Le projet de modification de l’ordonnance sur le service civil constitue une attaque sans précédent contre un droit constitutionnel et doit être rejeté, ont dénoncé la Fédération suisse du service civil (CIVIVA), l’organisation Männer.ch et le Conseil suisse des activités de jeunesse en conférence de presse ce lundi. L’objet de leur courroux: le catalogue de mesures dissuasives annoncées par le Conseil fédéral au mois de juin dans le but de garantir un personnel suffisant à l’armée et de réduire le nombre de demandes d’admission au service civil. Lancée cet été, la consultation des milieux concernés prendra fin en octobre 2018.

«Une augmentation problématique»

Le nombre annuel d’admissions au service civil est en augmentation constante. De 4670 en 2011, elle est passée à 6785 en 2017. «Problématique», selon le Conseil fédéral à majorité bourgeoise, qui propose plusieurs changements législatifs destinés à limiter l’enthousiasme croissant pour cette filière. Le gouvernement souhaite par exemple instaurer un nombre minimum de 150 jours de service civil, qui remplacerait la règle actuelle qui veut qu’un soldat accomplisse une fois et demi le temps qu’il lui reste au moment de quitter les drapeaux. Douze mois d’attente seront par ailleurs obligatoires pour passer d’un système à l’autre, sans pour autant être libéré de l’obligation de servir dans l’intervalle.

Autres changements, les médecins ne pourraient plus faire de service civil à des postes de médecin, les cadres militaires perdraient certains avantages liés au plus grand nombre de jours déjà effectués sous les drapeaux et les militaires qui ont rempli toutes leurs obligations ne pourraient plus changer de système. Cette dernière modification vise notamment à prévenir un changement de système destiné à se soustraire aux tirs obligatoires. Le projet prévoit par ailleurs d’introduire une obligation de terminer la première période de service civil dans l’année suivant l’admission et d’effectuer au minimum une période de service par année.

«De l’acharnement»

Coprésidente de la CIVIVA et conseillère nationale verte, Lisa Mazzone dénonce «un acharnement sans fondement»: «Les civilistes sont déjà pénalisés puisqu’ils doivent effectuer une fois et demi le nombre de jours prévu à l’armée, dit la Genevoise. En outre, ils vont statistiquement plus souvent au bout de leur obligation que les militaires et font donc largement plus de jours que leurs homologues. Je rappelle également que le nombre de personnes déclarées inaptes est bien plus important que celui des admis au service civil. Et les civilistes jouent un grand rôle pour la collectivité.» Aux mesures dissuasives du Conseil fédéral, la Genevoise souhaiterait au contraire que le service civil soit «amélioré», notamment qu’il s’ouvre aux femmes et aux étrangers.

Sempiternelle pomme de discorde entre partisans de l’armée et civilistes, la pénibilité du service militaire ne constitue par ailleurs pas un bon argument pour le comité en faveur d’un référendum, selon qui «le civiliste travaille, parfois de manière très astreignante, et organise chacune de ses affectations sur son temps libre, ce qui nécessite également beaucoup de temps et d’efforts contrairement à la simple réception d’un ordre de marche». Ces arguments persuaderont-ils la population? Les partisans d’un référendum jugent que oui. Confiants, ils estiment que le grand nombre d’institutions qui bénéficient du travail des civilistes suffirait.

Femme, militaire, de droite et pour un référendum

La gauche politique n’est pas seule au chevet du service civil. Pour la conseillère nationale Rosmarie Quadranti (PBD/ZU), également membre de la CIVIVA, le gouvernement a «perdu sa vue d’ensemble». Il est inadmissible de vouloir résoudre les problèmes de l’armée en les reportant sur le service civil alors que tous deux accomplissent des tâches importantes, souligne celle qui a elle-même porté la tenue de combat. «Une approche globale est nécessaire, conclut la Zurichoise. Sinon, même en tant que femme, de droite et ancienne militaire, je soutiendrai un référendum.»