Un certain nombre de réformes de gouvernance viennent d’être proposées pour la FIFA. Elles seront insuffisantes pour sortir le football international de l’ornière, quel que soit le président qui sera élu fin février. D’autres réformes, présentées ici, sont nécessaires et pourraient inspirer d’autres organisations sportives internationales (comme l’IAAF, la Fédération internationale des associations d’athlétisme, qui expérimente aussi une crise). Qui peut, en effet, croire qu’une limitation de mandats, pour ne prendre qu’un seul exemple, résoudra les problèmes de corruption?
Les organisations sportives qui veulent se réformer font face à deux difficultés portant sur la forme et sur le fond. Il s’agit d’abord de faire adopter les réformes proposées. Dans le cas de la FIFA, plusieurs réformes avaient déjà été proposées mais n’ont pas été approuvées il y a quelques années par le comité exécutif (c’est-à-dire le président élu par l’assemblée générale et 23 membres nommés par les confédérations continentales). Elles n’ont donc jamais été soumises à l’assemblée générale (congrès) des représentants des 209 associations nationales membres de la FIFA. De plus, pour approuver ces réformes ou d’autres, il aurait fallu une majorité qualifiée des trois quarts des membres qui n’est pas facile à obtenir.
Les dindes n'aiment pas Noël
Autant dire qu’une réforme a peu de chance d’être adoptée si elle affecte négativement les prérogatives du comité exécutif ou des membres. Comme on dit en anglais, les dindes n’aiment pas Noël! Autrement dit, personne n’aime se couper la main. La seule façon de faire passer une réforme significative est qu’il y ait une forte pression des sponsors et des télédiffuseurs -qui financent le système- ce qui est le cas actuellement pour la FIFA. Pour corriger cette difficulté de forme, il faudrait changer les structures même de décision (ce qui nécessite de nouveau la majorité qualifiée) et/ou abandonner le principe «une voix = un pays/une association nationale» (qui est la règle dans les organisations internationales). Pour cela, le leadership du futur président sera essentiel.
Au niveau du fond, les réformes de gouvernance ne seront pas suffisantes pour éviter la corruption. Il faut traiter les principales causes qui ont donné lieu à de la corruption dans les organisations sportives, à savoir l’attribution des grandes compétitions et le contrôle des dépenses centrales et des redistributions locales de fonds, si on laisse de côté le dopage, qui est un sujet en soi traité par l’Agence mondiale antidopage.
Votes par Internet et enchères
A la FIFA, l’attribution de la Coupe du monde de football à un pays résultait d’un vote du comité exécutif (comme dans la plupart des fédérations sportives internationales) et résultera bientôt d’un vote du congrès, une réforme adoptée à la suite des décisions contestées pour la Russie (2018) et le Qatar (2022). On est ainsi passé de 24 à 209 électeurs. Bien que ce nouveau système n’ait encore jamais été testé, on peut déjà dire que le nombre de votants n’est pas assez élevé pour prévenir la corruption. Il faudrait adopter un système plus ouvert encore, par exemple en faisant voter des supporters par Internet, ou alors procéder par enchères à la candidature la plus offrante, comme le suggèrent certains, le montant de l’enchère la plus haute revenant au développement du sport.
Il faudrait aussi tenir compte du respect des droits de l’homme et de la nature dans les pays candidats. Une présélection par le comité exécutif ne pourrait soumettre au vote ou aux enchères que les pays/villes qui respectent ces droits et ne pratiquent pas de discrimination envers des minorités, tout en assurant une rotation des attributions sur les différents continents. Plusieurs indices composites internationaux faciliteraient la présélection par les organisations sportives. L’Union européenne est d’ailleurs en train d’établir, pour début 2016, des principes directeurs au sujet de la démocratie, des droits humains et des travailleurs dans le contexte de l’attribution des grands événements sportifs. Il s’agit clairement d’une réflexion lancée à la suite du choix pour la Coupe du monde de football 2022.
Des fonds pour le développement
Enfin, il est nécessaire de mieux surveiller les fonds à disposition des organisations sportives au travers d’audits transparents, mais aussi les fonds redistribués dans les associations-membres. Ces fonds doivent revenir au sport et non pas enrichir des potentats locaux. Les programmes de développement des divers sports devraient être mieux encadrés dans le cadre du respect d’une autonomie responsable et encadrée des organisations sportives locales, nationales et internationales.
Voilà un ensemble de réformes qui doivent être entreprises pour mieux réguler le sport international sans se limiter aux questions de gouvernance, certes importantes mais qui ne peuvent à elles seules éradiquer la corruption qui risque de dégouter les supporters du sport regardé ou pratiqué.