Federer prend son temps pour battre Cilic
Tennis
Entre coups de raquette et coup de gueule, le Bâlois sort vainqueur d’un duel de serveurs contre le Croate Marin Cilic (6-2 2-6 7-6 6-2). Il affrontera samedi au troisième tour l’Allemand Dominik Koepfer

On le sait, Roger Federer est venu à Roland-Garros pour préparer Wimbledon. Il a besoin de jouer des matchs, de les enchaîner, de se retrouver sous pression. Son objectif est déjà atteint puisqu’il jouera au moins trois fois à Paris, après sa victoire jeudi au deuxième tour contre le Croate Marin Cilic (6-2 2-6 7-6 6-2). Durant plus de 2h30, Federer a traversé tout ce qu’il ne peut pas vivre à l’entraînement: la tension, l’adrénaline, l’énervement aussi, la capacité à se surpasser quand il le fallait et à se rassurer sur ses possibilités.
Après son premier match: Roger Federer aura plus d’un tour dans son sac
On ne s’attendait pas à ce qu’il trouve sur la terre battue parisienne des conditions de jeu finalement assez semblables à celles du gazon londonien. Depuis le début du tournoi, plusieurs joueurs ont eu l’occasion de le dire: c’est très rapide. Ça l’est encore plus avec un Marin Cilic en face. Les deux joueurs se sont livrés à un duel de serveurs qui nous projetait presque avec un mois d’avance au All England, Church Road, SW19. Une statistique le confirme: la balle traversa en moyenne 2,78 fois le filet par point.
La terre, une surface rapide?
La plupart des points se jouèrent au service (16 aces pour Federer, 12 pour Cilic), au retour si la première balle n’était pas assez bonne. Les 11 points du tie-break du troisième set (7-4 pour Federer) se composent ainsi de: 5 aces, 1 double faute, 4 services gagnants et un seul échange (de 4 coups). S’il y eut assez peu de jeux (à l’exception du troisième set mais Federer aurait pu conclure bien avant le tie-break puisqu’il rata un coup droit facile qui lui aurait donné un double break à 4-1), il y eut beaucoup de points, d’égalités et de balles de break (16 pour Federer, 8 pour Cilic).
Lundi, Federer avait fait cette remarque intéressante à propos du jeu sur terre battue. «On n’est plus dans les années 1990, avec de longs échanges. Je regardais les statistiques au tournoi de Doha, et la durée de l’échange était en moyenne plus longue qu’un tournoi sur terre au Chili. Ici, quand il fait beau, si tu joues vers l’avant, si tu sers bien, tu peux utiliser le kick et l’amorti, tu peux toujours raccourcir un peu les échanges. Sauf si tu joues un Rafa [Nadal] ou un Novak [Djokovic] qui défendent comme des dingues.» Ce sera peut-être pour plus tard.
Cilic avait la même volonté d’aller vite. Le Croate fut parfois impressionnant mais finalement moins constant que son aîné (ils ont sept ans d’écart). «Je ne pensais pas tenir aussi longtemps contre un joueur de son niveau», se félicita Federer à la sortie du court.
Ce genre de match impose une concentration totale et ne provoque quasi aucune interaction avec l’adversaire. Federer et Cilic sont de vieux copains mais cela ne s’est absolument pas vu durant le match. Les deux hommes ont en commun deux finales de Grand Chelem, Wimbledon 2017 et Melbourne 2018 (les deux remportées par Federer) et, entre les deux, des vacances dans le même resort aux Maldives en novembre 2017. Il y a quinze jours, éliminés tous deux prématurément du tournoi de Genève, ils avaient échangé des balles au parc des Eaux-Vives. Federer avait pu constater que le Croate «frappe toujours aussi fort».
Federer énervé comme rarement
A Genève, il avait aussi compris l’importance de prendre plus de temps entre les points. «Sans le public, on enchaîne un peu vite, comme à l’entraînement», avait-il expliqué lundi après sa victoire au premier tour sur Denis Istomin. Il répliqua le même protocole jeudi mais eut la surprise, à 3-1 40-a service Cilic dans la deuxième manche, de recevoir un avertissement de l’arbitre pour dépassement de temps… en retour! Il était allé s’éponger le front au bord du court; avec les mesures anti-covid, les ramasseurs de balles n’ont plus le droit de toucher les affaires des joueurs.
Interloqué (il restait 14 secondes pour servir), Federer vint argumenter à la chaise durant de longues minutes, comme si rien d’autre n’importait. Enervé par cet incident, sur lequel il peina à passer l’éponge, il laissa Cilic égaliser à une manche partout. Il sut néanmoins se reprendre pour remporter une partie qu’il avait globalement dominée.
Son prochain adversaire sera l’Allemand Dominik Koepfer, 27 ans, 59e mondial, qui a sorti l’Américain Taylor Fritz en quatre sets (6-3 6-2 3-6 6-4). Les deux hommes ne se sont jamais rencontrés, mais Federer savait déjà l’essentiel avant même d’être sorti du court. «C’est un gaucher, moins puissant que Cilic. Ce sera un tout autre type de match.»