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Thomas Lüthi, l'année de trop en 125 cmc?

Le champion du monde bernois ne parvient pas à confirmer ses performances de la saison passée. Toujours pénalisé par une blessure à la clavicule, il a échoué dimanche à la 12e place du Grand Prix de Turquie.

Le Thomas Lüthi champion du monde tarde à montrer la bulle de sa Honda 125 cmc dans les premières lignes. Et ce n'est pas faute d'essayer. Sa fracture de la clavicule lors des essais de Barcelone avant le début de la saison aura été bien plus handicapante que prévu et le jeune espoir bernois a dû mettre un mouchoir sur ses ambitions 2006. Celui que tout un pays a porté aux nues est en difficulté et la course d'hier en Turquie n'a fait que remuer un peu plus le couteau dans la plaie. Le fait que Lüthi refasse une saison dans cette catégorie avait soulevé quelques doutes de la part d'observateurs avertis. «En 125 cmc, la lutte est plus acharnée. Il risque de galérer pour tenir son rang cette saison, et l'an prochain, il lui sera plus difficile d'obtenir un guidon digne d'un champion du monde lorsqu'il décidera de passer en 250 cmc» remarquait Hervé Poncharal, le responsable de Tech3, qui engage deux Yamaha en MotoGP. Mais la décision a été prise par Daniel Epp, le team manager qui le couve depuis ses débuts. «Tom doit encore prendre de l'expérience» disait-il. Aujourd'hui, tout le monde doit donc assumer ce choix, aussi difficile soit-il.

Car les choses ne se passent pas comme prévu et le champion accumule les contre-performances. A ce sujet, on a entendu à peu près toutes les excuses possibles. La préparation de la moto, tout d'abord, avec une vitesse de pointe bien loin des Aprilia et des KTM engagées dans ce championnat du monde 2006. Ce qu'est forcé de reconnaître Adi Stadler, le chef compétition de la marque japonaise, plus particulièrement chargé du jeune pilote de 19 ans. Il y a aussi cette blessure qui a tardé à cicatriser. «Nous avons peut-être sous-estimé les conséquences de ma chute, admettait Thomas Lüthi pendant les essais en Turquie. Je n'étais qu'à 80% mais maintenant tout est oublié. Regardons vers le futur».

Certes mais le pilote du team Elit doit secrètement regretter la saison dernière et son duel interminable avec le Finlandais Mika Kallio. Sur ce même circuit d'Istanbul, Tomas Lüthi n'avait pas gagné, mais il avait décroché la pole position et signé le meilleur tour officiel. Tout marchait comme sur des roulettes en quelque sorte. Aujourd'hui, tout semble à refaire, ce qui paraît logique dans une catégorie où l'évolution des machines reste déterminante. Faut-il pour autant remettre en cause le pilote? Lüthi était légèrement diminué, certes, mais il n'a rien perdu de son talent de pilotage. Sa façon de travailler n'a, a priori, pas changé. Le dévouement de son team non plus. Reste sa machine, largement dominée par la concurrence.

Pour ne rien arranger, la pluie qui s'est invitée lors du deuxième jour des essais n'a pas permis d'améliorer les premiers temps obtenus la veille. Thomas est donc parti de la troisième ligne à une seconde et six centièmes du meilleur temps de l'Espagnol Alvaro Bautista. Ensuite, il a bien tenté de s'accrocher dans le groupe de tête, pointant à une prometteuse sixième place en début de course. Lüthi comptait en fait beaucoup sur la finesse de son pilotage pour rester au contact des autres à l'aspiration. Mais tour après tour, la Honda No 1 a cédé du terrain. Aprilia réalise le triplé. Lüthi, lui, est trahi par la puissance de sa machine. Il franchit la ligne en 12e position à plus de 23 secondes d'Hector Faubel. Un résultat bien décevant, même si le pilote helvétique marque des points pour la deuxième fois de la saison et compte maintenant 12 points au championnat du monde.

Mais la différence technique de sa moto semble avoir une explication assez cohérente. Honda est nettement en retrait en ce début de saison, et pas seulement en 125. Contrairement à ses concurrents directs Aprilia ou KTM, le constructeur japonais n'a pas révolutionné sa machine 125 à l'intersaison. Ce n'est d'ailleurs pas son fort, lui qui préfère se consacrer à l'enjeu bien plus prestigieux de la MotoGP. «Chez Honda, on avance pas à pas» reconnaît-on à l'atelier. Et dans le plus grand secret bien sûr. Samedi, il se disait que de nouvelles pièces étaient arrivées pour le champion du monde en titre. Un nouveau cylindre ou peut-être autre chose. Thomas Lüthi est d'ailleurs resté muet comme une carpe. «Même moi je ne sais pas exactement de quoi il s'agit» déclarait le pilote. «Un nouveau cylindre? Oui, c'est possible! Mais il y a peut-être aussi autre chose». Difficile d'en savoir plus devant un stand fermé à double tour.

Après la course, Thomas évoquait un mauvais choix de pneu arrière et un manque de grip. «Ma blessure m'a pénalisé, a-t-il avoué. Je suis en manque d'essais et on a pris du retard». Reste maintenant à travailler d'arrache-pied pour que sa machine soit fin prête pour le Grand Prix de Chine le 15 mai prochain. A moins que ce ne soit tout simplement le mental du pilote qui soit touché... Comme une impression de déjà-vu.