plus, Elodie a droit à des allégements. Notamment pour l’entraînement à Berne. «La fédération nous fait des lettres, explique Corinne. On essaie de s’organiser pour ne pas perdre des heures et des heures en trajet. Mais en voyant les filles plus âgées, on se rend compte qu’après, au gymnase, c’est difficile d’assumer école et sport de haut niveau.» La maman se dit prête à laisser Elodie «aller au bout de son envie». Et espère que Zurich obtiendra l’organisation des Championnats d’Europe 2014: verdict cet automne. «Un programme de soutien aux athlètes serait mis en place. Cent jeunes seraient sélectionnés et 30 d’entre eux participeraient aux Championnats.»