La Suisse craint davantage d’autres concurrents que le Danemark
Organisations internationales
Les Emirats arabes unis et l’Inde lorgnent le siège de l’Union internationale des télécommunications, qui doit rénover ses bâtiments
La Suisse craint plutôt d’autres concurrents
Les délocalisations se multiplient au sein de la Genève internationale. Près de six mois après l’abandon du taux plancher avec l’euro par la Banque nationale suisse et le renchérissement du franc, les organisations internationales au bout du lac ont fait leurs comptes. Et ils ne sont pas favorables à la Suisse. Surtout pour les agences qui ont leurs revenus en euros ou en dollars mais doivent payer les salaires en francs suisses.
C’est le cas de l’Union internationale des télécommunications (UIT), 850 employés à Genève. Le directeur général, le Chinois Houlin Zhao, a appelé mardi les Etats membres qui paient leur contribution en euros à l’augmenter pour compenser l’appréciation du franc. Si elle n’est pas entendue, l’UIT n’envisage pas de délocalisation mais plutôt de réduire certaines activités. En revanche, les Etats membres ont demandé à ce que soient examinées d’autres options que la rénovation du siège de l’organisation, en particulier du bâtiment à la rue de Varembé. Cette proposition, portée par les Emirats arabes unis et l’Inde, n’est pas désintéressée, puisque les deux pays aimeraient faire déménager l’UIT chez eux.
Soutien renforcé à Genève
La tentative émiratie inquiète davantage la Suisse que les délocalisations de certains services, jugées périphériques et ne touchant pas le cœur de la Genève internationale. Ces prochaines années, d’autres bâtiments devront être rénovés. Le parlement a accepté mi-juin de renforcer le soutien à la Genève internationale, en débloquant 117,2 millions de francs pour les années 2016 à 2019. Il s’agit d’améliorer la sécurité des organisations internationales ou de favoriser l’installation de missions des petits pays pas encore représentés à Genève. L’aide aux rénovations sera surtout assurée sous la forme de prêts sans intérêt.
Face à ses concurrents, malgré sa cherté, Genève garde une bonne longueur d’avance. Aucune autre ville n’accueille en effet autant d’organisations internationales, d’ONG et de missions diplomatiques. Elles emploient plus de 28 000 personnes dans le canton.
La rémunération des fonctionnaires de l’ONU et de ses agences est indexée au coût de la vie local. «Un poste administratif à Copenhague coûte environ 40% moins cher qu’à Genève et une position de cadre 25% de moins», détaille Guy Avognon, représentant du personnel du Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR). C’est la raison pour laquelle le syndicat interne ne s’oppose pas au principe des délocalisations. «Le coût est un argument massue. Nous regrettons simplement que le HCR n’ait pas pris la peine de s’asseoir avec les Suisses pour trouver d’autres solutions. Car avoir un siège éparpillé en plusieurs lieux n’est pas un gage d’efficacité.»
«Des calculs biaisés»
«La comparaison des coûts entre les différentes villes hôtes est difficile. Les calculs sont parfois biaisés et nous demandons aux organisations de nous montrer leurs chiffres et leur méthode de comparaison», réagit Alexandre Fasel, l’ambassadeur suisse auprès des Nations unies à Genève, en première ligne de la défense de la Genève internationale. L’automne dernier, la Suisse avait réussi à convaincre l’Unicef de ne pas transférer 100 emplois supplémentaires à Copenhague. L’Etat hôte ne s’était pas aligné sur l’offre danoise, mais avait accepté que le bail de l’Unicef soit renégocié à la baisse. «Nous serons toujours prêts à faire des efforts si une organisation internationale veut rester à Genève et a des difficultés. Mais il n’est pas question de les acheter», tranche Alexandre Fasel.