Les Suissesses et le Suisses se mobiliseront une nouvelle fois le 14 juin, trente ans après la première grève des femmes en 1991. «Nous nous attendons à une mobilisation massive car nous sommes fâchées par de nombreux sujets», indique Tamara Knezevic, militante de la Grève féministe et secrétaire syndicale à Unia Vaud, interrogée par Keystone-ATS.

«L’inégalité salariale s’est creusée»

Les principaux rassemblements sont prévus à 18h00 avec des manifestations dans les grandes villes du pays. L’autre temps fort de la journée est programmé à 15h19, heure symbolique à laquelle les femmes cessent d’être rémunérées par rapport aux hommes. Diverses actions se dérouleront à cette heure précise, comme à Lausanne où des travailleuses prendront la parole sur la nouvelle place du 14-Juin. «Cette heure symbolique est passée de 15h24 l’an dernier à 15h19. L’inégalité salariale s’est donc creusée, principalement en raison de la crise du coronavirus qui a beaucoup impacté le travail des femmes», explique Tamara Knezevic.

D’autres actions sont prévues tout au long de la journée, initiées par les différents collectifs cantonaux: pique-niques dans les parcs de Genève et à Delémont, stands et lectures féministes à Neuchâtel, La Chaux-de-Fonds ou Fribourg, promenade «inclusive» à Bienne.

Le programme démarrera parfois avant le 14 juin, comme en Valais où un mini-festival est prévu à Sion, Martigny et Monthey. Une soirée sera notamment dédiée aux courts-métrages et documentaires de cinéastes valaisannes, une autre aux actrices du changement.

Le collectif vaudois se réunira dès le 13 juin au Théâtre 2.21 à Lausanne avec divers ateliers et le lancement d’une radio féministe en continu. La mobilisation vaudoise se poursuivra le lendemain dans tout le canton, notamment à Yverdon, Nyon et Vevey.

Mobilisation contre l'augmentation de l'âge de la retraite

Discutée cette semaine aux Chambres fédérales, la réforme de l’AVS, qui prévoit d’augmenter à 65 ans l’âge de la retraite pour les femmes, sera particulièrement combattue le 14 juin. «S’il le faut, nous irons jusqu’à lancer un référendum aux côtés de la gauche radicale et des syndicats. Cela serait une première pour le mouvement de la Grève féministe», remarque Tamara Knezevic.

Les violences sexuelles et sexistes figureront aussi au coeur de la mobilisation du 14 juin, notamment dans le cadre de la révision actuelle du droit pénal. D’autres thématiques seront abordées durant la journée, comme la répression des mouvements sociaux, précise Tamara Knezevic.

Trentième anniversaire d'une mobilisation historique

Cette journée d’actions permettra aussi de fêter les 30 ans de la première grève suisse des femmes, organisée le 14 juin 1991. L’idée était partie à l’époque d’un groupe de travailleuses de l’industrie horlogère à la Vallée de Joux (VD), en colère de voir leur salaire inférieur à celui des hommes.

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L’une des initiatrices du mouvement, Liliane Valceschini, avait alors approché la syndicaliste et future cheffe du Parti socialiste Christiane Brunner. La Genevoise avait pris les choses en main et convaincu l’Union syndicale suisse (USS) de lancer une grève nationale. Celle-ci avait connu un écho considérable et 500 000 Suissesses avaient fait grève le 14 juin.

La mobilisation s’est poursuivie les années suivantes, jusqu’à l’organisation d’une nouvelle grève des femmes le 14 juin 2019. Elle avait à nouveau vu déferler une vague violette sur toute la Suisse avec des centaines de milliers de manifestantes. L’opération avait été reconduite en 2020, mais avec une participation moindre en raison de la crise du coronavirus.

«La lutte des premières grévistes a été exemplaire. Elle a permis d’obtenir plusieurs acquis sociaux comme le congé maternité», relève Tamara Knezevic. Elle note toutefois «une rupture» par rapport aux premières militantes, le mouvement actuel s’étant davantage construit hors du système institutionnel. Elle remarque aussi que la Grève féministe permet aujourd’hui «une convergence des luttes», notamment avec les militants écologistes ou LGBTIQ+.

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