Les promesses toxiques de l’antidopage
En multipliant les effets d’annonce et les promesses intenables d’un «sport propre», les instances sportives internationales ont miné la confiance du public et affaibli la performance symbolique de l’antidopage, en dépit de progrès réels sur le terrain
Dans son Traité de la nature humaine, le philosophe David Hume affirme que les paroles données engagent ceux qui les émettent et obligent ces individus ou organisations au respect de leurs promesses sous peine d’endommager leur réputation. Ce constat semble valoir dans le sport puisqu’en multipliant les promesses non tenues, les organisations sportives ont fragilisé la confiance dans la lutte contre le dopage.
Pour beaucoup, il semble aujourd’hui évident de lutter contre le dopage et de sanctionner sévèrement toute violation du Code mondial antidopage. Pourtant, cette façon de fixer la manière légitime de produire une performance sportive correspond à un moment particulier de l’histoire des normes sportives. L’usage de produits dans le but d’améliorer la performance, comme la cocaïne ou l’alcool, ne choquait guère au début du XXe siècle. L’idée qu’il faut lutter contre le dopage émerge seulement dans les années 1950-1960, en conjonction avec la défense de l’amateurisme et le contexte de la guerre froide.