504 jours plus tard, le coach Jérémy Chardy rejoue et gagne
Tennis
A l’Open d’Australie, le Français a remporté le premier match qu’il disputait depuis l’US Open 2021. Il était entre-temps sorti du classement ATP, devenu entraîneur de son compatriote Ugo Humbert qu’il pourrait affronter en huitièmes de finale

C’est l’histoire de ce début d’Open d’Australie. Jérémy Chardy, 35 ans, non classé (c’est à dire qu’il n’a aucun point ATP, alors que 1986 joueurs en ont actuellement au moins un), s’est qualifié mardi pour le deuxième tour de l’Open d’Australie en battant le 70e joueur mondial, le Colombien Daniel Galan, en quatre sets (1-6 7-5 6-1 6-4).
Bien sûr, Jérémy Chardy n’est pas n’importe qui. Le Pyrénéen a été classé 25e mondial au sommet de sa carrière en 2013, il a remporté une fois le tournoi ATP de Stuttgart et la Coupe Davis en 2017 avec l’équipe de France. Mais il n’avait plus joué de match officiel depuis près d’un an et demi, 504 jours précisément, depuis une défaite au premier tour de l’US Open. Il était alors 88e mondial et venait de se faire vacciner contre le Covid-19, un prérequis impératif pour entrer aux Etats-Unis.
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Quelques semaines plus tard, il devait mettre un terme à sa saison en raison d’une faiblesse générale et confiait son désarroi au Figaro. «Depuis ce vaccin, j’enchaîne les galères, je ne peux pas m’entraîner, je ne peux pas jouer. […] J’ai 35 ans en février et c’est la première fois que me traverse l’esprit l’idée que la saison prochaine est peut-être ma dernière.»
Il ne rejoua pas de toute la saison 2022. Lorsqu’il a commencé à aller mieux, il s’est blessé au genou lors d’un entraînement. «J’ai perdu un bout de cartilage», a-t-il raconté à Melbourne, décrivant une convalescence pleine de doutes et des périodes «mentalement très difficiles». «Du jour au lendemain, tu passes d’avoir plein d’objectifs, t’entraîner à... plus rien. Ta vie change du jour au lendemain...» Pour se changer les idées, et peut-être préparer la suite, Chardy, qui est depuis 2019 codirecteur du tournoi Challenger de Pau et impliqué dans le développement du circuit UTS imaginé par Patrick Mouratoglou, décide de devenir le coach d’un jeune talent français, Ugo Humbert.
«Le résultat, c’est le moins important»
«Ça m’a fait du bien, ça m’a gardé dans la compétition», explique-t-il avec le recul. Car son objectif prioritaire demeurait un retour sur le circuit, où il pouvait bénéficier d’un classement protégé pour entrer directement dans certains tableaux. Mais de là à débuter directement par l’Open d’Australie... «C’est un tournoi que j’ai toujours rêvé de jouer quand j’étais petit, ça m’a aidé à m’entraîner dur, à pousser chaque jour.»
Avouant être parfois allé très loin dans la douleur à l’entraînement, Jérémy Chardy était prêt physiquement à rejouer, beaucoup moins mentalement. «Je n’étais pas stressé, j’avais peur. C’était l’inconnu: je ne savais pas comment j’allais jouer, comment j’allais me sentir. J’avais l’impression de n’avoir jamais joué au tennis. Je ne savais pas comment servir, faire un coup droit, un revers, j’étais dans le noir... Et petit à petit, j’ai commencé à me sentir mieux, à trouver des repères, et voilà...»
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Mardi à Melbourne, Jérémy Chardy a d’abord souligné son plaisir à être redevenu un joueur de tennis. «Je ne savais même pas si je pourrais rejouer un jour, donc pouvoir être ici, en Grand Chelem, sur le court, jouer, m’entraîner, c’est juste du plaisir et du bonus. Je savoure chaque moment et le résultat est même le moins important.»
Son prochain adversaire sera le Britannique Daniel Evans (30e mondial). S’il poursuit sa route, il pourrait retrouver en huitièmes... Ugo Humbert, qui figure dans sa même partie de tableau. «Je n’ai vraiment pas envie de le jouer! Ce serait bien qu’on trouve un coach pour lui», a précisé Jérémy Chardy en promettant que «tant qu’il n’aura personne, je ne le lâcherai pas».