Dimanche soir, Rafael Nadal est resté longuement en conférence de presse, ce qui ne lui ressemble guère. L’Espagnol est revenu sur les conditions de sa victoire en finale sur Dominic Thiem (6-3 5-7 6-1 6-1), sur son douzième sacre à Roland-Garros, sur le prochain Wimbledon et la course au record de titres majeurs à laquelle il se livre avec Roger Federer et Novak Djokovic. Un mot revenait souvent: «gagner». Plus dans les questions de la presse internationale que dans les réponses de Nadal, que nous avons reprises par thèmes.

Gagner et s’écrouler sur le Central

Rafael Nadal: Ce n’était pas calculé, ça ne l’est jamais. C’est venu comme ça. C’est vraiment toute la tension qui part d’un coup. Les gens doivent penser que c’est facile pour moi de gagner ici, mais dans mon esprit, cela représente toujours quelque chose de très compliqué et je suis à chaque fois extrêmement heureux.

Gagner après être parti aux vestiaires (après la perte du deuxième set)

Tout d’abord, je suis parti aux vestiaires parce que je devais vraiment aller aux toilettes. Cela m’a permis de me calmer et de réfléchir. Thiem est l’adversaire le plus fort que j’aie affronté durant le tournoi cette année, cette finale a été le match le plus difficile. Il servait très bien et frappait vraiment fort. Il fallait que je m’améliore au retour pour ne pas me faire dominer dans l’échange. J’ai analysé les choses et compris que si je réglais ce problème, le reste allait suivre parce que mon jeu était bon.

Gagner en montant 27 fois au filet (pour 23 points remportés)

Normalement, si je monte au filet, je le fais dans de bonnes conditions. Et j’ai une bonne volée, non? Il était important de ne pas reculer face à Thiem parce qu’il est très puissant en coup droit et que son revers est très difficile à retourner. Le premier set était très intense, de très haut niveau, mais il n’était pas possible de continuer comme ça durant tout le match.

Lire aussi: Rafael Nadal, ou les douze «Roland» d’Hercule

Gagner chaque point comme si c’était la balle de match

Si c’était le cas, je perdrais plus souvent que je ne gagne, parce qu’on est toujours assez nerveux au moment de la balle de match. J’ai toujours joué avec beaucoup d’intensité, de passion, d’amour du sport. Et toutes ces blessures, souvent dues à mon style de jeu, n’ont en fait que renforcé ma passion pour le tennis. Chaque fois que je reviens, c’est avec plus d’envie.

Gagner après avoir perdu à Monte-Carlo, Barcelone, Madrid

Il y a encore quelques semaines, j’étais dans une situation très difficile. J’avais beaucoup de problèmes physiques et je ne parvenais pas à faire ce que je voulais sur le court. Avec le soutien de mon entourage, j’ai alors décidé d’y aller pas à pas, de prendre les choses positivement et de ne pas chercher à être performant tout de suite. A Barcelone et à Madrid [deux tournois où il a perdu en quart de finale], j’ai dit que je n’avais pas besoin de grands changements, juste de petits progrès. Pour progresser, mieux vaut avancer étape par étape et consolider chaque acquis. Et j’ai senti que je commençais à y parvenir il y a quatre semaines. Chaque semaine un petit peu mieux, chaque match un petit peu mieux. C’est comme ça que j’ai repris confiance.

Gagner après les blessures

Pas seulement cette année. La saison dernière avait déjà été difficile. Je n’avais disputé que neuf tournois, n’en avais fini que sept, et malgré cela je suis redevenu numéro un mondial et j’ai été tout près de gagner Wimbledon.

Gagner pendant quinze ans en faisant évoluer son jeu

Quand j’étais jeune, j’ai beaucoup entendu dire que je ne tiendrais pas, que mon jeu était trop simpliste. Ça ne m’affectait pas, je me disais: peut-être, peut-être pas. J’ai fait ma route et j’ai toujours trouvé mon chemin pour continuer à avancer.

Gagner Wimbledon

J’y ai très bien joué l’an dernier, passant tout près de la victoire [défaite 10-8 au cinquième set en demi-finale contre Novak Djokovic]. J’aime jouer sur herbe mais mon corps ne supporte plus de jouer trop de semaines à la suite. Je dois me ménager et planifier ma saison. Je n’ai pas besoin de disputer beaucoup de tournois sur herbe, juste quelques matchs.

Gagner plus de titres du Grand Chelem que Roger Federer

Roger en a 20, j’en suis à 18, Novak en a 15. Bien sûr, nous nous poussons mutuellement. J’ai dû manquer quinze tournois du Grand Chelem sur blessures. Où en serais-je sans ça? Mais je ne m’en plains pas. Je ne suis pas du genre à être frustré parce que mon voisin a une plus belle maison ou une plus grosse télévision. Ce n’est pas comme cela que je vois la vie.

Gagner et devenir le meilleur joueur de l’histoire

Battre le record de victoires en Grand Chelem est une motivation, mais pas une obsession. Ce n’est pas ce qui me fait me lever le matin, ni aller m’entraîner. Ce n’est pas non plus ma conception du sport [que de classer les sportifs]. Je veux suivre mon propre voyage, me donner les meilleures chances de gagner, et si, à la fin, je suis celui qui a le plus de titres, très bien. Mais je ne crois pas que ça changera ma vie de faire mieux que Federer ou moins bien que Djokovic. Je suis déjà allé bien plus loin que ce dont je rêvais quand j’étais enfant.

Lire également: Federer-Nadal, comme un ouragan