JO: pour la Suisse, c’est mission accomplie
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Au terme d’un jeudi faste ainsi qu'avec le résultat de Fanny Smith, le butin de la délégation suisse à Pyeongchang a atteint 12 médailles, une de plus qu'escompté. Les athlètes expliquent leurs succès par la dynamique de leurs disciplines respectives

Sonnez les cloches, faites fondre le fromage et griller les saucisses de veau: pour la deuxième fois depuis le début des Jeux olympiques de Pyeongchang, il y avait jeudi soir trois médailles à célébrer à la Maison suisse installée au pied des pistes de Yongpyong. Vendredi dernier, Dario Cologna, Beat Feuz et Wendy Holdener avaient permis à la délégation helvétique de véritablement lancer la moisson. Cette fois, l’or de Michelle Gisin (combiné alpin), l’argent de Ramon Zenhäusern (slalom) et le bronze de Wendy Holdener (combiné alpin) – encore elle – portent la récolte au seuil des espérances officielles. Dimanche soir, à l’heure de la cérémonie de clôture, la Suisse aura réussi ses Jeux olympiques.
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«Attendez, nous avions dit que nous voulions 11 médailles ou plus», sourit Ralph Stöckli. Le chef de mission de Swiss Olympic arrive en retard pour la présentation publique des trois héros du jour, après avoir assisté à la défaite des curleurs du CC Genève en demi-finale du tournoi masculin. Qui pour apporter la médaille nécessaire à lever les dernières réserves? Peter de Cruz et ses camarades vendredi? Ou alors Nevin Galmarini en snowboard parallèle samedi? Ou les skieurs, très inspirés jusqu’ici, lors du «team-event»? A l’aube du dernier week-end de compétition, la Suisse semblait encore pleine de ressources. Mais il n'y a pas eu besoin d'attendre aussi longtemps: Fanny Smith, première Suissesse en lice vendredi matin, a décroché le bronze du skicross.
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Les Jeux ont changé
«Oui, ce qui se passe est génial, reprend Ralph Stöckli. Je crois que notre objectif était simplement réaliste. Aux JO, tu obtiens toujours certaines médailles attendues, et tu espères que des exploits imprévus compensent les déceptions. Nous avions assez bien compté.» Mais que dit le butin de Pyeongchang de la place de la Suisse dans la grande compétition internationale des sports d’hiver? Au terme des épreuves de jeudi, elle occupait le dixième rang du classement des médailles. C’est un peu moins bien que son classement moyen sur les 21 premières éditions des Olympiades d’hiver, une petite huitième place.
Mais la comparaison historique est délicate tant les Jeux ont changé. Entre ceux de Sapporo en 1972 et ceux de Pyeongchang en 2018, tout a triplé: le nombre d’athlètes (de 1008 à 2925), le nombre d’épreuves (de 35 à 102), le nombre de sportifs dans la délégation suisse (de 52 à 170). Seul le nombre de médailles suisses (10 au Japon) oscille autour des mêmes valeurs. Depuis 1998, les sportifs helvétiques sont de plus en plus nombreux aux Jeux mais ils ne gagnent pas davantage de médailles: 7 à Nagano, 11 à Salt Lake City, 14 à Turin, 9 à Vancouver, 11 à Sotchi et 12 jusqu’ici à Pyeongchang.
Ces chiffres traduisent moins une baisse de niveau du sport suisse qu’un renforcement de la concurrence. De plus en plus de nations se mêlent à la lutte pour le podium dans un nombre croissant de disciplines. «Les résultats de la saison, pas seulement ceux des Jeux olympiques, nous montrent que les sports d’hiver suisses se portent bien, estime Ralph Stöckli. Mais il est clair qu’il faut toujours en faire davantage ne serait-ce que pour maintenir les acquis.»
Des histoires individuelles
Par ailleurs, le décompte global masque certaines réalités particulières. Le bilan positif de Salt Lake City en 2002 (11 médailles) ne disait rien de la débâcle de l’équipe de ski alpin (un seul podium pour Sonja Nef), comme le succès d’ensemble qui se dessine en Corée du Sud occulte son retour en grâce (déjà six podiums, meilleur résultat d’ensemble depuis les JO de Calgary en 1988).
De fait, les athlètes évoquent rarement la dynamique positive de la délégation suisse au moment d’expliquer leurs exploits. De fil rouge entre toutes les performances, ils n’en voient guère. «C’est bien que des médailles tombent de partout, car cela enlève un peu de pression à ceux qui doivent entrer en lice, nuançait Ramon Zenhäusern jeudi soir. Mais si ma deuxième place est celle d’une équipe, c’est surtout celle du ski alpin, celle de nos entraîneurs et des autres athlètes…» Samedi dernier, Sarah Höfflin et Mathilde Gremaud en référaient également à la bonne entente régnant dans l’équipe de freeski pour expliquer leur doublé en slopestyle, pas à la mécanique de la machine helvétique.
Les disciplines comme des cantons
Aux Jeux olympiques, les différentes disciplines sont les cantons de la Suisse du sport. Elles sont à la fois autonomes, et liées par un destin commun. «Il est clair qu’un bon résultat, c’est toujours une histoire individuelle en premier lieu, reconnaît Ralph Stöckli. Mais je veux croire qu’une atmosphère sereine et positive à tous les échelons d’une délégation participe au succès de tout le monde. Et en Corée du Sud, même si la tâche n’était pas simple avec des athlètes disséminés sur cinq sites différents, j’ai l’impression que nous avons bien réussi à l’installer.»