A une semaine d’intervalle, le tennis suisse se sera affiché dans toute sa grandeur puis dans la plus complète modestie. Il y a quelques jours, Stan Wawrinka et Roger Federer s’affrontaient en demi-finale de l’Open d’Australie. De vendredi à dimanche, l’équipe nationale de Coupe Davis rencontre les Etats-Unis sans grand espoir de se qualifier pour le deuxième tour. Car, comme c’est le cas depuis qu’ils ont soulevé ensemble le saladier d’argent en 2014, ses deux héros ne seront pas là.

Ils sont loin d’être les seuls à manquer à l’appel du premier tour de la compétition par équipes. Des joueurs classés au top 10 du classement de l’ATP, il n’y aura que Novak Djokovic (numéro 2 mondial) avec la Serbie. L’équipe de France sera ainsi reçue par une formation japonaise privée de son leader Kei Nishikori. Une aubaine pour des Bleus eux-mêmes privés de Monfils (ATP 9, mis à l’écart) et Tsonga (ATP 13, qui attend la naissance de son premier enfant)? Peut-être. Mais le capitaine Yannick Noah s’agace, dans un entretien à l’AFP, de la situation globale.

«On est dans un monde de business où la tradition laisse la place peu à peu au profit, aux entreprises qui décident. Les arguments des joueurs du top 10 sont toujours économiques. Je persiste à penser qu’il peut y avoir le côté professionnel avec des tournois importants qui génèrent beaucoup de revenus et aussi un attrait pour une compétition où on représente une équipe dans un sport individuel, où on représente son pays dans un sport où habituellement on représente juste sa personne.»

L’argent? L’âge? La pression?

Dans des équipes nationales désertées par les meilleurs joueurs, ce sont parfois les capitaines les véritables stars, comme Jim Courier à la tête des Etats-Unis ou… Yannick Noah chez les Bleus. Qui en profite pour se faire le promoteur d’une participation obligatoire des meilleurs joueurs: «J’aurais le pouvoir, je les obligerais à jouer. Tu ne joues pas la Coupe Davis, tu ne joues pas les Grands Chelems. Ce serait très vite réglé! Encore une fois, les arguments qui sont avancés sont détournés. C’est une question d’argent.»

A la fin du mois de novembre dernier, Stan Wawrinka évoquait d’autres raisons en révélant qu’il ne serait sans doute pas au rendez-vous de la Coupe Davis en 2017. Son âge avance et il tient à se «donner les moyens de gagner les tournois auxquels il participe», quitte à alléger son programme par périodes. Ainsi, notamment, du mois de février: il n’a pas de tournoi prévu avant Indian Wells, début mars. Tant pis pour la Coupe Davis.

Performance unique dans l’histoire du tennis, Roy Emerson a remporté huit fois la compétition entre 1959 et 1967. L’été dernier, il confiait au Temps qu’il n’aurait jamais pu refuser une sélection en équipe d’Australie, «tant qu’on voulait bien de moi», et regrettait également que les plus grands joueurs ne soient plus systématiquement au rendez-vous. Tout en se mettant à leur place: «Vous savez, cela peut être une pression terrible de représenter son pays. Ces joueurs sont habitués au très haut niveau, mais pas à incarner les espoirs de tout un peuple, à devoir accepter l’idée que l’Australie – ou la Suisse, si vous préférez – dans son ensemble ait perdu par l’entremise de sa raquette. Alors, s’ils ne peuvent être dans des conditions idéales pour de telles rencontres, je peux comprendre qu’ils déclinent l’invitation.»

Il s’en trouve d’autres, moins célèbres, pour l’accepter avec plaisir et tenter de devenir des héros. Aux Etats-Unis, l’équipe de Suisse sera composée de Marco Chiudinelli, Henri Laaksonen, Adrien Bossel et Antoine Bellier.