«Numéro un dans l’histoire du tennis», titre pour sa part la Tribune de Genève dans son éditorial, qui commence par trois adjectifs superlatifs («phénoménal, incroyable, historique»). Ce «retour de Federer laisse sans réplique», écrit 24 Heures: «Hier encore, le Bâlois a affolé les records, lâchant par exemple cinquante aces, soit le quatrième total de tous les temps. La liste complète tient de la litanie»: «La couronne, le trône et la légende», résume Radio-Canada, après que «les deux gladiateurs eurent atteint des sommets» dans cette finale, écrit le Financial Times.
Les deux quotidiens lémaniques publient aussi les propos de tous les people «qui craquent pour le maître». Comme le cuisiner Philippe Rochat: «Il dégage une très belle image pour la jeunesse… et pour notre pays. J’éprouve pour lui un immense respect.» Et si pour l’ex-skieur Roland Collombin, «il est un peu trop gentil», pour l’entraîneur de foot Umberto Barberis, «il est l’un des seuls sportifs, contemporains, avec Cancellara, qui arrive à me faire vibrer, en raison de son talent, de sa simplicité, de son approche tactique. […] Federer m’a eu, il m’a fait entrer dans le club de ses fans. Une osmose s’opère et il m’arrive de penser que c’est moi qui le fais perdre. Je suis comme un gamin: je ne veux que le voir gagner et j’enrage quand il capitule.» Et Eurosportde nous apprendre que le golfeur «Tiger Woods a juste eu le temps d’envoyer un message de félicitations à son ami Roger Federer […], avant d’entamer les 18 trous qui l’ont lui aussi mené au succès, dimanche à Bethesda: «Bon travail, maintenant c’est mon tour», a tapoté et envoyé le N°1 mondial Woods au N°1 mondial Federer avant de s’adjuger dans le Maryland sa 68e victoire.»
«En nous», «Roger nous fait tourner la tête», éditorialise encore Le Matin: «C’est si bon et si dangereux à la fois. Il gagne et on s’emballe, il perd et on est mal. Il est là. Il fait partie de notre quotidien. De notre vie. Il est notre plus belle rencontre. Roger nous porte, nous émerveille, nous rend fiers.» Mais «il faut sans doute un brin de chance pour forger les destins sportifs exceptionnels, tempère Le Nouvelliste. Cette année, dame Fortune a considéré Federer avec une certaine bienveillance.» Mais tout de même, au terme d’une finale que le New York Timesqualifie de «marathonienne», il «écrit sa légende», dit Le Figaro. Désormais confortablement «assis sur l’Olympe», pour la Berliner Zeitung.
Revenu de loin? C’est ce qui transpire de l’analyse de L’Express/L’Impartial: «La succession du «maître» était annoncée […]. A ces larmes tombées sur le sol de Melbourne après sa défaite, succédaient d’abord une raquette brisée sous le soleil de Miami, puis une défaite forte en symboles contre son pote Stanislas Wawrinka à Monte-Carlo. Le monde du tennis devenait circonspect, presque inquiet. Début avril, le destin de Roger Federer se cherchait un nouveau chemin. Entre-temps, sa compagne de longue date, Mirka, et lui avaient annoncé la grossesse de madame, puis le couple s’était marié à Bâle. En tapinois.»
Et aujourd’hui, au seuil de cette paternité qui lui prend la tête, il est comme avec «des collègues de travail à la machine à café, décrit enfin L’Equipe. Roger Federer discute avec Pete Sampras, Rod Laver et Björn Borg à la sortie du court, juste après sa finale historique. Suisse, Américain, Australien et Suédois parlent la même langue, celle des légendes du tennis avec cinquante et un titres du Grand Chelem dont vingt à Wimbledon à eux quatre. [Il] vient de battre le record de Pete Sampras et se retrouve seul au monde avec 15 titres du Grand Chelem, gagnés sur quatre surfaces différentes. Le décorum est parfait, le temple du tennis accueille, avec respect et ferveur, le champion.» La messe est dite.