Dis papa, c’était mieux avant, les nuits genevoises? A cette interrogation essentielle que tout adolescent en quête de palpitations crépusculaires et d’interactions sociales diverses se pose, le collectif «pour une vie nocturne riche, vivante et diversifiée» qui vient de voir le jour à Genève pourrait lui apporter des esquisses de réponses. Réunissant sous la même bannière 35 associations de jeunes, ce collectif «sans couleur politique particulière» vise d’abord à dynamiser la vie nocturne pour ces oubliés de la nuit que sont les 16-18 ans.

La disparition des lieux alternatifs (les squats, Artamis), l’augmentation des prix, le manque de places et l’interdiction d’entrée qui frappe les plus jeunes aux portes de plusieurs bars du canton (dont ceux de la désormais célèbre rue de l’Ecole-de-Médecine) poussent cette tranche d’âge à préférer les parcs, les trottoirs ou les préaux d’école pour se réunir. «Avec toutes les dérives que cela peut engendrer dont le binge-drinking [ndlr, biture express en mauvais français, beuverie effrénée pour les puristes de la langue]», constate Adrien Rufener, 22 ans et déjà membre d’un comité exécutif, celui du collectif. «Suite aux pressions et menaces d’amende, de nombreux établissements ont relevé leur limite d’âge de 16 à 18 ans, explique ce dernier, regrettant que l’apprentissage de la vie nocturne se tienne en dehors du cadre des lieux de sociabilité.»

Suppression de l’interdiction d’entrée pour les moins de 18 ans

Pour tenter d’améliorer le sort de ces jeunes, partiellement privés de lieux de sortie, le collectif vient de lancer une pétition clairement rédigée à l’attention des autorités cantonales et communales. En quatre points, le texte réclame de supprimer l’interdiction d’entrée dans les bars aux moins de 18 ans, d’autoriser tous les établissements à pouvoir ouvrir leurs portes jusqu’à 2h du matin sans demande préalable au Service du commerce, mais aussi d’encourager la mise à disposition de locaux cantonaux ou communaux à prix réduits ainsi que de planifier la construction de lieux nocturnes au sein des futurs projets urbains du canton. «Notre démarche vise aussi à améliorer l’image des jeunes, ajoute Adrien Rufener. Elle démontre que nous pouvons être responsables.»

La démarche sera-t-elle entendue? Très probablement, puisque les députés se saisiront ce jeudi de la nouvelle loi du Conseil d’Etat sur la restauration, le débit de boissons, l’hébergement et le divertissement (LRDBHD), laquelle vient de sortir des classeurs de la Commission de l’économie.

«Il est temps de réagir avant de finir comme Lausanne»

Aux yeux du président des cafetiers-restaurateurs, l’initiative est vivement saluée. «A Genève, on est passé des squats à rien du tout. Il faut absolument trouver d’autres lieux que des trottoirs ou des parcs pour ces jeunes. Faute de quoi, nous aurons les mêmes problèmes que rencontre la ville de Lausanne», milite Laurent Terlinchamp. Quant à l’interdiction d’entrée de certains établissements envers les 16-18 ans, ce dernier estime qu’il s’agit d’une mesure indispensable de protection des plus jeunes. «On ne peut ni demander à chaque client de nous montrer sa carte d’identité ni vérifier si le verre d’alcool fort sera bien consommé par la personne qui nous l’a commandé», argumente l’intéressé.