La police fédérale bloque l’enquête interne de La Poste
Bénéfices illicites
Selon la «SonntagsZeitung», les experts nommés par La Poste dans l’affaire CarPostal ne peuvent plus auditionner de nouveaux témoins, afin d’éviter d’entraver la procédure pénale. Les premières conclusions, attendues pour fin avril, seront retardées

Une multitude d’experts auscultent actuellement le scandale des bénéfices illicites d’au moins 100 millions de francs chez CarPostal. Dans ce déploiement d’enquêtes rarement observé, la Confédération vient de prendre la main. Dimanche, la SonntagsZeitung annonçait que la procédure pénale lancée par la police fédérale (fedpol), fin février, l’emporterait sur toutes les autres investigations en cours. Conséquence: les experts nommés par la direction de La Poste n’ont plus le droit de requérir ou de transmettre de nouveaux documents ni d’interroger de témoins, pour éviter tout risque d’influence. Le président du conseil d’administration, Urs Schwaller, espérait obtenir des premières conclusions d’ici à fin avril. Ce délai est aujourd’hui compromis. Selon la porte-parole de fedpol, une enquête administrative pénale «peut prendre des années si toutes les voies légales sont épuisées».
La Poste tente de résister
Face à ce que certains voient comme une mise sous tutelle, La Poste tente de résister tout en faisant bonne figure. «Nous respecterons bien entendu les instructions de fedpol, précise au Temps sa porte-parole Léa Wertheimer. Sans être autorisés à élargir leur champ d’investigation, les experts de Kellerhals et d’Ernst & Young que nous avons nommés peuvent continuer à travailler sur la base des quelque 300 000 documents récoltés avant le 27 février, jour du lancement de la procédure pénale. Idem pour les contrôleurs indépendants chargés de superviser l’avancée des travaux.»
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«Ce retard ne change pas l’objectif»
Pressée de regagner la confiance de la population après le dégât d’image causé par l’affaire, La Poste doit aujourd’hui ralentir le pas et attendre l’autorisation de fedpol pour publier ses résultats. «Ce retard ne change pas l’objectif, précise Léa Wertheimer. Peu importe quelle instance prend le dessus. Si fedpol peut nous aider à faire toute la lumière sur les faits et à établir les responsabilités, tant mieux.» Urs Schwaller maintient sa volonté de transparence, «seul moyen de regagner la confiance des usagers».
«Des priorités à respecter»
Qu’en pensent les politiques, qui n’ont pas pu auditionner Urs Schwaller lundi en Commission des transports comme ils le prévoyaient? «Il y a des priorités à respecter, estime le conseiller national socialiste Jacques-André Maire. Avec la dimension pénale que prend l’affaire, la curiosité des politiques passe au second plan.» Celui qui avoue avoir été un peu surpris sur le moment ne se sent pas frustré pour autant. «Le travail d’analyse politique viendra, en temps voulu, interroger les mécanismes de contrôle. Le mandat des réviseurs externes a-t-il été respecté, l’organisation de l’entreprise est-elle adéquate? Tout reste ouvert pour tenter de comprendre comment de telles malversations ont pu passer inaperçues durant plus de huit ans.»
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