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La Suisse prouve qu'elle n'a pas sa place parmi les ténors du football planétaire

En s'inclinant, samedi, face à la Yougoslavie (2-1), la Suisse doit tirer un trait sur ses rêves de voyage au Japon et en Corée en 2002. A l'origine de sa défaite, l'expulsion d'Hakan Yakin. La partie a dû être interrompue à plusieurs reprises, des supporters yougoslaves imbibés d'alcool pénétrant sans résistance sur le terrain. Un mauvais point pour la candidature de la Suisse à l'Euro 2008.

L'espoir engendré par l'arrivée de Köbi Kuhn à la tête de la «Nati» aura été de courte durée. C'est désormais chose acquise, la Suisse ne participera pas à la phase finale de la Coupe du monde 2002. La faute à cette défaite – évitable – concédée samedi soir, à Bâle, face à la Yougoslavie (2-1). «Quand on s'incline trois fois à la maison contre des adversaires directs (ndlr.: la Russie, la Slovénie et la Yougoslavie), on n'a pas sa place au Mondial», concède le milieu de terrain servettien Alexandre Comisetti au terme de la partie.

Dans ce match de la peur, un homme a successivement ravivé et étouffé les rêves helvétiques: Hakan Yakin. L'attaquant bâlois ouvre le score à la 25e minute de jeu, reprenant victorieusement, de volée, un centre superbe de «Kubi» suite à une ouverture de Murat… Yakin. Mais il se fera expulser de manière stupide à la 66e minute pour un second carton jaune (il avait écopé du premier à la 44e pour une bousculade dans le mur), après avoir inscrit un but de la main. La «main de Dieu» ne sert pas toujours. N'est pas Diego Maradona qui veut.

Cet acte a eu de lourdes conséquences, notamment en matière de coaching. «C'est vrai, regrette le sélectionneur national Köbi Kuhn, l'expulsion d'Hakan m'a obligé à effectuer d'autres changements de joueurs que ceux initialement prévus.» Surtout qu'entre le but suisse et la sortie de Yakin, les Yougoslaves sont revenus au score. A la 39e minute, Mateja Kezman profite d'une grosse bourde de Bruno Berner pour filer sur l'aile et centrer en direction de Savo Milosevic. Après avoir échappé à deux défenseurs, celui-ci ne laisse pas l'ombre d'une chance au gardien Marco Pascolo.

«Je ne pouvais rien faire d'autre dès lors que prendre tous les risques, poursuit Kuhn. Un nul ne nous suffisait pas.» Et c'est au moment où il s'apprête à faire entrer deux attaquants – Stéphane Chapuisat et Alexander Frei – que l'entraîneur suisse voit la Yougoslavie prendre l'avantage (long centre de Ljubinko Drulovic repris victorieusement par Mladen Krstajic). «Ce qui me navre, explique Kuhn, c'est que nous n'avons pas bien joué en milieu de terrain. Nous n'avons pas su conserver le ballon, le faire circuler. Ce que nous avons parfaitement réalisé lors des 20 minutes initiales.»

La Suisse est abonnée à ces petits riens qui coûtent finalement fort chers. «Le problème, analyse Alexandre Comisetti, c'est que nous vivons toujours le même scénario. A savoir que nous nous créons nombre d'occasions, mais que nous sommes incapables de les mettre au fond. Résultat, nous nous retrouvons en danger par notre propre faute.» «Cela se paie cash contre une équipe comme celle de Yougoslavie dont les joueurs sont de petits malins», enchaîne le milieu de terrain David Sesa. «Il nous manque le brin de chance que nous avions dans les années 94 à 96», complète Johan Vogel. Quant au gardien Marco Pascolo, il se dit avant tout déçu d'avoir dû évoluer «devant 20 000 supporters yougoslaves et 8000 Suisses seulement». «Notre douzième homme nous a cruellement fait défaut ce soir», assure-t-il.

A propos du public, on a frisé la catastrophe, samedi, au Parc Saint-Jacques, lorsqu'une poignée de supporters yougoslaves fortement imbibés ont balancé nombre de fumigènes sur la pelouse avant de l'envahir au nez et à la barbe d'un service d'ordre dépassé parce qu'insuffisant en nombre. A l'origine de ces débordements, un but de Krstajic justement annulé pour hors-jeu par l'arbitre français Claude Colombo. Prenant la situation très au sérieux, celui-ci a alors décidé une interruption de la partie, menaçant à plusieurs reprises les responsables de la sécurité de renvoyer tout le monde au vestiaire. L'augmentation du nombre de Securitas, l'arrivée de grenadiers bâlois et… l'égalisation yougoslave ont toutefois permis le retour au calme. Il n'empêche. La Suisse ne s'est pas fait beaucoup de publicité dans l'optique de sa candidature à l'Euro 2008. Et de nombreux spécialistes de poser la question des grillages, absents au Parc Saint-Jacques.

Mais revenons au match. Köbi Kuhn a-t-il le sentiment de s'être fourvoyé en laissant sur le banc des garçons comme Stéphane Henchoz (vainqueur de cinq coupes ces derniers mois), stabilisateur génial de la défense suisse ou Ciriaco Sforza, à la forme étincelante? N'aurait-il pas fallu aussi commencer la partie avec, à la pointe de l'attaque, Stéphane Chapuisat au lieu d'un Kubi somme toute en dedans de ses possibilités malgré son «assist» sur le premier but? Et pourquoi avoir fait jouer le malheureux Bruno Berner à la place d'un Yvan Quentin qui, s'il n'est pas un joueur au talent exceptionnel, n'en fait pas moins preuve généralement d'une combativité sans faille? «J'ai pris mes responsabilités. J'assume mes choix», se contente de répondre le sélectionneur.

Reste à parler d'avenir. La Suisse affronte, mercredi, le Luxembourg. Puis elle se rendra à Moscou début octobre, pour y jouer contre la Russie. Deux matches pour beurre. «Nous ne balancerons pas, assure Michel Pont, l'adjoint de Köbi Kuhn. Nous avons formé un groupe pour l'avenir. Köbi va continuer avec. Objectif l'Euro 2004. Il s'agira désormais de maintenir la cohésion de l'équipe. De faire que celle-ci conserve son bon état d'esprit.» Gageons que la mission ne sera pas facile car il est probable que certains éléments ne manqueront pas d'affirmer que les choses se seraient sûrement passées différemment, à Bâle, s'ils avaient été sur le terrain.