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Le lobby antispéciste interpelle le Conseil fédéral

Face à l’épidémie de coronavirus, une coalition animaliste réunissant politiques et militants demande aux autorités de réduire la production de viande en Suisse

Halle d’élevage de poulets Optigal à Villars-le-Comte dans le canton de Vaud. — © David Wagnières
Halle d’élevage de poulets Optigal à Villars-le-Comte dans le canton de Vaud. — © David Wagnières

L’épidémie de coronavirus est propice aux revendications. Ce jeudi, c’est une coalition réunissant politiques et militants de la cause animale qui a adressé son catalogue de doléances au Conseil fédéral. Compte tenu du «lien indéniable entre les nombreuses zoonoses et épizooties meurtrières et l’exploitation animale», les antispécistes demandent aux autorités d’orienter les politiques publiques vers une «baisse conséquente de la production et de l’importation» de viande en Suisse.

Face à l’épidémie de coronavirus, le lobby animaliste demande au Conseil fédéral de repenser notre modèle alimentaire. «Les virus transmis par les animaux en raison de l’activité humaine s’intensifient, affirme Catherine Santoru, fondatrice et coprésidente de la Coalition animaliste. Face au risque sanitaire pour la population, le gouvernement ne peut pas ignorer les causes principales. Au-delà de la déforestation, de la disparition de la biodiversité, c’est bien la maltraitance, la consommation, l’élevage et le commerce d’animaux qui jouent un rôle clé.»

Sensibilisation à l’éthique animale dans les écoles, campagne nationale pour une alimentation végétale, aide à la reconversion pour les éleveurs ou encore renforcement de l’économie locale: la lettre ouverte s’accompagne d’un vaste catalogue de mesures. Parmi les 17 signataires, on trouve l’association Stop Gavage Suisse, l’Alliance Animale Suisse, mais aussi des élus verts et Vert’libéraux.

Amorcer un virage

Conseiller municipal en ville de Genève, Dominique Tinguely est l’un des membres fondateurs de la coalition animaliste. Si l’idéologie antispéciste n’est pas partagée par l’ensemble du parti, l’élu la considère comme un combat parallèle à la préservation de l’environnement. «La crise actuelle est révélatrice des dégâts engendrés par l’exploitation animale, déplore-t-il. Il est temps de remettre en question notre consommation de viande pour des raisons à la fois sanitaires et environnementales.»

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Une avalanche de revendications, dont certaines impliqueraient de réduire aujourd’hui, voire de renoncer un jour, à la pratique de l’élevage en Suisse, prioritairement de l’élevage intensif. N’est-ce pas irréaliste? «Il est évident que le changement ne viendra pas du jour au lendemain, reconnaît Catherine Santoru. Il s’agit d’amorcer un virage dans la bonne direction. Il y a une cohérence dans les mesures qu’on propose; comment penser une autre alimentation sans sensibiliser la jeune génération dans les écoles?»

Outre les actions nationales, la lettre demande également au Conseil fédéral d’intervenir auprès d’autres Etats. «L’exploitation animale est un problème global, la Suisse ne pourra bien sûr pas agir seule, en revanche elle peut montrer l’exemple en demandant officiellement l’interdiction des marchés d’animaux sauvages et de l’élevage intensif», estime Catherine Santoru. Pour la coalition, le premier pas reste néanmoins la «reconnaissance publique» du lien entre zoonoses et exploitation animale.

Exigences sanitaires

De son côté, l’interprofession suisse de la filière viande déplore que les «antispécistes profitent de la crise actuelle» pour faire valoir leurs revendications. «Selon les connaissances scientifiques actuelles, le Covid-19 n’a rien à voir avec l’élevage d’animaux de ferme, et certainement pas avec l’élevage de bétail en Suisse», tance la porte-parole de Proviande, Regula Kennel, qui refuse que la production indigène soit associée aux termes «d’abattage massif d’animaux, d’exploitation et de maltraitance».

Elle reconnaît néanmoins que la lutte contre les maladies d’origine animale doit se faire de manière préventive, notamment en garantissant des conditions sanitaires irréprochables dans les élevages. «Ce standard, dans l’intérêt de tous les détenteurs d’animaux ainsi que des autorités, est déjà promu et exigé à tous les niveaux en Suisse, poursuit Regula Kennel. En termes de santé animale et de statut des maladies animales, la Suisse occupe une excellente position sur le plan mondial. Cela dit, les agents pathogènes ne s’arrêtent pas aux frontières, que nous importions de la viande ou non.»

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