A Bellinzone, l’avocat de l'ancien chef rebelle Alieu Kosiah dénonce de grossiers mensonges
Justice
Ce jeudi, le défenseur de l’ancien chef rebelle Alieu Kosiah a réfuté les crimes reprochés à son client, faisant valoir l'«absence de crédibilité» des plaignants et un dossier «construit de toutes pièces». Le Tribunal pénal fédéral de Bellinzone devrait rendre son verdict ce printemps

Dernière ligne droite dans le procès historique d’Alieu Kosiah à Bellinzone. L’avocat de l’accusé, Me Dimitri Gianoli, s’est attelé jeudi à passer au peigne fin les déclarations des sept plaignants entendus ces dernières semaines. Des plaignants qui avaient attribué à l’accusé, ancien commandant du groupe armé Mouvement uni de libération pour la démocratie au Liberia (Ulimo), des crimes commis dans le comté de Lofa entre 1993 et 1995 lors de la première guerre civile qui a ensanglanté le pays (1989-1997).
Dans le cadre de ce premier procès en droit pénal international mené par le Tribunal pénal fédéral (TPF), le prévenu fait face à 25 chefs d’accusation, dont le recrutement d’un enfant soldat, des transports forcés, des pillages, des traitements cruels de civils, des meurtres, des actes de cannibalisme et des viols.
Origine ethnique en jeu
Alieu Kosiah, qui nie en bloc ces accusations, a été «ciblé» à cause de son origine ethnique mandingue, a plaidé Me Gianoli, en assurant que son client n’était pas dans le comté de Lofa entre 1993 et 1995 lorsque les crimes présumés qui lui sont reprochés ont été perpétrés. Et ce, alors que les témoins de la défense ont déclaré la semaine dernière que le chef rebelle y était à ce moment-là.
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Pour démontrer l'«absence de crédibilité» des victimes, Me Gianoli a fait valoir «les incohérences, les contradictions, ainsi que les versions multiples, divergentes et incompatibles entre elles» qui auraient émergé entre les divers récits et auditions de ces mêmes plaignants. «Ces versions multiples d’un même événement s’expliquent par le fait qu’ils n’ont pas été vécus. Ces récits ont été inventés de toutes pièces», a-t-il martelé. Durant la plaidoirie, assis aux côtés de son défenseur, Alieu Kosiah a par moments vigoureusement opiné de la tête.
Attaques contre une ONG
L’avocat a déploré de «grossiers mensonges» et des «témoignages préparés avec l’aide de professionnels pour coller à la réalité historique ainsi qu’augmenter leur propre crédibilité et celle des autres plaignants, afin de corroborer des accusations mensongères». Et de reprocher aux associations Civitas Maxima et Global Justice and Research Project (GJRP), qui ont aidé les victimes à porter leur cause devant les tribunaux, d’avoir «construit un dossier».
Me Gianoli a ensuite décrit la personnalité de son client, un homme «sérieux, fiable, avec un sens moral et des valeurs, dont la dignité humaine». Une personne «au comportement exemplaire en prison», précisant que sa collaboration avec la justice a toujours été excellente et ses déclarations sont demeurées les mêmes: «Quand on dit la vérité, il n’y a pas de contradictions.»
Les jours précédents, les avocats des parties civiles avaient demandé une compensation de 8000 francs pour chacun des sept plaignants. Ils ont insisté sur la véracité et la convergence des témoignages des victimes, répétant qu’Alieu Kosiah était coupable de tous les crimes dont il est accusé. Lundi, le procureur Andreas Müller a requis 20 ans de prison contre le prévenu, ainsi que son expulsion du pays pour 15 ans.
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Premier ressortissant libérien à être jugé pour des crimes de guerre présumés commis pendant la première guerre civile au Liberia, Alieu Kosiah, qui a eu 46 ans mercredi, s’est réfugié en Suisse en 1997 lorsque Charles Taylor est devenu président du Liberia. Un an plus tard, il a obtenu le droit de résider en Suisse en se mariant. En 2014, il a été arrêté et se trouve, depuis, en détention provisoire à Berne. Le verdict devrait tomber ce printemps.