Football et hockey: à Zurich, le printemps du sport
Zurich
AbonnéIl est très rare que deux clubs d’une même ville dominent simultanément les championnats de Suisse des deux sports collectifs les plus populaires. C’est actuellement le cas du FC Zurich et des ZSC Lions, sur le point de devenir champions

Conformément à une tradition plus que centenaire, le troisième lundi d’avril est à Zurich le jour des Sonnailles de 6 heures, Sechseläuten en bon allemand ou Sächsilüüte en dialecte. La fête donne lieu à des cortèges, d’enfants déguisés et de corporations, et culmine à 18 heures par la crémation du Böögg. Plus vite les pétards fourrés dans la tête de cette version locale du bonhomme hiver explosent et plus l’été sera clément. Surtout: la cérémonie symbolise l’arrivée du printemps. Cette année, elle coïncide avec celle des beaux jours pour le sport zurichois.
Ce samedi, les footballeurs du FC Zurich ont étrillé le FC Sion (5-1) tandis que les hockeyeurs des Zurich Lions battaient Zoug (1-2) pour mener 3-0 dans la finale des play-off. Les deux clubs sont sur le point de devenir champions de Suisse.
En Super League, le FC Bâle (deuxième) a retardé l’échéance ce dimanche en battant Lucerne au Parc Saint-Jacques (3-0) mais ses 13 points de retard sur la tête à cinq matchs de la fin de la saison ne laissent que peu de suspense. En National League, depuis l’introduction des séries au meilleur des sept matchs, aucune équipe n’a décroché le titre après avoir été menée de trois manches en finale. Ce lundi à 20 heures, le bûcher du Böögg n’aura pas eu le temps de refroidir que les Lions tenteront d’enflammer leur Hallenstadion pour la dernière fois.
Rareté historique
Le sacre simultané de deux clubs d’une même ville dans les deux sports collectifs les plus populaires du pays est une rareté historique. Ce n’est arrivé que quatre fois jusqu’ici, deux à Berne (Young Boys et CP Berne en 1959 et 2019) et deux à Zurich (Grasshopper en hockey et Zurich en football en 1961, l’inverse en 2001).
Le canton de ZH pourrait réaliser cette saison un exploit sportif jamais vu auparavant en Suisse: remporter simultanément les 2 premières divisions des 2 sports d'équipe principaux (foot/hockey). En 1966, il ne leur avait manqué que la LNB de hockey. (1/5)
— Bastien Trottet (@BastienTrottet) 21 avril 2022
Chaque occurrence tient toutefois davantage de la coïncidence que d’une dynamique partagée. Celle qui se profile ne fait pas exception. En hockey, les ZSC Lions comptent parmi les ogres du championnat. Leurs moyens financiers importants en font systématiquement des candidats au titre, qu’ils ont d’ailleurs remportés trois fois ces dix dernières années (2012, 2014, 2018). En football, où l’hégémonie de Young Boys (quatre sacres) s’était substituée à celle de Bâle (huit), le FC Zurich en était réduit depuis plus d’une décennie à se battre pour être le premier des «viennent-ensuite». Personne, pas même le capitaine de l’équipe, Yanick Brecher, récemment interrogé par Le Temps, ne s’attendait à ce qu’il en aille différemment cette année.
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Le sport a ses mystères. Côté gazon: comment expliquer la fantastique efficacité de l’attaquant Assan Ceesay, deuxième meilleur buteur de Super League avec 17 réussites (et 7 passes décisives pour ne rien gâcher)? Rappel: le Gambien d’aujourd’hui 28 ans n’avait jamais marqué plus de… 3 buts en une saison dans l’élite helvétique. Sur les bords de la Limmat, tout le monde hausse les épaules et postule que dans un sport collectif, l’alchimie entre les différents individus peut en transcender certains. «Depuis le début de la saison, notre esprit d’équipe est extraordinaire», nous assure Yanick Brecher.
Une nouvelle patinoire
Autre curiosité, côté glace: comment les Zurich Lions peuvent-ils mener 3-0 dans la série finale alors que chaque match est aussi serré? Dans l’acte I, Zoug menait encore 2-1 à 89 secondes de la sirène de fin, avant que Chris Baltisberger puis Justin Azevedo ne passent par là. Dans les actes II puis III, double rebelote: les champions en titre mènent, dominent, doivent classer l’affaire, tergiversent, encaissent l’égalisation puis s’écroulent avant même les prolongations. Au micro de la RTS, ce samedi soir, l’incompréhension de Grégory Hofmann paraissait abyssale: «Nous avons été la meilleure équipe sur la glace, tout le monde a pu le voir», lançait-il sans une once de forfanterie mais plein de dépit. Ses coéquipiers et lui n’ont plus de droit à l’erreur.
Le match de ce lundi soir sera, en cas de victoire zurichoise, non seulement le dernier de la saison mais aussi le dernier disputé au Hallenstadion. Après huit ans de planification et de démarches administratives, la construction du nouvel antre des ZSC Lions – déjà «namé» «Swiss Life Arena» – a commencé en 2019 dans le quartier d’Altstetten et s’achèvera très prochainement, pour une inauguration prévue en août. Pour le club, ce sera le début d’une nouvelle ère, avec une enceinte principale pouvant accueillir 12 000 spectateurs et surtout des infrastructures d’entraînement très performantes.
En matière de déménagement, le FC Zurich en est encore à patienter. Si l’ouverture récente du complexe d’Heerenschürli a fait passer le club «de la Challenge League à la Champions League» (dixit Yanick Brecher) en matière de centre d’entraînement, le projet de nouveau stade (la «Credit Suisse Arena») est un peu égaré dans un labyrinthe d’oppositions et de recours. Ses promoteurs considèrent que les travaux commenceront au plus tôt entre 2023 et 2024, au plus tard en 2028.
Quand les footballeurs zurichois pourront-ils quitter leur bon vieux Letzigrund? Pas sûr que la vitesse de la crémation du Böögg leur permettent d’en savoir plus à ce sujet.