Que de chemin parcouru pour sceller, mardi à Berne, l’Alliance rail-route Arc lémanique - Tessin! «En juin, une telle alliance n’allait pas de soi», confie Christophe Reymond, directeur du Centre patronal. Après s’être observées avec méfiance par-dessus la chaîne alpine, les organisations économiques lémaniques et tessinoises roulent désormais de front pour défendre leurs projets de transport, principalement routiers.
«Lorsque le projet de deuxième tunnel routier au Gothard a été annoncé, les réactions ont été très vives en Suisse romande», se souvient Christophe Reymond. Les milieux lémaniques y voyaient une concurrence pour le nouveau contournement de Morges, l’élargissement de la ceinture routière genevoise entre Nyon et Bardonnex et, éventuellement, la traversée du Léman.
La ministre des Transports, Doris Leuthard, s’est évertuée à expliquer qu’il n’y avait pas de concurrence, car la construction d’un nouveau tunnel au Gothard et l’assainissement de l’ancien sont un projet d’entretien alors que les autres projets consistent à éliminer des goulets d’étranglement. Rien n’y a fait, car, en fin de compte, l’argent vient de la poche de l’usager de la route.
Romands et Tessinois ont donc décidé d’enterrer la hache de guerre, ou plutôt de ne pas la déterrer. «Nous sommes des frères latins mais lointains. Or, la guerre des régions a trop marqué la politique des transports», argumente Filippo Lombardi, conseiller aux Etats et militant d’un deuxième tube routier au Gothard. Un projet qui ne fait pas l’unanimité au Tessin: mardi également, 17 organisations régionales pour l’environnement ont pris position contre sa réalisation.
Hausse de la surtaxe
Mardi, dans le cadre de cette alliance, les milieux économiques genevois, vaudois et tessinois ont signé une plateforme commune en huit points, dont l’élément central est la création d’un fonds d’infrastructure routière à l’image du Fonds d’infrastructure ferroviaire (FIF) dont le Conseil des Etats vient d’approuver la création (LT du 30.11.2012).
Ce fonds routier serait alimenté par les recettes de la vignette, de la taxe et de la surtaxe sur les carburants. Ces dernières sont actuellement réparties entre les besoins de la route, le financement des transports publics et la caisse fédérale. Christophe Reymond, c’est plutôt inhabituel, «entrerait en matière» sur une éventuelle hausse de la surtaxe sur les carburants pour alimenter ce fonds afin de disposer de l’argent nécessaire.
Cela n’ira pas de soi, car il est déjà prévu de faire passer le prix de la vignette de 40 à 100 francs pour financer la reprise de 400 kilomètres de routes cantonales par la Confédération. Il faut cependant rappeler que le prix de l’assainissement du Gothard avec percement d’un nouveau trou est estimé à 2,7 milliards, soit autant que le nouvel évitement de Morges. Il faudra donc bien de nouvelles ressources.
Le patron des patrons romands assure que l’alliance «n’est pas un Sonderbund latin dirigé contre la Suisse alémanique». Christophe Reymond compte bien aller convaincre les Zurichois de la rejoindre, en mettant en avant les projets autoroutiers de leur région qui sont également en quête de financement.