Jeudi prochain, la Commission des institutions politiques (CIP) du Conseil national se réunit pour reprendre ses travaux sur la mise en œuvre de l’initiative populaire «Contre l’immigration de masse». Elle n’a sur son bureau que le plan B du Conseil fédéral: l’instauration unilatérale de contingents et de plafonds pour gérer l’immigration.

Avant jeudi, l’espoir de négocier un plan A avec l’Union européenne demeurait. Après le référendum britannique, cet espoir s’est éteint. Certes, Jacques de Watteville ira à Bruxelles lundi, comme prévu. Certes, le Conseil fédéral dira qu’il espère toujours parvenir à un accord durant l’été. Mais la Suisse trouvera-t-elle une petite place dans les préoccupations des instances européennes après le séisme politique déclenché par le Brexit? On peut en douter.

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Et cela pose une question fondamentale: la perspective que la Suisse réintègre les programmes de recherche européens Horizon 2020 s’éloigne. Elle est liée à l’extension de la libre circulation des personnes à la Croatie. Or, celle-ci a été liée par le parlement, à qui l’on n’avait rien demandé, à la conclusion d’une solution négociée avec l’UE. Le serpent se mord la queue.

Idée de la préférence nationale à l'embauche

Certes, comme le dit Micheline Calmy-Rey, le vote britannique sauvera peut-être la «voie médiane» de la Suisse. Mais celle-ci est remise en question par l’adoption de l’initiative sur l’immigration le 9 février 2014. Elle menace de provoquer l’effondrement de l’édifice bilatéral patiemment construit depuis 1992. Située, contrairement au Royaume-Uni, au cœur du continent, la Suisse doit veiller à empêcher cet effondrement.

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Que peut faire la CIP dans ces conditions? Elle poursuivra ses travaux, assure son président Heinz Brand. Elle compte développer l’idée de la préférence nationale à l’embauche, pourtant contraire à l’un des principes sacro-saints de l’accord sur la libre circulation des personnes. La marge de manoeuvre est étroite. Et la Suisse risque de devoir mener ses réflexions seule.

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Il reste un mince espoir: celui que l’UE trouve son intérêt à utiliser la voie de la négociation avec un Etat non membre pour démontrer sa capacité à entendre les peurs initiées par la libre circulation, qu’elle ne sera certainement pas prête à sacrifier. Cela pourrait favoriser le scénario d’une clause de sauvegarde consensuelle. Certains l’espèrent à Berne. Mais ce sera très difficile.

Nouvelle consultation populaire inévitable

Or, la Suisse est confrontée à un problème de calendrier. L’article constitutionnel sur l’immigration exige qu’une solution soit trouvée avant le 9 février 2017. En cas contraire, le Conseil fédéral devra freiner l’immigration par voie d’ordonnance. On sait déjà que ce calendrier ne pourra être formellement tenu. Mais il laisse assez de temps pour préparer ce qui paraît plus que jamais inéluctable: une nouvelle consultation populaire.

Le parlement devra désormais concentrer ses réflexions sur la question à poser au peuple. Plusieurs scénarios sont envisageables. Préparer une loi d’application comprenant un mécanisme d’intervention unilatéral en cas d’immigration excessive, qui sera combattue par voie référendaire. Ou élaborer un contre-projet apportant des nuances à l’initiative populaire RASA, qui demande de supprimer l’article constitutionnel sur l’immigration.

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