Pierre-Alain Schnegg, d’une PME d'informatique au Conseil d’Etat bernois
Elections
L’UDC Pierre-Alain Schnegg est le favori de l’élection complémentaire au gouvernement bernois, le 28 février, pour succéder au socialiste Philippe Perrenoud. Il veut tailler dans le gras de l’administration

Il devrait être, le 28 février, le premier conseiller d’Etat bernois UDC francophone. Pierre-Alain Schnegg, 53 ans, est le favori pour l’élection du successeur du socialiste Philippe Perrenoud, titulaire du siège gouvernemental réservé au Jura bernois depuis 2006 qui, épuisé après dix ans au pouvoir, rend son tablier à mi-législature. Son principal concurrent, le socialiste Roberto Bernasconi, peine à convaincre.
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Pierre-Alain Schnegg reçoit chez lui, à Champoz, bourgade bucolique de 160 habitants surplombant Moutier et la vallée de Tavannes. L’enfant de Bévilard est néophyte en politique. Il s’est fait un nom comme entrepreneur à succès. Parti de rien et d’un apprentissage d’employé de commerce, il prend une option visionnaire à 19 ans et devient ingénieur en informatique de gestion.
En 1987, Pierre-Alain Schnegg lance sa société de logiciels de gestion. Quatre personnes au départ, 145 collaborateurs en 2014. Il obtient en 2004 le titre d’«entrepreneur of the year» décerné par Ernst&Young.
Président de l’Hôpital du Jura bernois
Père de quatre enfants adultes, le patron de PME à succès opère un virage en 2014. Il vend sa société à un fonds d’investissement américain, conserve quelques mandats et opte pour la politique. Il y avait déjà mis un pied à partir de 2009, en présidant la société parapublique de traitement des déchets de sa région qu’il assainit, et en intégrant le conseil d’administration de l’Hôpital du Jura bernois, qu’il préside actuellement.
En mars 2014, il est élu au Grand Conseil bernois et au Conseil du Jura bernois. «J’ai toujours été proche des idées du bloc bourgeois. Ce qui me plaît à l’UDC, ce sont ses affinités libérales, conservatrices et son bon sens paysan.» Cette description lui correspond parfaitement.
Pragmatique et efficient
Peut-être avait-il une autre vision du libéralisme en 1992, lorsqu’il acceptait l’adhésion de la Suisse à l’Espace économique européen. Mais en 2013, il a voté l’initiative de l’UDC «contre l’immigration de masse». «Je suis favorable à une immigration en phase avec les besoins de l’économie. Il faut trouver une formule pragmatique.» Le pragmatisme est une autre qualité reconnue de l’entrepreneur Schnegg.
Tout comme l’efficience. Qu’il entend transposer à l’administration publique. Il l’a testée à l’Hôpital du Jura bernois, «où nous avons réduit les coûts d’administration et d’état-major. Quand on parle d’économies, on vise les prestations. Il faut d’abord s’attaquer au gras d’organisations administratives dont on ne se demande jamais si elles sont utiles et s’il n’y a pas de meilleurs moyens d’effectuer le travail.»
Là au bon moment
La compétence entrepreneuriale et la franchise de Pierre-Alain Schnegg sont unanimement saluées. Tout au plus lui reproche-t-on son manque d’expérience en politique, jalouse-t-on une ascension fulgurante qu’il dit «ne pas avoir planifiée. J’ai la chance d’être là au bon endroit et au bon moment.» L’opportuniste Pierre-Alain Schnegg, qui porte le costume, mais avec le nœud de cravate mal ajusté et des Crocs aux pieds, semble paré pour relever le défi gouvernemental. Rien n’altère son humeur égale, sa capacité à avoir une réponse raisonnable à tout. Certes, il sert, sans excès, le discours rodé de l’UDC. En usant d’un sourire discret pour inspirer la confiance. Mais en gardant bonne distance, trahissant une méfiance caractéristique des gens réservés du Jura bernois.
Pierre-Alain Schnegg ne manque pas de décontenancer en revendiquant la patate chaude gouvernementale, la Direction de la santé et de la prévoyance sociale, qui a valu tant de misères à Philippe Perrenoud. «J’aime les défis», dit le successeur annoncé, voulant clarifier les rôles des hôpitaux: la médecine de pointe à l’Ile à Berne, les prestations de base dans les régions, une diminution des neuf sites d’urgences en ville de Berne. A l’aide sociale, il entend «en finir avec l’arrosoir. Les prestations sociales, comme les subsides aux primes maladie, doivent aller à ceux qui en ont vraiment besoin et ne pas être une prime à la fainéantise.»
Contre le départ de Moutier
Pour autant qu’il l’emporte le 28 février, sitôt entré en fonction le 1er juillet, Pierre-Alain Schnegg devra gérer l’indécise votation d’autodétermination de Moutier, en juin 2017. Il est un farouche adversaire de son transfert cantonal. «Personne n’y gagnera. Ni Moutier, ni les francophones bernois et je doute même que le canton du Jura ait quoi que ce soit à profiter de l’arrivée de Moutier. Il s’agit de le démontrer aux quelques centaines de Prévôtois qui n’ont pas encore choisi leur camp. Le gouvernement bernois doit faire campagne.»
S’exprimant en allemand, comprenant le dialecte, se disant «surpris par le nombre d’Alémaniques bernois qui s’expriment en français, ce qui démontre que ce canton est réellement bilingue», Pierre-Alain Schnegg souhaite contribuer à changer la culture politique de son canton. «On le raille trop souvent alors qu’il doit être un pont et un moteur de la Suisse. Je m’investirai pour qu’il n’ait plus besoin de recevoir autant de la péréquation fédérale, alors que jusqu’ici, on s’est trop facilement satisfait de cette manne.»